Pour sauver le tourisme tunisien, plusieurs intervenants dans le domaine ont appelé à mettre en place des réformes, afin de révolutionner le secteur. C’est ce qu’il ressort de la deuxième journée de la première édition de Tunisia Hospitality Symposium qui s’est déroulée récemment, à IHEC Carthage.
L’événement était organisé par la Chambre tuniso-allemande de l’Industrie et du Commerce (AHK Tunisie) et la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ), en partenariat avec l’Université de Heilbronn et en collaboration étroite avec le Centre d’Orientation et de Reconversion Professionnelles (CORP) et l’Institut des Hautes Etudes Commerciales (IHEC Carthage).
Prenant la parole la directrice de l’IHEC Carthage, Salma Dammak Ayadi a indiqué que l’institut dispose d’un master de management touristique depuis plus de 30 ans. La tenue de l’événement en question s’inscrit dans le cadre du rapprochement entre monde universitaire et le monde du tourisme. Et de rappeler qu’il s’agit d’un événement inspiré de l’expérience allemande de l’Université de Heilbronn, dont l’objectif est de créer un espace de rencontre et de partage entre les différents acteurs du secteur du tourisme.
De son coté, Brahim Debbeche, président de la Chambre AHK Tunisie a souligné, lors de son intervention, l’importance du tourisme tunisien. A cet égard, il a fait savoir que le programme Entreprises formatrices, lancé par la Chambre ciblera prochainement le tourisme pour jeter les ponts entre le monde touristique et les universités.
Christian Buer, professeur à l’Université de Heilbronn a indiqué que la Tunisie figure parmi les destinations préférées des Allemands pour plusieurs raisons, notamment des raisons de proximités géographique et culturelle.
Tourisme tunisien : il faut miser sur la qualité des services dans les hôtels
Comment offrir une qualité de service irréprochable aux touristes résidant dans les hôtels tunisiens? A cette question, Khaled Fakhfakh, président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie a considéré qu’il faut agir sur plusieurs volets.
Le président de la FTH a proposé la révision de la classification des hôtels. Pour lui, il s’agit d’une démarche inéluctable pour garantir une meilleure qualité de service.
D’après le même intervenant, satisfaire le client n’est pas une tâche très difficile. Des règles élémentaires s’imposent. La première règle est l’extrême propreté de l’environnement dans les hôtels. Cela est faisable, d’après le président de la FTH, à travers la gestion des déchets et la mise en place de poubelles dans les hôtels. Ainsi le pari de la propreté sera gagné indique-t-il.
Le deuxième élément n’est autre que la cuisine tunisienne. Khaled Fakhfakh souligne l’importance de mettre en valeur la cuisine tunisienne dans les buffets. Cela est justifiable, continue-t-il, par le fait que la cuisine tunisienne a su inspirer plusieurs cuisines dans le monde ce qui rend sa mise en valeur indispensable. Et de considérer que les touristes sont curieux de découvrir la gastronomie du pays qu’ils visitent.
Prendre en considération les besoins des personnes à besoins spécifiques, tel était le troisième point abordé par la président de la FTH. A cet égard, il a regretté le fait que peu d’hôtels ont pris l’initiative d’aménager un espace et des accès pour les personnes à besoins spécifiques.
Le quatrième et dernier point est le fait d’assurer une connexion wifi aux quatre coins des hôtels. Cela inciterait les résidents à partager leurs expériences et poster des photos de l’hôtel sur les différents réseaux sociaux. Cela peut améliorer la visibilité des hôtels sur les réseaux sociaux. Ainsi le client devient le meilleur ambassadeur pour l’hôtel indique le président de la FTH.
Un produit diversifié pour une clientèle qui change
C’est dans cette perspective là que la représentante de Thomas Cook, Friederike Grupp, a appelé à diversifier les produits touristiques tunisiens.
Pour elle, les résidents de l’hôtel ne veulent pas se contenter uniquement des commodités existantes, mais ils veulent faire des découvertes dans les villes, raison pour laquelle, il faut répondre à ce besoin.
Sur ce sujet, les panélistes ont été unanimes sur le fait que la Tunisie dispose d’autre ressources à offrir à part la plage et le soleil. De même, la clientèle a bel et bien changé : la clientèle des années 2017 n’est pas la même que celle des année 90, explique Mourad Ben Cheikh, représentant de TUI Group, dans le cadre du débat.
Pour une meilleure utilisation du digital au profit du tourisme tunisien
Il s’agit d’un autre point que les différentes interventions ont souligné. Un certain nombre d’intervenants ont considéré que le digital et la promotion de la destination sont intimement liés. Cependant, mettre en place le digital au profit du tourisme ne veut pas dire uniquement mettre en place un site web pour l’unité hôtelière. C’est offrir la possibilité aux clients de préparer tous les détails de leur séjour à partir du choix du pays, hôtels, nombre de nuitées, compagnie aérienne et autres détails d’un simple clic.
A cette solution, s’ajoute un autre souci de taille. En effet, Afif Kchouk, président de l’Observatoire du tourisme et Khaled Fakhfakh ont considéré que le digital sans Open Sky n’est pas une bonne idée. Ils sont d’accord tous les deux sur le fait que l’absence d’Open Sky ne permet pas aux touristes de bénéficier d’un large choix de compagnies aériennes. Markus Molnhuber, représentant de Holiday Check AG, a indiqué dans, la même logique que la digitalisation du secteur n’aura pas lieu sans Open Sky.
Il ressort des différentes interventions qu’il est urgent d’adopter l’Open Sky en Tunisie. Deux arguments plaident en faveur de cette démarche. Le premier est proposé par le directeur général de Traveltodo Tarek Lassadi: « L’Open Sky permettra de diversifier le type de clients voulant venir en Tunisie.» Le deuxième argument a été présenté par Mehdi Allani, le président de la Fédération régionale de l’hôtellerie du Cap Bon, qui avance que la flotte tunisienne n’est pas capable de satisfaire les besoins en transport aérien pour tous les clients. A cet égard, il cite le cas du marché belge dont 20% de la demande n’était pas satisfaite en 2016.
Pour réformer le tourisme tunisien, il faut commencer par la base qui est le personnel qualifié. Des milliers de jeunes bacheliers ont été formés à l’ISHT de Sidi Dhrif et dans les différentes écoles hôtelières mais ne sont pas recrutés par les hôteliers. Pourquoi?
Tout simplement parce que les hôteliers ont bradé leur produit à tel point qu’ils ne peuvent plus payer correctement le personnel qualifié. Dans les années 80, l’employé d’un hôtel ne demandait pas un bon salaire, car il gagnait beaucoup d’argent en pourboire.
Mais avec l’introduction du tout compris (all inclusive) et avec la baisse de la qualité du client, l’employé est devenu aussi pauvre que le client qu’il côtoie.
C’est un choix à faire: ou bien miser sur la qualité (le bon service, le personnel qualifié, l’environnement propre…) ou bien continuer à brader les prix et quand le client fait une réclamation, on lui répond: »mais combien vous avez payé? »
Des milliers de touristes qui visitent notre pays, mais passent leur séjour exclusivement à l’hôtel, parce qu’ils ont réservé la formule du « all inclusive » qui est une catastrophe pour le tourisme tunisien mais c’est un sujet long à discuter.