Bilel Sahnoun, directeur général de la Bourse de Tunis, estime qu’il n’y a que des avantages à tirer de toute décision politique qui autoriserait les entreprises publiques à ouvrir une partie de leur capital en Bourse.
Dans cette interview accordée à l’Economiste Maghrébin, Bilel Sahnoun revient sur le bon cru de cette année, sur les grands chantiers en cours dont une réforme du marché financier avec l’assistance de la BERD et sur le processus engagé pour améliorer sur tous les fronts la visibilité de la Bourse de Tunis et au-delà de la place financière de Tunis.
Au regard de vos chiffres, tout indique que l’année 2018 a été un bon cru ?
Jusqu’au mois d’août 2018, nous pouvons dire que cette année a été effectivement un bon cru. On est à 25% de plus depuis le début de l’année. On a même franchi par moments la barre de 33%. A l’origine de cette performance trois facteurs :
Le premier facteur est perceptible à travers la performance des banques. C’est le secteur bancaire qui a porté essentiellement la capitalisation boursière. Plus de la moitié. Les banques ont eu le vent en poupe ces deux dernières années de par les émissions de Bons du Trésor qui sont fortement rémunérateurs à des risques faibles et sans charges derrière. L’augmentation des taux directeurs a eu également un impact immédiat sur le compte d’exploitation des banques, s’agissant de ressources presque à taux fixes et à emploi à taux variables indexées sur le TMM. En plus clair, toute augmentation du TMM implique automatiquement une augmentation du PNB des banques.
Cette tendance ne va pas continuer indéfiniment. Je pense que le secteur bancaire a atteint aujourd’hui les limites en termes de liquidités et de financement de l’économie. Je crois qu’ensemble on doit se ressaisir pour restructurer le financement de l’économie et regarder du côté du marché financier qui, bien qu’il recèle d’énormes potentialités, ne joue pas pleinement son rôle dans le financement de l’économie.
Le deuxième facteur concerne le bon comportement des grosses entreprises cotées, voire les pépites. Le troisième enfin est le corollaire de la crise que subit aujourd’hui le secteur immobilier qui n’est plus une valeur refuge et n’est plus rentable. Le retour d’investissement sur certaines zones dépasse les 20 ans. Donc probablement, plusieurs investisseurs dans l’immobilier ont eu cette tendance à réorienter leurs investissements vers un investissement boursier.
Ce constat concerne autant les personnes physiques que des groupes privés qui ne sont plus dans la même dynamique de l’investissement productif et qui sont enclins à investir plus dans le portefeuille. C’est peut-être juste une période d’attente. Cela fait le bonheur du marché financier certes mais ce n’est pas forcément , ce qu’il y a de mieux pour l’économie du pays.
Ne pensez-vous pas que vos résultats auraient pu être encore meilleurs si quelques entreprises publiques étaient cotées en Bourse ?
Les entreprises publiques constituent d’abord un problème pour le budget de l’Etat. Le temps où plusieurs entreprises généraient du cash flow et alimentaient les caisses de l’Etat est révolu. De nos jours, les entreprises publiques sont devenues, malheureusement, budgétivores.
Le deuxième grand problème de ces entreprises publiques c’est que plusieurs d’entre elles, après avoir pris, par le passé, la bonne habitude de placer de l’argent dans le secteur bancaire, ont changé de cap et sont aujourd’hui en train de pomper de la trésorerie et contribuent ainsi à l’assèchement des liquidités.
Pour y remédier, j’en conviens qu’il n’y a pas une seule solution à toutes ces entreprises. Cela doit être traité au cas par cas. La solution pour une entreprise X n’est pas forcément valable pour l’entreprise Y.
Mais, ce qui est aujourd’hui commun à toutes ces entreprises c’est le statu quo. C’est le fait de les mettre toutes face à des lignes rouges qu’on ne peut transgresser. Nous sommes en train de nous autocensurer pour trouver des solutions à ces entreprises-là.
Mais logiquement, ces entreprises doivent intéresser le marché financier même si elles sont déficitaires ou confrontées à des problèmes d’un autre genre ?
Nous pensons justement que le marché financier a besoin de ces entreprises là. Il en a besoin à plus d’un titre. D’abord on en a besoin parce que le marché financier est capable d’apporter, de par les règles de divulgation de l’information, à ces entreprises bonne gouvernance et transparence. C’est un changement radical dans le mangement de ces entreprises qu’on va leur proposer.
