Certains signes ne trompent pas : passion et innovation sont parfois indissociables de la qualité d’un manager. Visionnaire, Ines Djelassi, une jeune tunisienne installée à Londres, passionnée et motivée a éveillé en nous la passion à la technologie.
Ines Djelassi a fait plusieurs expériences et elle en est sortie à chaque fois gagnante.
Elle vient récemment de lancer Lodgeo, le premier comparateur de prix qui permet aux utilisateurs de réserver l’hôtel de leur choix au prix le moins cher, sans être redirigé vers un autre site . Cette redirection, pratiquée par la majorité des sites comparateurs, force l’utilisateur à se réadapter à un nouvel environnement, mais surtout compromet le prix et la disponibilité initialement annoncés.
Lodgeo enlève cette friction au moment de la réservation et donc améliore l’expérience utilisateur, tout en garantissant le prix le moins cher.
Lodgeo est une application native également accessible sur le web; une idée très avantageuse pour les utilisateurs, les hôteliers et les professionnels du tourisme.
Ines Djelassi, une vraie success-story a rendu visite aux locaux de l’Economiste Maghrébin pour parler de cette innovation, revenir sur son parcours professionnel et expliquer à nos lecteurs le principe de fonctionnement de Lodgeo. Entretien.
L’Economiste Maghrébin : Vous êtes en visite en Tunisie. C’est l’occasion de faire le point sur votre carrière et sur votre vie professionnelle. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
I.Djelassi : Après avoir eu mon diplôme, j’ai choisi d’affronter la réalité de la vie professionnelle et d’aller sur le terrain pour savoir comment gérer une entreprise du point de vue d’un hôtelier. A l’âge de 18 ans, j’ai commencé ma première expérience chez le groupe Accor, Novotel, Ibis et Sofitel où j’ai beaucoup appris.
Après cette expérience, je suis allée à Paris, où j’ai géré un hôtel indépendant de 40 chambres, au cœur de St Germain des prés. C’était une expérience fantastique parce que j’ai débuté avec l’arrivée des agences de voyage online. Avant cela, il y avait comme en Tunisie des réseaux traditionnels et des tour-opérateurs.
Un an plus tard, les sites de réservation sur Internet commençaient à émerger. On devait à l’époque s’adapter aux innovations pour faire de l’e-management. En deux ans, on a pu réaliser un taux d’occupation de 100% grâce aux agences online qui nous permettaient de travailler en temps réel et donc d’être plus réactif face à la demande et à la disponibilité.
Ensuite, je suis allée à Londres pour intégrer un groupe saoudien et gérer l’un de leurs hôtels, en imposant une stratégie purement online qui était très innovante à l’époque. On utilisaient ces canaux de distribution online pour commercialiser notre hôtel partout dans le monde et cibler une clientèle internationale. La première année nous sommes ainsi passés d’un taux d’occupation de 55% à 105%.
Pour garder le sens des affaires, la question centrale était pour moi : « Pourquoi ne pas ouvrir ma propre start-up pour donner des conseils aux hôteliers indépendants pour pouvoir gérer leurs stocks sur le Net ? »
L’enjeu était d’offrir aux professionnels du tourisme la possibilité de positionner leur produit à l’échelle internationale et de gérer leur établissement de la même manière que les chaines de renom, sans engendrer les mêmes dépenses. Pour cela, je me suis mise à faire du revenue management en focalisant essentiellement sur les canaux de distribution online ‘ OTA’ ( ONLINE TRAVEL AGENTS)
Âgée de 24 ans, j’ai ouvert ma première entreprise (Hôtel solutions directe) que j’ai gérée toute seule. Six mois plus tard, j’ai commencé à grignoter des parts de marché. J’ai démarché 30 hôtels. A la fin de la première année, j’ai pu, avec deux autres employés, démarcher et gérer directement 50 hôtels.
J’ai pu, dès la première année, réaliser un très bon chiffre d’affaires laissant un profit d’environ 45%. C’est une aventure qui a duré presque 11 ans. Pendant cette période, j’ai essayé de connecter mon pays en aidant les hôteliers tunisiens à vendre leurs chambres d’hôtels à travers les réseaux de distribution online, parce qu’en basse saison les TO ne peuvent rien faire. J’ai pu convaincre ainsi certaines des plus grosses agences online d’ouvrir la page Tunisie. Ils m’ont demandé au départ de leur amener au moins une centaine d’hôtels pour ouvrir cette fameuse page. Aujourd’hui, la Tunisie est une destination importante pour ces géants de la réservation par Internet.
Le grand handicap pour un jeune promoteur comme vous et les PME est toujours les sources de financement. D’où et comment avez-vous eu les fonds nécessaires ?
Il est très important de penser aux sources de financement dès le départ de son projet. J’ai négocié avec les hôtels pour m’accorder 10% après chaque vente. C’était un modèle d’affaires win-win. C’est pourquoi, les hôteliers ont adoré cette idée. On a travaillé jour et nuit pour augmenter notre chiffre d’affaires. Aujourd’hui, la réservation en ligne représente sur certaines destinations plus de 70% du chiffre d’affaires de certains hôtels. On a essayé d’innover en lançant de nouvelles offres pour nos clients, essayant constamment de comprendre leur problématique et essayer de les résoudre.
En général, un jeune promoteur résidant à l’étranger, entre autres questions qu’il se pose, finit par se demander : suis-je capable de lancer un projet dans mon pays ? Avez-vous songé à créer un projet en Tunisie après toute cette expérience en la matière ?
