S’il y a une qualité dans l’équipe locataire de la Kasbah, c’est qu’elle appelle un chat un chat.
Elyes Fakhfakh vient d’annoncer que la croissance du PIB ne chuterait pas de 4,3% en 2020 comme estimé auparavant, mais de 7%. Un chiffre qui fait froid dans le dos et confirme que l’année sera la pire depuis l’indépendance.
Les grandes lignes du plan de relance
Maintenant la feuille de route du Gouvernement reste la grande inconnue mais le Chef du Gouvernement (CdG) a déjà donné les grandes lignes. Entre autres, ce plan de relance visera la protection du tissu entrepreneurial national et la conservation du maximum de postes d’emploi.
La priorité sera accordée aux secteurs les plus sinistrés, et ce, en veillant à combattre la précarité de l’emploi. La stratégie de l’Etat viserait également à plus de digitalisation des services administratifs et l’amélioration du climat des affaires.
Le CdG a également évoqué, indirectement, la nécessité de redonner vie à toutes les machines de génération de revenus. Et ce, en insistant sur la reprise de l’activité normale des industries extractives (les phosphates et le pétrole).
Par quels moyens ?
M. Fakhfakh a donné des éléments de réponse à cette question. Il s’agit de collecter un maximum de ressources en interne. En minimisant le recours à l’endettement extérieur. Il faut donc se préparer à des mesures capables de générer immédiatement des recettes significatives à l’Etat.
Si nous regardons les équilibres budgétaires révisés dans le dernier rapport du FMI, nous constatons que passer d’une baisse de -4,3% à -7% signifie une chute des ressources propres de l’Etat d’au moins 20%. Par rapport aux estimations initiales. Le premier scénario tablait sur un recul des recettes de 5,453 milliards de dinars, soit 15,3%.
Il est clair que les décideurs ont compris qu’il faudra s’attendre à une diminution plus importante de l’impôt sur les sociétés et sur les revenus. Puisque la contraction de l’économie sera plus accentuée. La baisse du commerce extérieur va également induire moins de droits de consommation et de douane. Les investissements publics paieront le prix car des coupes de l’ordre de 3,5 milliards de dinars sont déjà prévues. C’est un autre coup dur à la croissance car l’Etat reste encore la locomotive de la croissance dans le modèle tunisien.
Des choix difficiles à faire
Quelle que soit la solution proposée, la relance ne sera jamais parfaite. Ce qui est tout à fait normal lorsqu’il s’agit de résoudre un problème économique.
Si on va prélever plus d’impôts, c’est que nous allons réduire la capacité des entreprises à investir et à lever des dettes et des fonds propres. Si on va augmenter les taxes directes, c’est que nous allons sanctionner la consommation à travers une plus grande inflation. Cela va pousser les taux d’intérêt à la hausse.
Si on va s’endetter sur le marché local, c’est que l’Etat va continuer à concurrencer les entreprises sur le peu de ressources disponibles. En même temps, recourir aux marchés internationaux alors que l’économie ne génère pas de richesses et notre rating est plus bas que jamais est suicidaire à moyen terme.
En même temps, ne pas s’endetter c’est ne pas investir et ne pas permettre aux entreprises de le faire. Même la lutte contre le commerce parallèle aurait des conséquences sociales bien que toutes les solutions passent par la lutte contre ce fléau.
Le bon sens voudrait que la solution à adopter soit un mix de tout cela, de sorte à tenter de retrouver le juste équilibre.
Nous espérons juste que le traitement des dossiers des entreprises publiques ne sera pas mis de côté car ce n’est pas acceptable d’arracher l’argent aux agents économiques pour le mettre dans des machines à pertes.