Le marché financier en a besoin parce qu’elles représentent de grosses capitalisations. Car, ces grosses capitalisations vont nous permettre de figurer dans le radar des investisseurs étrangers internationaux, voire des grands fonds. Et aujourd’hui, on a besoin de taille.Et ce ne sont pas les PME qui vont nous donner la taille.
Par rapport aux fournisseurs d’indices tels que Footsie, nous sommes classés actuellement « Frontier market ». L’étape suivante on doit passer à « Emerging market ». Pour passer à Emerging market, on a besoin au moins de deux sociétés dont la capitalisation est supérieure à 1,3 milliard de dollars. Ces entreprises de cette taille là, on ne va pas les trouver dans le secteur privé. Aujourd’hui, la seule entreprise privée qui réponde à ces ratio là c’est la SFBT. Derrière, il y a la BIAT mais elle n’a pas encore atteint ce niveau-là. Obligatoirement donc, il faut que ce soit des entreprises qui évoluent dans le giron de l’Etat.
Vous pouvez me dire pourquoi on cherche à passer de « Frontier market » à « Emerging market » ? Quand on franchit cette étape, les fournisseurs d’indices boursiers, au lieu d’afficher juste les performances de la Tunisie, vont transcender ce stade et devenir en plus des prescripteurs pour nous. Ils vont laisser croire aux investisseurs qu’il y a des affaires à faire en investissant dans ce futur emerging market que sera la Tunisie. Les pays, qui ont connu cette évolution de « Frontier market » à « Emerging market » ont multiplié par huit les flux d’investissements directs étrangers (IDE) en leur faveur. C’est énorme.
Donc, je pense qu’on peut trouver parmi les entreprises publiques celles qui répondent aux ratios de ces deux capitalisations. Empressons-nous de dire que passer par la Bourse ne veut pas dire qu’on va privatiser ou vendre la totalité de l’entreprise, il peut s’agir d’une ouverture partielle du capital. C’est un actionnariat public dilué. C’est le cas du transporteur public Tunisair qui est coté en Bourse. La compagnie est toujours une entreprise publique même si on aurait souhaité sa privatisation.
Vous donnez à penser que la privatisation serait une solution pour résoudre les problèmes structurels des entreprises publiques en difficulté et que les résistances consistent en une confusion entre privatisation et dénationalisation ?
L’avantage d’une introduction de ces entreprises en Bourse est énorme. Si ces entreprises publiques se font coter en Bourse, elles n’auront plus besoin de demander de l’argent à l’Etat. Elles vont lever des fonds et émettre des emprunts obligataires. On aura ainsi contribué à l’allègement des charges de l’Etat.
Pour preuve, nous avons des success stories en Bourse. Aucune des entreprises introduites en Bourse n’a recouru, après leur privatisation, à un plan social et n’a viré personne.
Nous avons Attijari qui a racheté la Banque du Sud. Cette banque était à l’agonie et aurait pu mettre à la porte plus de 1500 personnes. Aujourd’hui, l’acquéreur n’a pas seulement gardé l’effectif mais il a même procédé à de nouveaux recrutements. Il y a également Magasin Général, l’UIB qui a été rachetée par la Société Générale. Ces exemples ont très bien réussi. Il faut, me semble-t-il, chercher cet actionnariat populaire car dans l’ouverture du capital en Bourseil n’y a que des avantages.
Mieux, les entreprises publiques, qui sont en train de constituer une charge pour le budget de l’Etat, vont devenir des contributeurs fiscaux le jour où elles seront privatisées. L’exemple des cimenteries est édifiant à ce sujet. Avant, les cimenteries étaient déficitaires avant leur privatisation. Aujourd’hui, elles sont excédentaires, paient l’impôt direct et indirect, exportent et font rentrer au pays de précieuses devises. Faut-il rappeler que quand elles étaient dans le giron de l’Etat, ces cimenteries n’exportaient pas ?
Que devrait être, selon vous, le rôle de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) ?
Il y a là effectivement un grand bras financier de l’Etat qui contribue à peine à 5% des fonds dont il dispose au financement de l’économie. La CDC peut effectivement jouer un très grand rôle. C’est un véhicule de financement de choix d’autant plus qu’il offre de la confiance à l’investisseur parce que derrière la CDC il y a la garantie de l’Etat. Et c’est un signal très fort pour les entreprises elles-mêmes. Mieux, la CDC va être présente dans tous les conseils d’administration des sociétés qu’elle représente. Elle va être surtout exigeante vis-à-vis du management pour améliorer les performances de ces entreprises.
