Tunis a abrité aujourd’hui 29 mai le Forum économique des chefs d’entreprise sur le thème : « Des synergies à bâtir au service de la croissance et de l’emploi « . Organisée par l’UTICA (Union Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat) et la CGEM (Confédération Générale des Entreprises du Maroc), cette manifestation a vu la participation de plus de 200 opérateurs économiques des deux pays. Ce forum intervient en marge de la visite officielle en Tunisie de Mohammed VI, Roi du Maroc.
Le forum vise à renforcer les relations entre les opérateurs économiques des deux pays, à présenter les points forts et les opportunités d’affaires et d’investissement offertes sur chaque marché et à explorer les pistes d’amélioration du commerce bilatéral entre les deux pays.
En effet, selon les dernières statistiques fournies par l’Office des Changes du Maroc, le volume global des échanges économiques entre les deux pays qui se chiffrait à 1,56 milliard de dirhams (1 dollar = 8 dirhams) en 2005, a plus que doublé pour atteindre en 2010 plus de 3,35 milliards de dirhams et 2,94 milliards de dirhams à fin novembre 2011.
Cependant, bien que les échanges commerciaux aient connu une croissance significative, ils restent encore en deçà des aspirations, comparés au niveau de leurs échanges respectifs avec l’Union Européenne.
A fin novembre 2011, la Tunisie, 3e partenaire commercial du Maroc, importe de ce pays principalement des biens d’équipement, des produits semi-confectionnés, pharmaceutiques et alimentaires. Elle exporte vers le Maroc essentiellement des dattes, des produits végétaux bruts, chimiques et des ouvrages en papier.
Ouvrant les travaux du forum, Mme Wided Bouchamaoui, présidente de l’UTICA, a déclaré que malgré l’évolution positive des échanges tuniso-marocains, les résultats enregistrés par la coopération bilatérale restent en deçà des potentialités réelles des deux pays. En effet, le volume des échanges commerciaux entre les deux pays ne représente que 1% du volume global de leurs échanges commerciaux (0,45% pour le Maroc et 1,1% pour la Tunisie).
Pourtant, les deux pays constituent ensemble une plateforme idéale pour la conquête d’autres marchés internationaux africains, arabes et européens grâce aux compétences et potentialités dont disposent les deux pays. Mme Bouchamaoui a aussi appelé au renforcement de la coopération et des échanges entre les deux centrales patronales.
Prenant à son tour la parole, Mme Miriem Ben Salah-Chaqroun, présidente de la CGEM, a déclaré qu’aussi bien le Maroc que la Tunisie ont démontré leur capacité à inscrire le libéralisme comme moteur de l’économie, la stabilité des prix via leurs caisses de compensation, leur code des investissements, leur tourisme dynamique.
Mais les choses ont changé, a ajouté Mme Chaqroun, tout comme les règles du jeu. En effet, fin 2011, l’économie tunisienne était au fond de l’abîme avec une croissance à – 2%.
Le 21e siècle démarre donc par une transition nécessaire et s’annonce plus complexe. La croissance tunisienne est redevenue positive en 2013 avec +2,6% puis des estimations de croissance de 3,8% en 2014 et 6% en 2017 selon le FMI. Le tissu économique tunisien a su résister, la Tunisie revient aux affaires, soutenue par la coopération internationale, mais comme pour toutes les économies mondiales les difficultés s’accumulent, la concurrence se corse, la compensation n’est plus une solution, la compétitivité et la productivité sont des objectifs incontournables.
Abordant les relations bilatérales, l’intervenante a déclaré que nous ne profitons pas assez des synergies possibles entre nos deux pays. Le Maroc est le 36e fournisseur et le 12e client de la Tunisie qui est le 35e client du Maroc et son 31e fournisseur.
La première réponse est de travailler ensemble sur l’interdépendance économique entre nos deux pays. Et pour cela, des notions telles que les licences d’importation, les quotas ou les barrières non-tarifaires doivent disparaître et nos échanges s’intensifier.
En conclusion, Mme Ben Chaqroun a ajouté que nous sommes devenus des sociétés de consommation où la dette finance les achats de produits finis de consommation au détriment de l’investissement productif.
Lui succédant, Kamel Ben Naceur, ministre de l’Industrie, de l’Energie et des Mines a déclaré que nous devons nous fixer comme objectif « le X10 » c’est-à-dire multiplier par dix le volume de nos échanges et remplacer la notion d’économie concurrente par la notion de la co-compétition, comme l’ont fait beaucoup de pays asiatiques aux économies concurrentes, en collaborant pour être plus compétitifs.
Cet objectif ne peut être atteint qu’à travers des réformes sur le plan institutionnel, administratif et en regardant plus loin vers les marchés arabe, asiatique et européen, en adoptant des stratégies communes aux deux pays.
Pour sa part, Moulay Hafidh Alaoui, ministre de l’Industrie et du Commerce du Maroc, a déclaré que le contexte régional et mondial plein de défis impose aux deux pays la création de synergies pour tirer profit des potentialités et des complémentarités des deux pays, pour créer et gérer la croissance, lutter contre le chômage et installer une dynamique de confiance.
Recommandations du Forum économique Tunisie – Maroc
– L’élargissement du champ d’application de reconnaissance des normes aux produits pharmaceutiques et aux produits agro-alimentaires;
– La facilitation à l’accès à l’information pertinente destinée aux opérateurs économiques tunisiens et marocains, à travers la création d’un site web commun entre les deux patronats;
– Le développement de la coopération entre les fédérations sectorielles de l’UTICA et de la CGEM;
– La multiplication des missions de prospection et de rencontres sectorielles B to B;
– La réduction du coût de la logistique (transport maritime et aérien);
– La réduction des coûts financiers des opérations commerciales entre les deux pays;
– La création d’un comité de développement des échanges de produits et services à haute valeur ajoutée entre les deux pays;
– L’élaboration d’un guide commun des procédures d’importation et d’exportation;
– La reconnaissance mutuelle des opérateurs agréés/catégorisés auprès des instances douanières des deux pays;
– La création d’une banque de données sur les opportunités des projets d’investissement dans les deux pays;
– La réalisation d’une étude sur les complémentarités des échanges commerciaux et d’investissement, sous l’égide du Conseil d’affaires tuniso-marocain, avec l’implication des instances publiques des deux pays;
– La création d’un fonds commun pour financer le développement du commerce et de l’investissement entre les deux pays et dans les pays tiers;
– La participation regroupée conduite par les fédérations sectorielles à des salons professionnels.