Les représentants de l’APTBEF ont retrouvé hier le Président de la République Kaïs Saïed pour lui faire parvenir les idées du secteur sur la façon dont il va contribuer aux efforts nationaux durant cette période transitoire.
Invités quelques semaines auparavant à Carthage et appelés à faire baisser les taux, les banquiers se sont retrouvés dans une situation délicate. D’une part, faire baisser les taux n’est pas une décision qu’on prend à la légère. Car il s’agit de la résultante de tout le fonctionnement de l’économie. D’autre part, ils ne pourront pas sacrifier leurs marges car certains établissements de crédit ne sont pas en mesure de le faire. Pourtant, l’APTBEF a fini par trouver la solution qui les éloigne des missiles du Président tout en soignant leur image auprès du grand public.
Crédits : un taux ne dépassant pas TMM +2%
La première mesure concerne les PME ayant moins de 200 salariés, en leur accordant des crédits d’exploitation (découverts non compris) à un taux ne dépassant pas le TMM +2% (soit 8,25%). Et ce, sur une durée maximale d’une année.
Cette décision touche théoriquement la majorité des clients des banques qui connaissent des difficultés de trésorerie. Selon les derniers taux d’intérêt effectifs moyens, ces crédits ont été accordés avec une moyenne de 9,44% et les taux peuvent atteindre 11,32%. Pour certaines entreprises, cet effort allège la facture de fonctionnement et les aide à mieux résister. C’est comme si le TMM aurait baissé de 100 points de base. En même temps, cette réduction n’affectera pas significativement les profits des banques qui vont récupérer une partie de ce manque à gagner sous la forme d’un coût de risque moins important.
Versement des aides sociales exceptionnelles
La seconde mesure est le versement des aides sociales exceptionnelles accordées par la Banque Mondiale pour la lutte contre la Covid-19. Cela va mettre la pression sur les différentes agences bancaires, mais il aura la vertu de rappeler aux bénéficiaires que les établissements financiers ne se résument pas seulement à la Poste. Cette dernière offre des services similaires avec des frais moins importante. Elle attire la majorité de la classe moyenne et les petites épargnes.
Se positionner commercialement auprès de tous les ménages est un effort que toutes les banques doivent fournir. En effet, cette occasion coûtera moins chère que n’importe quelle campagne publicitaire. C’est aussi l’opportunité de faire passer le message que les banques ne sont pas des établissements qui ne cherchent que les profits et qu’ils ne rendent jamais de services gratuits.
Lutte contre la Covid-19: allocation de 160 MTND
La troisième mesure est l’allocation de 160 MTND. Objectif : soutenir l’effort national de lutte contre la Covid-19 et le développement de l’éducation. 50 MTND de cette somme seront destinés à garantir la réussite de la rentrée scolaire. Ici, les banques vont passer un autre message : nous sommes prêts à partager une partie de nos revenus engrangés grâce à un environnement de taux d’intérêt élevé. Les établissements financiers sont largement critiqués sur les réseaux sociaux. Ils sont même accusées de contribuer à l’effondrement de l’Etat en lui prêtant de l’argent à des taux élevés.
Mais ce n’est pas tout. En présentant ce chiffre, le président de l’APTBEF a insisté sur le fait que cela représente 2% des produits d’exploitation des banques, donc de leur chiffre d’affaires. Fiscalement parlant, le traitement de ces dons pourrait être favorable.
Selon l’article 12 du Code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés, ces dons sont déductible dans le cas où ils sont justifiés et à concurrence de 2% du chiffre d’affaires brut. S’ils sont accordés à l’Etat, ces dons sont déductibles pour leur totalité.
Reste maintenant à savoir si cela sera réellement le cas. En 2020, les banques ont massivement contribué au fonds 1818. Fiscalement, Elles n’ont bénéficié d’aucune faveur. En effet, ces montants ont été déduits des résultats après impôts, causant un recul significatif des bénéfices du secteur.
Dans tous les cas, l’APTBEF a pu trouver la bonne solution pour sortir de la situation dans laquelle elle s’est retrouvée. Et ce, en s’offrant un joli coup médiatique. En valeur, c’est l’effort le plus important. Il pourra être ressenti par la plupart des Tunisiens. C’est l’art de faire d’une pierre plusieurs coups.