Et à propos des banques publiques cotées en Bourse, y a-t-il un autre scénario à envisager ?
Concernant les banques publiques, le changement de mangement et la mise en place de contrats objectifs par le nouveau management commence à porter des fruits. Nous le voyons à travers les états financiers, à travers le comportement boursier des actions de ces banques, et à travers l’intérêt que portent les investisseurs à ces entreprises. Je pense que ce business model, ce nouveau type de management d’entreprises publiques, qui commence à fonctionner dans les banques publiques gagnerait, à mon avis, à être dupliqué dans toutes les entreprises publiques.
Quel est l’impact des dernières circulaires de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur les banques ?
Dans l’ensemble elles visent à inciter les banques à financer davantage l’économie du pays. Il est vrai que les banques sont appelées à jouer un rôle plus important dans le financement de l’investissement productif. Les mesures de la BCT et même les orientations pour cadrer l’activité bancaire sont louables, et ce, pour deux raisons :
Primo, il y a le choix collatéral pour leur refinancement par la BCT. On voit bien qu’on met en valeur toute la partie investissement et on réduit « les produits faciles à 40%, uniquement en l’occurrence les Bons du Trésor »,
Secundo, le ratio dette-crédit sur ressources est un ratio qui va obliger les banques à faire preuve de plus d’ingéniosité financière pour capter des sommes d’argent énormes en circulation pour pouvoir augmenter le numérateur et distribuer plus de crédits.
A mon avis, il faut trouver le mécanisme idoine pour que cet argent soit investi dans l’économie et de façon durable. Il ne s’agit pas de le faire entrer par la porte et de le faire sortir par la fenêtre.
Il y a des exemples qui ont réussi. C’est le cas de l’Italie qui a mis en place un mécanisme du genre amnistie fiscale moyennant un blocage pour une période donnée. Donc, on peut imaginer un mécanisme similaire. Il y a aussi le changement de billets, mais si ce levier doit intervenir, c’est en bout de chaîne. Il faut que ce soit l’aboutissement pour être certain que toutes les mesures préalables ont été réalisées car à lui seul ce n’est pas suffisant.
Egalement, il faut toute une série de mesures qui soient un mix d’amnistie fiscale et de change. Avec tout l’argent qui rentre, on devrait être capable de le transformer dans l’économie de façon durable.
Peut-être que la Bourse avec la création de fonds, avec des blocages et avec ses produits ( emprunt national , fonds pour financer les entreprises publiques) pourrait aussi jouer un rôle dans ce sens. Il peut y avoir moult schémas. Je pense qu’il ya une expérience, et même plusieurs expériences internationales dont on peut s’inspirer. Je pense que l’Italie l’a fait et elle a réussi.
En somme, je pense qu’on peut se permettre aujourd’hui, de faire un petit break, de consommer tout ça et de le ramener dans les caisses de l’Etat.
Pour revenir à l’activité de la Bourse, pouvez-vous nous parler concrètement de vos réalisations en 2018 ?
Ce que j’ai en main, ce sont deux introductions, celle de Tunisie Valeurs qui est réalisée et celle Sidenord, filiale du groupe Mokhtar, qui le sera d’ici la fin de l’année. Par ailleurs, il y a deux à quatre dossiers d’introduction en Bourse qui sont encore en gestation chez les intermédiaires mais ce ne sont pas de grosses capitalisations.
Parmi ces dossiers en cours d’étude, y a-t-il des projets de grosses capitalisations ?
A propos de grosses capitalisations, jusqu’à aujourd’hui, il n’y en a pas. Néanmoins, nous pensons que des entreprises publiques comme la Régie des Tabacs, la SNDP, la STIR, Tunisie Telecom… Fait inédit, la Bourse ne compte aucun opérateur télécom. Pour l’histoire, l’introduction de France Telecom à Paris a transformé complètement la bourse de Paris.
Cela pour dire que les entreprises publiques précitées, pour peu qu’elles soient cotées ont la taille et le volume requis pour donner de la profondeur à la Bourse et la transformer fondamentalement. De nos jours, la Bourse de Tunis ne finance que 10% de notre économie contre une moyenne mondiale de 30%. Cela voudrait dire que nous sommes encore loin de la moyenne mondiale. Aujourd’hui, notre capitalisation est autour de 26% du PIB. C’est trop faible. Au minimum on doit passer à 50%. Pour atteindre ce seuil, il faut doubler la capitalisation et pour ce faire, il faut encore 26 milliards de dinars. Ce n’est pas avec des PME qu’on peut y arriver. Certes on travaille sur les PME pour essayer d’en augmenter le nombre mais il faut avoir surtout de grosses capitalisations qui nous permettent de ramener des fonds conséquents.
