Sept ans après la révolution, l’accès à la santé semble ne pas être le droit de tout le monde comme le stipule l’article 38 de la Constitution de 2014.
Le rapport « A propos des droits économiques, sociaux et culturels, sept ans après la révolution », qui vient d’être publié, hier, 21 novembre, lors d’une conférence de presse, au siège du Forum tunisien des droits économiques et sociaux, revient sur les droits à la santé, dans l’un de ses chapitres. Présenté par Dr Moncef Bel Haj Yahia, président de l’Association tunisienne de défense du droit à la santé,
qui a rappelé qu’il se base sur le rapport présenté par la société civile tunisienne sur l’accès à la santé. Le rapport en question « est un rapport alternatif à celui du gouvernement présenté au Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CODESC) qui porte sur l’application du Pacte portant sur la période 2000-2014, qui passe sous silence les grandes difficultés de la population à accéder aux soins ». Ci-après les points évoqués dans le rapport.
Quand l’Etat suit une politique de désengagement
La détérioration des services de soins offerts par les hôpitaux publics et les centres de santé a abouti à des services de santé à deux vitesses. Le droit à la santé consacré par l’article 38 de la nouvelle Constitution n’est pas traduit dans les faits et la situation continue à se détériorer.
Quand l’inégalité règne en maître
En milieu rural, le taux de mortalité infantile est le double de celui urbain : 24,6/1000 naissances vivantes en milieu rural contre 12,2/1000 en milieu urbain (enquête MICS4, Institut National de la Statistique-UNICEF, 2012). Le taux de mortalité maternelle dans la région du Nord- Ouest est largement supérieur à celui du Nord-Est.
Structures sanitaires de base
Le rapport avance que les structures sanitaires de base n’ont connu aucun développement notable au cours des 15 dernières années, contrairement à ce qui est affirmé dans le rapport du gouvernement. Le discours officiel sur «l’attention particulière aux soins de base» au cours des 15 dernières années s’est limité à un discours qui n’a pas été suivi de décisions et mesures concrètes sur le terrain.
Quand les difficultés financières bloquent l’accès aux soins
L’enquête de 2015 sur la consommation des ménages de l’Institut national de la Statistique (INS) a estimé que 16,7% de la population ne dispose d’aucune couverture de santé soit près de 2 millions de personnes qui sont souvent contraintes de renoncer aux soins.
Quand les médicaments font défaut
Les médicaments sont peu disponibles dans le secteur public de la santé, ce qui oblige les patients à les acquérir dans les pharmacies privées. L’accès aux médicaments essentiels est gravement affecté par l’insuffisance du financement des structures publiques et par la corruption.
Les citoyens pointent du doigt la corruption
D’après le dialogue sociétal sur les politiques, les stratégies et les plans nationaux de santé, les citoyens consultés dans les rendez-vous citoyens (du Dialogue sociétal sur la santé) confirment que la corruption est un « fléau très ancré dans le secteur: pour bénéficier d’un service il faut donner l’argent», dénoncent-ils.
Insatisfaction des citoyens des prestations offertes par les structures publiques de santé
L’enquête de l’INS en 2014 a montré que 54% des citoyens ne sont pas satisfaits des soins prodigués dans les structures de la santé publique, avec des variations régionales pouvant atteindre 79% dans le Sud-Ouest et 73% dans le Centre-Ouest. Les raisons sont liées au manque de médicaments, à la longue attente, aux délais pour obtenir un rendez-vous pour une intervention chirurgicale, à la non-disponibilité du cadre médical, au manque d’attention aux malades et au nombre élevé de patients dans les chambres.
Les droits humains sont peu respectés…
Au cours des rendez-vous citoyens du Dialogue sociétal sur la santé, les citoyens ont déclaré ressentir un manque de respect à leur égard lors des recours aux prestations du service public : mauvaise qualité de l’accueil, difficultés pour accéder à l’information utile ou à faire valoir ses droits, y compris en cas de complications ou d’échec thérapeutique, absence de garanties sur la confidentialité et parfois non respect de l’intimité. La formation sur les droits humains, pourtant intégrée dans les cursus initiaux de formation des personnels de santé, est négligée et de ce fait n’a aucune incidence sur le comportement quotidien observé dans les structures de santé publiques.