Mustapha Kamel Nabli, l’ex-gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) se présente à ces élections en tant que personnalité indépendante. Il est notamment soutenu par le Front National du Salut. Une équipe de soutien de la candidature de Nabli vient également de se constituer. Elle s’est donné pour première mission de récolter les 10 mille signatures de parrainage.
Une première réunion du comité de soutien de la candidature de Mustapha Kamel Nabli s’est tenue le 1er septembre 2014 dans un hôtel de la capitale. Y ont pris part des hommes d’affaires, des représentants de mouvances politiques, notamment d’El Massar et de l’UPT, ainsi que des dissidents du parti Al Jomhouri, à l’instar de Slaheddine Zahaf. L’occasion pour nous de revenir plus longuement sur la carrière et les ambitions de cette économiste au tempérament calme mais au parler vrai, vite et juste.
Une carrière fulgurante
Né le 10 février 1948 à Téboulba, Mustapha Kamel Nabli est un économiste de renom. Il est titulaire d’une maîtrise et d’un master en sciences économiques, ainsi que d’un PhD en science économique de l’Université de Californie. Il est également diplômé de l’École nationale d’administration. Maître assistant, puis professeur agrégé en économie à partir de 1980, il a assumé plusieurs responsabilités au sein de l’université tunisienne. Il a publié plusieurs ouvrages et articles scientifiques. Il a par ailleurs été nommé expert auprès de plusieurs institutions, dont notamment la Communauté économique européenne et la Ligue arabe. Il a en outre dirigé la section Moyen-Orient – Afrique du Nord au sein de la Banque mondiale.
De 1988 à 1990, il préside la Bourse de Tunis. Il est par la suite affecté au poste de ministre du Plan et du Développement régional en 1990.
Retour au bercail après la révolution
Le retour au pays de Mustapha Kamel Nabli s’est fait dans des conditions particulières. Mohamed Ghannouchi, alors Premier ministre, a fait appel à lui, juste après l’avènement de la révolution tunisienne, afin de prendre les rênes de l’institut d’émission monétaire. Alors qu’il était en poste à la Banque mondiale, Nabli a répondu favorablement à cette sollicitation, estimant que c’était un devoir national qu’on ne peut refuser. Il a ainsi piloté la BCT au cours d’une période cruciale et pleine d’incertitudes. Sous les gouvernements successifs de Ghannouchi, Caïd Essebsi et Jebali, il a à maintes reprises rappelé les impératifs de stabilité économique et budgétaire, ainsi que la nécessité de maintenir l’inflation à un niveau acceptable.
Nabli voulait, de ce fait, affirmer le principe d’indépendance de la Banque Centrale par rapport au pouvoir exécutif. L’institut d’émission monétaire doit en effet jouer pleinement son rôle de contrôle et de régulation, indépendamment des manœuvres politiques. Mais son franc-parler n’était pas du goût de tout le monde. Il s’est retrouvé au centre de tractations politiques entre le chef de Gouvernement de l’époque, Hamadi Jebali, et le président de la République, Moncef Marzouki. Ce dernier n’avait pas apprécié que l’extradition de Mahmoudi Baghdadi aux autorités libyennes se fasse à son insu. Afin d’affirmer son autorité, Moncef Marzouki avait alors décidé, en juin 2012, de limoger Mustapha Kamel Nabli, sans raison valable. Et alors qu’il savait que son sort était scellé, Nabli s’est exprimé, une dernière fois, à l’Assemblée Nationale Constituante, dans une allocution qui aura marqué les esprits. « La question est purement politique et la décision était prise de longue date, pour mettre un grappin partisan sur le système financier et le contrôle des banques », dira-t-il devant les députés. Ironie du sort, Mustapaha Kamel Nabli obtiendra la même année le prix de « Meilleur Gouverneur de Banque Centrale d’Afrique ».
Son projet pour la Tunisie
Fort de son expérience, aussi bien sur le plan national qu’international, Mustapha Kamel Nabli estime désormais qu’il a l’étoffe d’un présidentiable. Il a pour ambition de s’attaquer aux grands chantiers économiques, dont la dépréciation continue du Dinar tunisien. D’après Nabli, cette dépréciation est la conséquence directe et logique de la détérioration de la productivité, de la compétitivité, du commerce extérieur, de l’inflation et des équilibres financiers. Il faut bien comprendre que la perte de vitesse de la monnaie nationale est la conséquence inévitable de cette détérioration. Toute tentative de renverser artificiellement cette tendance sans en traiter les causes profondes est vouée à l’échec.
L’ex-gouverneur de la BCT fait remarquer, par ailleurs, que le sauvetage de l’économie tunisienne passe inéluctablement par le rétablissement de la confiance et par l’amélioration de l’environnement des affaires et des conditions de travail dans les entreprises et l’administration. Il préconise ainsi un plan complet de sauvetage de l’économie permettant de reconstruire cette confiance, en y intégrant le volet sécuritaire.