Dans une économie en souffrance, la Bourse de Tunis semble, à priori, démarrer en fanfare. Depuis le début de l’année, l’indice phare de la Place de Tunis a bondi de plus de 12.6%, alors que le taux de croissance de l’économie dépassera de peu le seuil de 2.5% pour les plus optimistes des analystes. Il est donc légitime de s’interroger sur l’origine de cet écart.
Structure du Tunindex
Banque | Poids dans le Tunindex |
Amen Bank | 1.30% |
ATB | 2.49% |
Attijari Bank | 5.46% |
BH | 1.61% |
BIAT | 11.24% |
BNA | 2.83% |
Banque de Tunisie | 14.0% |
BTE | 0.27% |
STB | 2.66% |
UBCI | 1.81% |
UIB | 4.37% |
WIB | 0.80% |
Pour répondre à cette question, il faut bien comprendre la structure du Tunindex. Si nous regardons le tableau, nous pouvons confirmer que l’essentiel de la hausse observée provient des banques qui pèsent près de 49%. En tenant compte de la surperformance du secteur depuis le début de l’année (19%), un simple calcul fait que plus 72% de la hausse du Tunindex provient des établissements de crédit. Il s’agit clairement d’un indice qui ne reflète pas sincèrement la structure du marché.
Le problème est même plus profond. Les performances des banques ne reflètent pas elles aussi leur situation réelle, sauf pour quelques-unes. La Bourse de Tunis est un marché « bottom line », qui ne regarde que le résultat net. La qualité du bilan ou des bénéfices importe peu, ce qui est logique dans un marché où les investisseurs individuels, donc ayant peu de bagage technique, assurent plus 50% des échanges. Grâce à la hausse des taux, les banques sont en train de gagner beaucoup d’argent
sur les placements en portefeuille. Néanmoins, c’est une source non-récurrente de bénéfices. Ainsi, le jour où les taux commenceront à baisser, les Produits Nets Bancaires (PNB) vont commencer à afficher des taux de croissance plus faible.
(En KTND) | Revenus portefeuille d’investissement | PNB | ||
S1 2017 | S1 2016 | S1 2017 | S1 2016 | |
Attijari Bank | 19 674 | 17 006 | 173 380 | 152 870 |
Amen Bank | 78 748 | 56 422 | 165 372 | 135 549 |
Banque de Tunisie | 39 218 | 30 149 | 128 090 | 115 067 |
UIB | 18 471 | 12 224 | 133 661 | 119 027 |
BTE | 5 303 | 3 345 | 20 287 | 19 808 |
BIAT | 87 022 | 74 931 | 328 513 | 278 341 |
ATB | 50 723 | 47 254 | 113 536 | 103 195 |
UBCI | 28 781 | 19 741 | 97 289 | 83 622 |
STB | 45 591 | 43 575 | 158 560 | 150 493 |
BNA | 54 574 | 47 042 | 197 506 | 183 419 |
WIB | 0 | 29 | 6 602 | 8 411 |
BH | 59 752 | 42 323 | 167 475 | 148 098 |
Total Banques | 487 857 | 394 041 | 1 690 271 | 1 497 900 |
Evolution % | 23,81% | 12,84% |
Comme il ressort du tableau ci-dessus, les revenus des portefeuilles d’investissement représentent, fin juin 2017, 28.8% du PNB des banques cotées. A titre de rappel, fin 2013, ce taux était seulement à 19.5%. Par ailleurs, il est connu que les banques tunisiennes restent largement sous-capitalisées, même par rapport aux nouvelles normes prudentielles de la Banque centrale de Tunisie (BCT). Elles sont également sous-provisionnées et affichent encore un cout du risque qui ne reflète pas les risques de l’économie tunisienne. Le marché regarde, malheureusement, ce genre de détails.
Quelle solution pour une image plus fidèle?
La hausse faussée du Tunindex pose un vrai problème. Un indice à deux chiffres fait que les investisseurs exigent un rendement très élevé des gérants. Or, un bon gestionnaire respecte les règles prudentielles et ne peut pas investir tout un portefeuille en valeurs bancaires. Dans ce cas de figure, nous ne voyons pas beaucoup de compositions capables de battre le marché, ce qui augmente la pression sur des gérants en lutte pour garder leurs position en equity.
Le Tunindex est donc, à notre avis, biaisé. Il ne reflète pas la réalité du marché. Du point de vue pratique, nous ne pouvons pas alléger le poids du secteur bancaire quelle que soit la manière de calculer l’indice, mais nous pouvons donner une image plus réelle de la performance du marché. A titre d’exemple, nous pouvons utiliser des cours moyens pour calculer la valeur de l’indice plutôt que les cours de clôture. Cela va réduire le recours à des opérations d’achat de quelques titres en fin de séances dans le seul but de doper le Tunindex. Un travail de fond est nécessaire pour résoudre ce problème.