L’Europe, notre premier partenaire économique, s’est rendu dimanche aux urnes. Le résultat du vote nous concerne à plus d’un titre. Parce que la crise économique s’approfondit sans cesse et que le citoyen ne voit encore rien venir, que la souffrance et la détresse de nos compatriotes deviennent de plus en plus insupportables, que près d’un million deux cents de nos concitoyens y vivent, que nos politiques ont failli à leur mission, que notre pays va à la dérive, que notre deuxième République est en panne…Pour toutes ces raisons et d’autres, nous devrons, malgré nous, nous y intéresser.
Par notre géographie, notre destin est étroitement lié à la politique de ceux qui sont sortis des urnes. Une Europe de gauche aurait été plus solidaire avec les balbutiements de notre démocratie. La croissance, le développement durable, l’emploi, la sécurité et la paix, objectifs de notre Révolution, cette Europe-là pourrait y contribuer et aider à les atteindre. Quant aux eurosceptiques dont les sondages ont annoncé le succès, confirmé par le vote d’hier, quelle sera leur attitude vis-à-vis du « Printemps arabe »?
Les signaux révélateurs de la campagne européenne sont à prendre au sérieux. Les partis d’extrême droite connus pour leur haine de l’étranger et de l’Arabe en particulier ont réussi à mettre la question de l’immigration au-devant de la scène. Le Front National de Marine Le Pen, en France, est allé encore plus loin. Relevé le 8 mai 2014, dans l’un des tracts en Ile-de-France, ce parti a utilisé le symbole de notre unité pour nourrir sa propagande. Il l’a porté à la vindicte populaire.
Ressemblant à celui de la Turquie par son croissant musulman, notre drapeau a orné l’affiche de campagne, ci-contre, de l’un de ses candidats. Les martyrs et ceux qui ont défendu le pays à travers les âges doivent s’émouvoir de cet amalgame. Aucune réaction des gouvernants. Cette ANC encore au pouvoir, malgré son absence de légitimité, avide pourtant de faux problèmes est passée à côté. Les partis politiques, eux-mêmes, ont des yeux mais ils n’ont rien vu, ils ont des oreilles mais ils n’ont rien entendu.
Le plus étrange, aucune protestation officielle n’a été signée de ceux qui veillent sur notre destinée. Pour certains, peut-être, ceux qui penchent du côté du drapeau turc, ils ne se sont pas inquiétés, outre mesure. Ils applaudissent aux victoires du Premier ministre turc, l’assurent de leur solidarité à toute épreuve et par conséquent la confusion des symboles n’offense pas leur sensibilité. Ils rêvent encore de notoriété alors que Bernard-Henri Levy fait le boulot de conciliateur en Libye à leur place. Il leur vole la vedette ! D’autres modulent leur pensée au gré des années, en épousant la conjoncture et en prêchant la conciliation avec l’Histoire. C’est tant mieux et le pays en prendra acte !
Malheureusement cette élection européenne n’a pas été suivie par nos médias à la mesure de son importance. Elle est passée inaperçue. Pourtant, même si elle a suscité peu d’enthousiasme chez les centaines de millions d’électeurs, la sortie de crise de l’Europe concerne directement notre pays.
Tout le monde doit avoir à l’esprit qu’une douloureuse décennie nous attend, qu’il faut s’y préparer en comptant sur nous-mêmes, mais également aussi sur l’Europe avec qui nos échanges demeurent vitaux (80% des exportations et 78% des importations). Lié à l’Europe, notre pays n’a pas été épargné par la crise. Il a été frappé de plein fouet par ses répercussions.
Quelques faits significatifs : La chute de production en Europe s’est répercutée négativement sur la demande dans notre pays ; la dégradation de l’emploi a affecté le comportement de leurs consommateurs ce qui s’est traduit par la diminution de nos exportations et par la réduction de nos recettes touristiques ; les flux des investissements étrangers (IDE) ont régressé à cause de cet environnement intérieur et extérieur instable ; même les transferts effectués à partir de l’Europe par nos concitoyens ont connu un repli… D’autant plus que notre pays n’est pas riche en ressources naturelles, excepté le phosphate qui représente 10% des exportations et près de 7,5% du PIB. Faute de dialogue et de Pacte social, les dégâts causés par l’arrêt de la production de cette mine a fait perdre la clientèle traditionnelle et diminuer des recettes essentielles pour le budget de l’Etat.
Après le séisme de ces élections et la déroute des partis en France au profit du Front National, il faut s’attendre à de nouvelles difficultés pour notre économie. Après le triomphe des europhobes, il faut tirer les leçons qui s’imposent. Les nationalistes arrivés au pouvoir vont être plus intransigeants vis-à-vis de l’étranger en général et du musulman en particulier. L’eldorado de nos jeunes va être soumis à plus de contrôle et plus de restrictions. L’espoir d’une aide pour la sortie de crise des pays du « Printemps arabe » demeure plus aléatoire que jamais !