Dans leur diagnostic de l’économie tunisienne, les experts de la Banque Mondiale ont relevé plusieurs défaillances structurelles qui empêchent le modèle économique tunisien de réaliser son plein potentiel. Invités hier à la commission des Finances à l’ANC, ils ont fait part de ces entraves aux députés, tout en leur proposant des pistes de réformes qui permettraient, selon eux, à la Tunisie de devenir « le tigre de la Méditerranée ».
Pour donner de la consistance à cette périphrase, la Banque Mondiale préconise de revoir le rôle de l’Etat dans l’économie nationale et d’ouvrir « un système qui a longtemps été paralysé par la corruption et les pratiques protectionnistes ». « Ce n’est pas dans le sens libéral, mais il s’agit d’ouvrir les opportunités à tous et de favoriser la concurrence loyale », a tenu à préciser Antonio Nucifora, l’économiste principal de la Banque Mondiale pour la Tunisie.
L’ensemble des réformes proposées par son institution n’est pas selon ses dires destiné à favoriser un modèle économique bien déterminé, mais il s’agit de lever les barrières qui ont conduit à la stagnation de l’économie tunisienne et à sa sous-productivité.
Ainsi pour faire face à la corruption endémique, qui coûte à la Tunisie autour de 2% du PIB par an (selon le rapport de Global Financial Integrity 2011), la Banque Mondiale préconise d’éliminer les barrières à la concurrence et à l’entrée dans plusieurs secteurs clés de l’économie pour éliminer les privilèges et le copinage. Cette réforme, qui comporte également la simplification et l’allègement des réglementations, est selon, l’expert de la Banque Mondiale, d’autant plus urgente que, plus de trois ans après la révolution, le système des réglementations qui ont agi comme un écran de fumée pour l’appropriation des rentes n’a pas encore été modifié.
Antonio Nucifora estime également que l’amélioration du climat des affaires est tributaire d’une nouvelle stratégie industrielle où l’appui serait mis sur les secteurs à haut potentiel, au-delà des industries d’assemblage. L’industrie devrait également avancer dans un sens qui limite la dichotomie onshore/offshore. Ceci passe selon ses dires par une révision du code de l’investissement et du système fiscal.
La réforme du système financier tout entier, et notamment le secteur bancaire figure également en haut de la liste des réformes proposées. Evoquant les banques et les entreprises publiques, Antonio Nucifora, a dit ne pas être contre le rôle de l’Etat dans leur gestion, mais il a plutôt attiré l’attention sur la mauvaise gestion et « les pratiques fallacieuses ». Il a de ce fait évoqué l’exemple de Tunisie Télécom, qui représente selon ses estimations, une entreprise coûteuse avec une faible compétitivité.
« L’ouverture » a également été préconisée au niveau du système éducatif. La Banque Mondiale a en effet conseillé d’autonomiser l’enseignement supérieur, en encourageant le partenariat public/privé et en introduisant les certifications internationales.
Ces réformes visent selon leurs concepteurs à réduire le protectionnisme de l’Etat tout en maintenant son rôle réglementaire.