Pendant cette aventure fantastique, j’ai essayé, en 2005, d’automatiser tout le processus de gestion de mon entreprise car je travaillais sur Excel. Je me suis dis que la Tunisie avait beaucoup de potentiel. Je suis donc venue en Tunisie pour recruter des ingénieurs tunisiens pour développer tout notre système. Ça m’a coûté environ 30 000 euros. L’absence de « project management » et la maîtrise de la langue anglaise étaient les vrais problèmes des ingénieurs tunisiens. Mais je suis revenue quelques années plus tard et cette fois-ci nous avons ouvert, avec ma sœur, Wahida Djelassi, Web Solutions direct, un data centre qui employait a peu près une centaine de personnes, dont une quinzaine d’ingénieurs.
Vous avez aussi une autre expérience en Asie…
Oui. Après mon premier échec en Tunisie, j’ai décidé de confier mon projet à l’Inde. Nous avions ainsi une équipe composée de 30 personnes. J’ai lancé une plateforme assez innovatrice. C’est une centrale de réservation qui permettait aux hôtels et aux agences de voyage d’interagir en temps réel quant à la disponibilité, tarifs et contenu des hôtels, mais également de faire la facturation en temps réel, pour améliorer les cash flows des hôtels. Nous avons ensuite lancé un outil qui permettait aux hôteliers de savoir à quel prix était leur chambre à n’importe quel moment, en prenant en compte une multitude de facteurs. (emplacement, saisonnalité, taux d’occupation, demande…).
Vous êtes installée à Londres, la ville qui héberge l’industrie de la finance. Cet avantage ne vous a pas aidé à nouer de nouveaux partenariats ?
Oui. On a pu, grâce à notre technologie et à notre expertise en la matière, séduire un fonds d’investissement qui avait déjà racheté une entreprise en Grande-Bretagne et avait développé un système de gestion d’hôtels (enregistrement des clients, gestion des chambres…).
Ce fonds d’investissement a voulu unifier son système avec le nôtre, afin d’offrir une solution complète aux hôtels. Intéressé par la technologie et le monde des voyages, ce fonds d’investissement a racheté mon entreprise.
Mais le rachat de votre entreprise par ce fonds d’investissement n’a-t-il pas mis fin à vos rêves ?
Non. Six mois plus tard, je me suis rendue compte que je devais bâtir une autre carrière et faire autre chose complètement différente dans le B2C, tout en profitant de mon expertise B2B dans le tourisme et la technologie. A partir de 2012, j’ai décidé d’entamer une nouvelle expérience dans le mobile. J’ai commencé à explorer ce secteur en plein essor qui encore une fois m’a poussé à vouloir trouver une solution à un problème : Comment garantir le prix le moins cher à un utilisateur mobile.
Le mobile est un outil important pour le consommateur. Il veut être sûr que le prix auquel il achète sa chambre d’hôtel est bien le moins cher. Mon idée a donc était de créer un comparateur de tarif pour hôtel qui garantit le prix le moins élevé grâce à une technologie unique.
On a conçu Lodgeo, une nouvelle application révolutionnaire qui permet aux consommateurs de : chercher, comparer, et réserver!
C’est une application simple et flexible à utiliser, à télécharger sans avoir à s’enregistrer au départ. C’est la première application mobile qui permet à son utilisateur de réserver et non pas d’être renvoyé vers un autre site de voyage.
Où réside l’intérêt de Lodgeo concrètement pour un touriste ?
Pas besoin de se déplacer ou consulter tous les sites des agences de voyage. Lodgeo permet de capter et localiser tous les hôtels situés autour du consommateur. L’application affiche, en toute transparence, le prix de la nuitée pratiqué par les sites de réservation en ligne d’un même hôtel. L’application ne force pas le client à choisir entre différents hôtels. Elle donne juste l’information sur le produit. Lodgeo permet de donner au consommateur une idée sur l’emplacement de l’hôtel. Une fois que le client a choisi l’hôtel où il veut réserver, Lodgeo lui permet de le faire sans quitter son environnement. L’application permet aussi au client de réserver et payer en toute sécurité par le biais de sa carte de crédit soit manuellement ou en scannant sa carte de crédit. L’utilisateur peux également choisir de prépayer ou de payer à l’hôtel.
Ce service est complètement gratuit pour le consommateur, Lodgeo se rémunère avec ses sites partenaires à chaque fois qu’il y a une réservation.
Avez-vous un message à l’adresse des hôteliers et autorités tunisiennes ?
Nous allons bientôt lancé lodgeo en Tunisie et espérons ainsi pouvoir aider les hôteliers tunisiens à s’ouvrir à un nouveau canal de distribution : le mobile ; très interessant car les coûts de distribution sont 3 à 5 fois moins chers qu’à travers les réseaux classiques.
Nous allons également permettre à la clientèle locale, de s’offrir des weekend ou séjours en Tunisie en réservant à travers Lodgeo !
Nous lançons un programme de référencement très bientôt qui permettra aux utilisateurs tunisiens de gagner 10 dinars à chaque fois qu’il recommande Lodgeo à quelqu’un ; ce qui veut dire qu’un utilisateur pourrait bénéficier d’un séjour gratuit s’il recommande Lodgeo à suffisamment d’utilisateurs. Nous comptons sur le gouvernement pour nous appuyer et nous aider à rendre la Tunisie MOBILE !