Que le paysage audiovisuel ait connu une effervescence considérable au lendemain du 14 janvier est une chose mais que certains journalistes enfreignent la déontologie du métier en est une autre. Il semble que la vidéo, qui fait actuellement le buzz sur les réseaux sociaux, s’inscrive dans cette « logique ».
Rappel des faits : les internautes ont été désagréablement surpris de voir une vidéo, extraite du dernier épisode de l’émission « Kamikaz ellil » (Le kamikaze de la nuit), intitulée « Étudiantes tunisiennes. Que font-elles ? », sur la chaîne Youtube officielle de la chaîne privée d’Al-janoubia, dans laquelle l’animateur interpelle une jeune fille au port El Kantaoui à Sousse.
Cet animateur ne s’est pas contenté de poser des questions curieuses, d’ordre personnel voire intime, à la jeune fille, du genre « Que fais-tu au port à 23h du soir ? ! » et « Tes parents sont-ils au courant de ta présence ici à cette heure tardive de la nuit ? ». Il s’est même permis de la retenir par le bras pour l’obliger à répondre à ses questions.
Cerise sur le gâteau : l’indélicate cadreuse de la chaîne a tout fait pour montrer le visage de la fille mais sans succès.
Une vidéo qui révèle deux mentalités antinomiques
La vidéo en question renvoie l’image d’une société qui tâtonne entre une mentalité machiste et une mentalité moderne et tolérante, sans parler qu’elle met à nu un problème sérieux dans le secteur du journalisme, à savoir la déontologie foulée allègrement aux pieds par certains pseudo journalistes.
Cette vidéo, supprimée de la chaîne officielle Youtube, suite au tollé qu’elle a provoqué, a dévoilé deux manières de voir les choses chez les internautes : un groupe d’internautes a exprimé son admiration par rapport au comportement du journaliste « qui est en droit de montrer le comportement indécent de cette étudiante », estime un internaute sur son compte personnel Facebook allant jusqu’à l’injurier copieusement. Contrairement à un autre groupe qui s’est indigné de « la violation de la vie privée de l’étudiante, geste qui relève d’un machisme inouï et d’une mentalité rétrograde ».
Cependant, d’autres ont choisi de passer à l’action : leur colère ne s’est pas limitée aux commentaires et aux cercles de débats car ils ont déposé une plainte sur le site de la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA).
La loi bafouée…
La séquence en question dure deux minutes et pourtant elle montre une violation flagrante de la vie privée qui est pourtant protégée par la loi organique n° 2004-63 du 27 Juillet 2004 portant sur la protection des données à caractère personnel.
La base juridique pour lancer des poursuites judiciaires au pénal contre la chaîne et l’animateur existe, ce qui préfigure une suite à donner à cette affaire.
La convocation de l’animateur et du directeur de la chaîne serait-elle la suite logique de l’histoire ? N’est-ce pas une nouvelle occasion pour la HAICA de rappeler à l’ordre les journalistes qui travaillent dans les médias audiovisuels ?
Quoi qu’il en soit, intervenant sur les ondes de Shems Fm, Hichem Snoussi, membre de la HAICA, a insisté sur la nécessité de réagir avec célérité dans cette affaire. Raison pour laquelle Nouri Lajmi, président de la HAICA, a convoqué d’urgence le président de la chaîne et l’animateur en question pour leur accorder le droit de se défendre avant de proposer des sanctions à soumettre au conseil de la haute instance.