Avec l’arrivée de la fin du mois de juin, la Bourse de Tunis tourne, quasi définitivement, la page des résultats 2013 et des réunions annuelles des actionnaires. Bien évidemment, les entités publiques ne sont pas concernées par cela et sont, comme toujours, à la traîne en matière de communication financière. Loin de chercher à évaluer les performances financières des sociétés de la cote, nous allons nous intéresser au déroulement des assemblées générales des sociétés émettrices, souvent tendues. Certes, la liberté d’expression est l’acquis le plus important des Tunisiens depuis la révolution, mais parfois certains actionnaires dérapent et abusent, comme c’était le cas dans l’AGO de SITS. Globalement, les revendications sont les mêmes, et tournent autour de quatre points.
Il y a d’abord le droit d’avoir un représentant des actionnaires minoritaires au sein des Conseils d’administration des émetteurs. Actuellement, c’est le cas dans la majorité des sociétés de la cote. Depuis deux ans, les sociétés nouvellement introduites s’engagent dans le prospectus d’introduction à réserver un siège aux minoritaires. Mais le problème est que ces derniers ne se contentent pas d’un seul siège, mais exigent un nombre équivalent au pourcentage du capital qu’ils détiennent. De plus, les élections en elles-mêmes sont souvent accompagnées de contestations. Les sociétés créent parfois des barrières à l’entrée en mettant des conditions d’éligibilité très strictes et les actionnaires de référence ne respectent pas la plupart du temps les règles du jeu en participant au vote, faisant de la sorte basculer les résultats vers une personne bien déterminée d’avance. Parfois, il n’y a même pas d’élections mais la proposition directe d’une personnalité par le Conseil d’administration au poste d’administrateur. A notre avis, les demandes des petits porteurs sont légitimes. La société tunisienne qui s’introduit en Bourse ne change généralement pas de mode de gouvernance. En d’autres termes, elle accepte l’argent du public, mais ne le traite pas sur un pied d’égalité que les actionnaires de contrôle.
Autre question classique de revendication : les rémunérations des dirigeants et les avantages en nature qui leur sont attribués. Les minoritaires sont souvent « choqués » par les sommes perçues par les managers. Il est vrai que les actionnaires ne tiennent pas compte, dans ce jugement, des compétences et des qualifications de chaque dirigeant dans son évaluation, mais nous pensons qu’il convient d’informer les actionnaires de la relation spécifique entre la rémunération et les résultats de l’entreprise. Dans le même sillage, même les jetons de présence sont remis en cause, surtout si l’absence de certains administrateurs n’a pas été remarquée lors de l’assemblée.
Un troisième centre de conflit concerne le dividende. Les petits porteurs ne s’inscrivent généralement pas dans une logique d’investissement à long terme. Très peu d’entre eux gardent un titre pour des années. Avec la dégradation des conditions du marché, la possibilité de liquider sa position au cours de l’année avec une plus-value intéressante est devenue une mission quasi-impossible pour la majorité des valeurs. Le dividende a donc une importance primordiale puisqu’il s’agit, provisoirement, du seul moyen de rémunération. Mais dans le contexte actuel dominé par l’instabilité et l’incertitude, les sociétés sont logiquement plus réticentes à distribuer leurs bénéfices et préfèrent garder un matelas de sécurité. Ces réserves qui s’accumulent d’une année à l’autre irritent les petits porteurs qui considèrent qu’ils ont droit à cet argent. Ici, nous sommes de l’avis des sociétés. Les réserves font partie des fonds propres qui sont le garant de la continuité de l’activité d’une entité économique. Opter pour une distribution généreuse signifie que ce filet de sécurité va s’effriter et les ratios financiers vont se détériorer. Nous soutenons donc une politique de distribution prudente, mais qui progresse en ligne avec les performances de la société.
Enfin, la plupart des sociétés n’ont jamais publié de plan d’affaires ou organisé de communications financières depuis leur introduction en Bourse. Ainsi, les petits porteurs ne trouvent aucun moyen pour juger les performances de la société ou pour évaluer le travail de l’équipe dirigeante. Un régime efficace de gouvernance d’entreprise doit garantir la diffusion, en temps opportun, d’informations exactes sur tous les sujets significatifs concernant l’entreprise, notamment la situation financière et les résultats. La revendication d’une stratégie de communication financière et non financière par les petits porteurs nous semble légitime, et constitue un droit basique pour tout investisseur.
Toutes ces questions resteront à l’ordre du jour de chaque réunion des actionnaires tant que les habitudes des uns et des autres n’auront pas changé. Les actionnaires de référence doivent accepter le fait que la société n’est plus leur propriété exclusive, et les minoritaires doivent comprendre qu’il faut juger un manager selon ses performances et que l’investissement en Bourse nécessite de la patience. Entre-temps, nous allons continuer à assister à de tristes spectacles dans les assemblées générales.
Actualité
ESSOUKNA, attribution d’actions gratuites
A partir du 1er juillet 2014, 1 443 000 actions nouvelles gratuites ESSOUKNA, à attribuer à raison de deux (02) actions nouvelles pour cinq (05) actions anciennes, seront admises et négociables en Bourse séparément des actions anciennes.