Depuis que les mouvements de protestation se sont accentués dans plusieurs régions du pays, le Front populaire préconise le retrait de la loi de finances 2018. Il reste à savoir si cette proposition est anticonstitutionnelle ou pas.
A cette question Salsabil Klibi, enseignante en droit constitutionnel à la faculté des Sciences juridiques, membre de l’Association tunisienne du droit constitutionnel, a répondu par la négative, en déclarant: « Il est bien évidemment impossible de suspendre une loi de finances déjà votée. »
Elle précise à cet effet: « Cette loi de finances est nécessaire pour autoriser la moindre dépense de l’Etat (le versement des salaires, le carburant pour les transports publics, etc.) au point que lorsque le Parlement ne parvient pas à la voter au 31 décembre de l’année, elle est promulguée par tranche trimestrielle, par voie de décret. Par contre, ce qui peut être fait c’est de promulguer une loi de finances complémentaire. Ce qui est prévu au programme. »
Et de poursuivre: « Nous en avons déjà eu une pour l’année 2017, sauf que la loi de finances complémentaire est en général faite pour trouver des ressources supplémentaires, lorsqu’au milieu de l’année on se rend compte que les prévisions n’étaient pas précises et qu’on n’a pas réussi à obtenir l’argent nécessaire à toutes les dépenses. Et jamais à ma connaissance, elle n’a été élaborée pour revoir les ressources à la baisse, en renonçant à des impôts qui avaient été prévus dans la loi de finances. »
Mme Klibi conclut: « Du temps de Bourguiba, lorsque il avait dit « revenir où nous étions », il s’agissait d’annuler la suppression de la compensation sur les céréales et dérivés. De ce fait, on avait dû recourir à une loi de finances complémentaire pour trouver d’autres ressources pour le budget de l’Etat que le bénéfice qu’aurait dû générer la suppression des compensations. »