« Notre approche repose sur deux principes : préserver l’intégrité physique des otages et ne pas céder au chantage lors des négociations ». C’est ce qu’a déclaré Monji Hamdi, vendredi dernier, en se prononçant sur l’affaire de Mohamed Ben Cheikh, agent de l’ambassade de Tunisie en Libye, et du diplomate Laaroussi Gontassi, enlevés, successivement, les 21 mars et 17 avril, par un groupe armé libyen.
Embarrassé et laconique, le chef de la diplomatie tunisienne semblait choisir et mesurer chacun de ses mots, lors de la conférence tenue avec les ministres des Affaires étrangères français et allemand, en présence de journalistes tunisiens et étrangers.
La précaution et la discrétion étaient en effet de mise, et le sont toujours. Car à ce jour, le gouvernement tunisien ne sait pas encore quelle approche adopter : en effet, les ravisseurs ont exigé la libération des terroristes libyens Imed Elouej Badr (alias Abou Jaâfar Elliby) et Hafedh Edhbeê (alias Abou Ayoub) emprisonnés en Tunisie et condamnés à 20 ans de réclusion. Une concession serait donc comme une capitulation devant le terrorisme. Et puis l’identité des ravisseurs n’est pas très claire, la discrétion et le mystère d’un ennemi ne font qu’augmenter son animosité et l’acculer à des actions imprévisibles.
Pis encore, en Libye, l’Etat n’a jamais été aussi vulnérable. Il s’est en effet désintégré et se trouve désormais impuissant et sous l’emprise de groupes terroristes et extrémistes armés qui bloquent les ports et qui font régner la loi de la terreur à travers le pays. Du coup, les autorités tunisiennes doivent composer avec la réalité de ce terrain hostile et friable et recourir à des initiatives plutôt informelles. C’est ce qu’essaie d’accomplir le comité des négociations tuniso-libyen. Formé initialement pour résoudre les litiges qui ont récemment perturbé l’activité au niveau du poste frontalier de Ras Jedir, ce comité, composé de personnes de la société civile et de notables des deux côtés de la frontière, œuvre désormais, à sa façon, pour la libération des otages tunisiens.
Dans une interview accordée au quotidien arabophone Achourouk d’hier, Mustapha Abdelkébir, le militant des droits de l’Homme qui préside le comité des négociations, a rapporté que le diplomate tunisien Laaroussi Gontassi aurait été capturé à la suite de sa tentative de libérer deux ingénieurs tunisiens enlevés par un groupe armé. C’est que selon Mustapha Abdelkébir, qui préfère le terme d’arrêtés au terme « otages », les Tunisiens arrêtés, que ce soit par les autorités ou les groupes armés en Libye seraient plus d’une vingtaine. Les libérer demande, en plus des efforts officiels au niveau des deux gouvernements, une forte mobilisation populaire.
« L’alternative serait de focaliser sur les relations sociales bilatérales et les liens familiaux. Les liens de parenté avec les tribus libyennes pourraient également faciliter le contact avec les ravisseurs », a proposé le président du comité des négociations. Interrogé par l’envoyée spéciale du quotidien à Medenine, Mustapha Abdelkébir a écarté une éventuelle liquidation des otages tunisiens, estimant que les ravisseurs, ne vivant pas dans un milieu déconnecté des populations locales, n’avaient aucun intérêt à recourir au meurtre.