Si l’on arrive à attirer les grosses capitalisations, on sera dans un cercle vertueux. Car quand il y a une profondeur et de grosses capitalisations, il y a des investisseurs et des fonds spécifiques, à l’affût des affaires que peuvent générer les nouveaux marchés, qui ne manqueront pas d’émerger.
Je le dis au risque de me répéter, l’avantage de l’investissement étranger en portefeuille est très important. Un investissement étranger dans l’industrie ramène des équipements et peu de devises. Conséquence : la captation nette de devises de l’investissement étranger dans l’industrie est très faible par rapport à l’investissement global .Alors que l’investissement en portefeuille vient en totalité en devises et il est relativement stable.
Est-ce qu’il existe d’autres activités, secteurs, créneaux qui peuvent intéresser la Bourse de Tunis ?
Bien évidemment. Pour ne citer que quelques niches, il y a en premier lieu les entreprises confisquées. Malheureusement dans le schéma de cession des entreprises confisquées, ils n’ont pas prévu l’introduction en Bourse. A titre indicatif, le Groupe Zitouna qui vient d’être vendu, aurait pu être un excellent candidat pour la Bourse. C’est dommage que le schéma de sa cession n’ait pas prévu l’ouverture du capital de ce groupe à la Bourse. Toutes les entreprises confisquées auraient pu intéresser la Bourse. Antérieurement, nous avions réussi quelques opérations. C’est le cas du concessionnaire automobile KIA. Cela pour dire que l’introduction en Bourse est une bonne affaire.
Viennent ensuite les caisses de sécurité sociale. Tout le monde sait que nos caisses de retraite sont en difficulté. Et on sait, en même temps, que les Tunisiens pensent à des compléments de retraite pour améliorer leurs retraites futures qui ne peuvent plus être assurées dans les conditions actuelles au moyen du système de répartition.
Aujourd’hui cette tâche relève du rôle des assurances (assurance vie, compléments de retraite…). Ces produits d’assurance, de par le développement des marchés dans le monde, sont tous tirés par l’assurance vie. Malheureusement, nous n’avons pas encore changé la mentalité des gens et promu l’assurance capitalistique. Pis, on n’a pas non plus mis en place les moyens pour que l’assureur lui-même devienne un acteur dans le marché financier à travers les fonds de pension.
Pour y parvenir, il faudrait penser surtout à reconstituer l’épargne nationale qui est passée de 22% en 2010 à 10% aujourd’hui.
Pour vous donner une idée de l’avantage qu’on peut tirer de l’investissement en portefeuille de long terme, je prends l’exemple de la BNA. La BNA, sur les trois banques publiques, est la seule à n’avoir pas recouru à une augmentation du capital parce qu’elle a à sa disposition un fonds de portefeuille, voire un petit trésor de guerre à travers sa participation à plusieurs sociétés cotées (SFBT, STAR, Ami …).
Si la CNSS avait placé il y a quelques années un milliard de dinars ou plus, elle serait aujourd’hui un acteur principal du marché. La plus-value sur un portefeuille d’un milliard de dinars aurait pu tripler sinon plus. Quand je vois l’effet multiplicateur de la BNA il est actuellement à deux chiffres.
C’est pour dire au final que ce sont ces fonds de pension qui peuvent dynamiser le marché et permettre de gagner en même temps beaucoup d’argent. L’effet multiplicateur est énorme.
En Arabie Saoudite, l’Office Telecom saoudien dont le capital, par l’effet d’une décision politique, a été souscrit par un actionnariat populaire, a fait exploser la Bourse qui représente aujourd’hui à elle seule 55%. Par l’effet d’une décision politique, on peut transformer un peuple en investisseurs.
Voudriez-vous nous donner un aperçu de vos projets à court et moyen terme ?
Nous sommes en plein chantier. Nous avons entamé, il y a deux mois, la réforme du marché financier avec l’assistance de la BERD. La loi qui régit ce marché remonte à 1994. Elle a pris quelques rides et elle n’est plus adaptée à l’évolution de l’industrie financière. Ce qu’on espère du législateur avec la nouvelle réforme c’est qu’il nous libère, en ce sens que l’on doit adopter les standards internationaux en termes de surveillance, de rigueur. Aujourd’hui, les structures de notre marché financier sont certes adaptées aux ratios internationaux mais c’est au niveau de l’initiative que cela coince. Nous avons besoin de lancer de nouveaux produits dérivés, les options, la vente à découvert, le prêt/ emprunt du titre. Notre offre de produits est très limitée. Il faut qu’on développe de nouveaux types d’investisseurs dont les fonds de pension. Il faut qu’on aille trouver des investisseurs institutionnels. Puis, il y a la CDC qui n’a pas épuisé tous ses moyens d’intervention. Loin s’en faut.
