Les travaux de la plénière consacrée à un dialogue avec le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT) Marouane El Abassi ont démarré.
Le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Marouane El Abassi, a présenté l’impact de la crise économique sur la note souveraine de la Tunisie et les principaux indicateurs de l’économie tunisienne tels que la balance de paiements, le marché de change…
Le gouverneur a rappelé que les prévisions du ministre des Finances quant à la croissance du PIB pour l’année en cours tablent sur une croissance négative de 7,2%. Notons que le PIB nominal sera, pour la première fois, depuis les années 1960 négatif. La Tunisie terminera l’année avec une inflation à 5,7% et des recettes touristiques en forte baisse. Et d’ajouter que la crise aura un impact grave sur l’emploi.
L’investissement et l’exportation, moteurs de la croissance
Le gouverneur de la BCT a annoncé que les revenus de la récolte de l’huile d’olive sont estimés à 2,5 milliards de dinars. S’agissant du déficit énergétique, il a rappelé la baisse des investissements dans le domaine énergétique (baisse de la production pétrolière, arrêt du champ Nawara, baisse de la production phosphatée…). En Tunisie, l’investissement et l’exportation sont les deux principaux moteurs de la croissance. Aujourd’hui, l’investissement et l’épargne sont en baisse !
Le déficit courant a atteint pour la première fois un taux de 11%. Aujourd’hui, il est à 8%, considéré par le gouverneur de la BCT comme un taux élevé.
Au niveau des recettes en devises, Marouane El Abassi s’est félicité du niveau des revenus du travail (transferts des Tunisiens résidents à l’étranger). Toutefois, Il n’a pas manqué de rappeler l’impact négatif de la baisse, depuis presque une décennie, des flux des IDE sur les réserves en devises du pays. Et d’ajouter qu’il faut une gestion positive : « Consommer tunisien et réduire les importations non utiles. Les restrictions de voyage ont baissé le recours aux devises ».
Évoquant l’endettement, Marouane El Abassi a appelé à prêter attention à la soutenabilité de la dette qui s’aggrave quand elle est destinée à la consommation, au paiement des salaires et pour couvrir le déficit budgétaire et non pas à l’investissement !
« Tout sauf l’inflation ! C’est le gros fléau »
Marouane El Abassi a, en outre, tenu à souligner que la politique monétaire efficace adoptée depuis 2018 a aidé à faire baisser l’inflation, ce qui a permis de réduire le taux directeur de la BCT à deux reprises. Elle a permis aussi une appréciation du dinar par rapport aux monnaies étrangères et ce grâce aussi à la baisse de l’importation. « Tout sauf l’inflation ! C’est le gros fléau. Il faut une solidarité tunisienne pour maîtriser l’inflation à travers la rationalisation des importations dans la prochaine période pour préserver le stock en devises et éviter les anticipations négatives », souligne Marouane El Abassi.
Evoquant le rôle du secteur bancaire pendant la crise sanitaire de la Covid-19, le Gouverneur de la BCT a rappelé que ce secteur a appuyé l’économie nationale et a contribué au financement des entreprises. Celles-ci ont, toutefois, un problème de manque de vision et une instabilité économique qui n’encouragent pas les investisseurs parce que l’investissement local encourage aussi l’investissement étranger.
« Plusieurs secteurs rencontreront des difficultés durant la prochaine période. Il faut préserver le tissu économique à travers le financement des entreprises. Pour le tourisme, il faut faire attention à ce secteur, prendre des décisions de rupture et repenser un autre modèle économique basé sur plusieurs autres paramètres », ajoute Marouane El Abassi.
Un faux problème
Le Gouverneur de la BCT n’a pas manqué aussi de rappeler le débat sur le financement du déficit budgétaire et la BCT. « C’est un faux problème ! On ne peut pas comparer la situation de la Tunisie avec d’autres pays », dixit Marouane El Abassi qui a rappelé que le rôle de la BCT consiste à garantir la stabilité financière et la lutte contre la hausse du taux de l’inflation rappelant qu’à travers des achats fermes, la BCT a accordé un financement à hauteur de 3,4 milliards de dinars. Le gouverneur a rappelé, à ce titre, la recapitalisation des banques publiques qui donnent aujourd’hui des bons résultats et financent les entreprises publiques et privées.
En effet, « Le problème central est le déficit budgétaire causé essentiellement par la compensation et la tarification au niveau des entreprises publiques et leur mode de gouvernance et la dette cumulée. Ce déficit est aggravé par la crise sanitaire. La vraie question aujourd’hui est comment sortir de cette situation pour ne pas faire face à une autre situation plus grave», a-t-il ajouté.
Marouane El Abassi a, lors de son intervention, alerté contre l’impact du manque de visibilité et de l’instabilité politique sur la note souveraine de la Tunisie. « C’est un grand problème qui impacte notre notation souveraine et l’endettement », explique M. El Abassi.
S’adressant aux députés, il a assuré que la BCT est prête à aider, « mais il ne faut pas ouvrir une vanne et fermer une autre ». Il faut des solutions raisonnables », a-t-il conclu.