Alors que les responsables de la sécurité sociale commencent à multiplier interviews et apparitions dans les médias pour rappeler les déficits chroniques des caisses sociales et communiquer sur la nécessité de la refonte de ces caisses déficitaires, un document de la Banque Mondiale fait plutôt état d’une communication plutôt déficiente alors qu’elle devrait être « plus professionnelle ».
600.000 dollars, c’est en effet la somme allouée, dans le cadre du projet d’appui aux réformes de la sécurité sociale, à des agences de communication ou à des médias, pour la conception et la mise en œuvre d’une stratégie d’information et de communication autour de la réforme du système de la protection sociale.
Le projet en question est financé par 1.000.000 dollars d’autofinancement et de 4.700.000 dollars en provenance du Fonds pour la transition dans la région MENA. La Banque Mondiale en plus de son rôle d’administrateur du Fonds est ici l’organe d’appui à l’exécution du projet.
C’est que, durant la période du projet (novembre 2013, décembre 2016), la Banque Mondiale, en sa qualité d’organisme d’appui à l’exécution, « aidera à préparer/évaluer, suivre et rendre compte du projet, conformément à ses propres politiques et procédures et en collaboration avec ces pays. »
Pour assurer le volet « communicationnel », la Banque Mondiale précise que « dans la mesure du possible, un appel d’offres sera lancé préalablement à l’approbation des contrats dont la valeur est supérieure à 200.000 USD, et ce, par le biais du système d’appel d’offres basé sur la qualité et le coût (QCSBS), notamment en ce qui concerne l’entreprise qui se chargera de la préparation technique des réformes et celle qui se chargera de gérer les stratégies de communication. »
Si donc, le coût de la médiatisation s’élève à plus de 10% du coût total, c’est que la tâche de « faciliter l’introduction de réformes au niveau des systèmes de sécurité sociale » est difficile. La Banque Mondiale la qualifie même d’opération« à risque élevé ».
Elevé, c’est en effet l’adjectif employé par la Banque pour qualifier les risques inhérents à la mise en œuvre générale du projet. Dans une annexe précisant le «cadre d’évaluation du risque opérationnel », les experts de la B M détaillent ce risque selon les composantes du projet. Ainsi, à la date de la conception du document, ils ont estimé « élevé » le risque inhérent aux parties prenantes : le gouvernement qui souffrait alors de l’instabilité politique, les syndicats et le patronat avec qui « il pourrait y avoir des tensions » ou encore le grand public. « Le plus grand risque soulevé concerne la promptitude du grand public et les perceptions qu’il a du processus de réformes et des décisions prises. En raison de l’incertitude politique qui règne, il est possible de penser que l’appui aux réformes gouvernementales ne suffit pas et que ces dernières puissent avoir des effets sur le bien-être. », Lit-on dans le document de la Banque.
Pour la gestion de ce risque, le gouvernement et l’agence chargée de la communication devront, selon la Banque Mondiale, mettre l’accent sur « l’amélioration de l’équité au niveau des dépenses en subventions ainsi que sur l’amélioration de la viabilité des retraites de l’assurance maladie. »
Cette stratégie de communication devrait aller de pair avec le dialogue social, engagé depuis la signature du contrat social en janvier 2012, et paver ainsi le chemin pour l’aboutissement du dialogue autour de la réforme de la sécurité sociale, et des subventions.
Reste à savoir si les partenaires sociaux, notamment les syndicalistes, et le grand public digéreront des produits médiatiques conçus sur mesure et sur commande.