Revenant sur l’endettement de la Tunisie, l’expert en économie Ezzedine Saidane a indiqué que la Tunisie a un taux d’endettement de 53%. En 2010, cet endettement était aux alentours de 38% soit une perte de 15 points en quatre ans. D’après le spécialiste, ces chiffres incitent à se poser des questions : A-t-on créé de la croissance avec cet endettement et/ou de l’emploi ? Notre économie a-t-elle été préservée?
Malheureusement et d’après M. Saidane, il faut répondre par la négative à ces questions, car l’utilisation des prêts a été orientée vers la consommation, le recrutement massif et les augmentations de salaires.
Pour ce qui est de la composition de la dette extérieure, M. Saidane a estimé que tous les crédits qui ont été contractés pendant ces quatre ans sont tous assortis d’une période de grâce de deux ans ou trois ans, ce qui veut dire d’après le spécialiste que « nous devons nous attendre à une situation extrêmement tendue en 2016, 2017 et 2018; ce qui veut dire aussi qu’il y aura une accumulation énorme d’échéances et cela est en soi un crime ».
« J’entends parfois des voix qui s’élèvent pour affirmer que tant qu’on n’a pas atteint les 60% d’endettement ce n’est pas grave », s’indigne-t-il, tout en rappelant que le taux d’endettement de 60% est un taux soutenable pour une économie fonctionnelle et productive à la fois. « Ce qui n’est pas le cas pour une économie qui réalise un taux de croissance de 2% donc non créatrice d’emplois et qui à la limite ne crée pas de richesses parce qu’avec 2% de croissance, le niveau de vie du citoyen ne peut pas s’améliorer », précise-t-il. « Quand M. le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie dit qu’il ne faut pas dramatiser le problème de la dette extérieure, il m’inquiète vraiment », continue-t-il.
Pour ce qui est de l’emprunt obligataire de 2015, le spécialiste fait part de son étonnement quant au chiffre de un milliard de dollars avancé. Cet emprunt est assorti de coûts et de commissions exorbitants qui dépassent les 50 millions de dinars.
De même, le terme investisseurs a été utilisé d’une manière abusive, en parlant des « 137 investisseurs qui ont été amenés », dit-il. Or, d’après le spécialiste, il ne s’agit pas d’investisseurs à proprement parler, mais de personnes issues d’institutions financières.
Pour le spécialiste, le timing de l’opération pose un souci car bien avant la sortie sur les marchés, les agences de notation avaient promis d’améliorer la note souveraine du pays. S’ajoute à cela que le gouvernement était en train de se former et « la Tunisie n’avait pas besoin de cet argent-là à ce moment là », estime-t-il.
M. Saidane a indiqué que le taux de remboursement est 12 fois plus élevé par rapport à la dernière sortie sur les marchés internationaux en 2007 (2,4%). « Les prochaines sorties sur les marchés se feront avec un pareil taux de remboursement », avertit-il.