On s’est donné pour perspective d’améliorer notre rating avec Footsie et d’être intronisé membre à part entière au sein de la Fédération internationale des bourses dont le siège est à Londres. Probablement, nous serons ainsi plus visibles. Nous aurons accès à ce club fermé et à toutes les études d’informations disponibles. Egalement, nous allons profiter des échanges avec d’autres places.
Ce qui nous manque en Tunisie, c’est une structure de notoriété devant représenter tous les acteurs de la place financière de Tunis. A Londres, il y a la City qui parle au nom de tous les métiers. A Paris, il y a Europlace, à Casa il ya Casablanca Financial City. En Tunisie, cette structure est éparpillée entre la BCT, la Bourse, l’Association professionnelle des banques…. Il n’y pas une structure qui nous regroupe. Je pense qu’on doit décréter la création d’une structure de place. Cela pourrait être sous forme d’une association mais elle gagnerait à être décrétée pour obliger les gens à se mettre autour d’une même table.
Elle va permettre d’harmoniser les actions et propositions. Elle devient ainsi une force de propositions et surtout une voix qui s’entend au plan local mais également à l’international en prélude à une place financière que cette structure peut mettre en valeur et qui valorise ses avantages.
On a signé une convention de partenariat avec Paris Europlace et une autre avec la City de Londres mais on n’a pas encore cette légitimité d’être une place représentative de la Tunisie.
Pour revenir au projet de réforme du marché financier, nous pensons que les grandes lignes de la réforme seront esquissées durant l’année 2019. Avec cette réforme on va savoir comment le marché financier va se libérer pour qu’il joue pleinement son rôle dans le financement de l’économie et de captation de l’épargne longue et de sa transformation en investissement productif.
En termes d’introduction, je pense qu’on aura trois ou quatre dossiers qui sont bien avancés et qui pourraient aboutir à des introductions. Mais le souhait pour 2019, c’est de voir l’Etat tunisien avec ses entreprises publiques intéresser les investisseurs, une décision, pour peu qu’elle soit prise va transformer profondément le marché.
La croissance va impacter positivement la Bourse et créer de nouveaux besoins d’investissement. Il y a aussi les émissions obligataires, il y a les banques et les sociétés de leasing qui émettent sur le marché. C’est un secteur très important même si cette année il y a eu un problème de liquidité. Aujourd’hui, les sorties obligataires à plus de 10% ne sont pas faciles à rentabiliser. Et je pense que le secteur du leasing, il est un peu dans cette dualité
La double cotation des entreprises pourrait-elle contribuer à booster la Bourse de Tunis ?
Nous avons un seul cas de double cotation à Tunis. C’est celui d’Ennakl à Tunis et à Casa. Vu du côté des spécialistes, on a l’impression d’avoir affaire à la cotation de deux sociétés séparées. Ainsi le titre coté à Casa n’est pas celui qui est coté à Tunis et vice-versa. La non-fongibilité des titres est due à la réglementation des changes. C’est pourquoi, la réglementation des changes doit être réformée pour certaines activités telles que la double cotation spécifique. Il s’agit d’une libéralisation des changes qui ne serait pas totale mais spécifique à certains secteurs, s’agissant, entre autres, de la double cotation de titres sur deux places.
Par ailleurs, il ya de grandes places boursières à l’instar de la place de Paris, de Londres, de Dubai et bien sûr de Casa qui sont intéressées par la double cotation de grandes entreprises tunisiennes. Et on peut même les mettre en concurrence pour savoir à qui on peut offrir une partie du capital des entreprises tunisiennes.
A titre indicatif et pour l’histoire, en 2010, on allait coter Tunisie Télécom à hauteur de 15% à Paris et 10% à Tunis. Le dossier était prêt. Paris a placé les 15% en un clin d’œil. L’opération a été arrêtée parce qu’il y a eu le soulèvement du 14 janvier 2011. Aujourd’hui, le potentiel de la double cotation est énorme tant il peut être assimilé à un investissement direct étranger en devises