Les agents pénitentiaires ont organisé hier, le 4 avril 2014, un rassemblement d’une heure devant les 27 prisons du pays pour exiger l’application des accords signés avec le ministère de la Justice.
Mohamed Nizar Mouelhi, secrétaire général du syndicat des agents pénitentiaires de Kairouan, a déclaré, sur les ondes de Shems Fm, que les protestations n’allaient pas entraver le travail dans les différentes structures carcérales.
Ce mouvement de protestation reflète le malaise de ces agents. Tout comme les prisonniers, les agents souffrent également des conditions difficiles au sein des prisons délabrées du pays.
Le rapport publié en mars 2014 par le bureau tunisien du Haut Commissariat des Nations unies aux Droits de l’Homme (HCDH), qui traite de la situation des prisons tunisiennes, entre les normes internationales et la réalité, reflète les pressions subies par le personnel carcéral.
Cette étude onusienne, réalisée sur deux années, indique par exemple que dans la Prison civile du Kef, le nombre des agents et des cadres est de 181, dont seulement 7 agents s’occupant de la communication directe avec les prisonniers. Un agent pénitentiaire surveille ainsi, à lui seul, 76 prisonniers. A la Prison civile de Sfax, le nombre des détenus surveillés par un seul agent s’élève à 50, ce qui est, selon le HCDH « très grave », les normes internationale limitant le nombre maximal de prisonniers par agent à 16.
Cet encombrement carcéral élevé se répercute négativement sur la relation des agents qui se trouvent obligés de surveiller les détenus pendant de longues périodes pouvant même atteindre les 23 heures par jour. Cette tension, continue et permanente, augmente le stress chez les prisonniers, et diminue la vigilance des agents, qui se trouvent souvent incapables de contenir les incidents de violences chez la population carcérale.
Durant la journée d’étude consacrée à la présentation du rapport du HCDH, qui s’est tenue jeudi le 3 avril 2014, au siège du ministère de la Justice, des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle, les défaillances dont souffre l’institution ont été exposées dans le détail : vétusté des infrastructures, inadéquation du cadre juridique, ou encore la maltraitance et la torture.
L’assistance, composée d’officiels onusiens, de responsables du gouvernement tunisien, d’avocats, de juges, de députés, d’agents pénitentiaires et d’activistes, a proposé des pistes de réformes, variant entre la refonte totale du code pénal, une plus grande ouverture des prisons sur le monde extérieur (à travers les visites des associations de la société civile), ou encore la mise en place de caméras de surveillance pour réduire les pratiques de violence et de torture.
Commentant ces derniers points évoqués souvent dans les séminaires et colloques consacrés à la réforme de l’institution carcérale, Marwane Youssfi, un lieutenant à la Prison civile du Kef, s’est particulièrement montré déçu. « Cette journée est consacrée à l’étude des prisons entre les normes internationales et la réalité. Nombreux sont ceux qui souvent font la comparaison entre les normes internationales et le passé. Plusieurs continuent toujours d’utiliser des termes comme bourreau et tortionnaire », a-t-il déploré.