Un médicaments préventif contre le Sida pourrait bientôt être commercialisé dans les mois à venir en Europe. Cet antirétroviral, vendu sous le nom Truvada®, aurait la capacité de réduire de 80% le risque de transmission du virus. Une bonne nouvelle pour ceux qui voudraient s’attaquer à la maladie par la voie de la prévention.
Conçu par le laboratoire américain Gilead Sciences, et déjà commercialisé aux Etats Unis, il a été testé dans le cadre d’un essai clinique mené en 2012 par l’ANRS (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales) sur 400 personnes homosexuelles. L’essai se distingue des autres déjà réalisés car c’est uniquement au moment de l’exposition aux risques que cet antirétroviral est supposé agir, une sorte de prévention « à la demande ». En effet, pour les 400 volontaires répartis sur plusieurs hôpitaux français et canadiens les comprimés fournis par le laboratoire Gilead ont été pris quelques heures avant le rapport sexuel, puis de nouveau le lendemain.
Dans cette étude en double aveugle ( qui signifie que ni les participants ni les médecins ne connaissent le traitement) les participants sont répartis par tirage au sort dans deux groupes : l’un reçoit du Truvada®, l’autre un placebo. Une méthode qui a suscité des réactions virulentes compte tenu du fait qu’elle n’est pas dénuée de risque de transmission pour le groupe test auquel est administré le placebo. Les résultats sont pourtant encourageants : l’antirétroviral en question réduit à 80 % le risque de contamination.
Selon le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS : « C’est une avancée majeure dans la lutte contre le VIH. Les résultats devraient faire évoluer les recommandations nationales et internationales en matière de prévention contre le VIH ».
L’utilisation d’antirétroviraux pour prévenir l’apparition de la maladie du sida est un axe de recherche bien établi. En effet, plusieurs essais cliniques portant sur la prévention avant l’exposition ( PrEP : prophylaxie pré-exposition) ont été menés auparavant. En effet, une première étude IPREX qui repose sur la prise de deux antirétroviraux ( Ténofovir et Emtricitabine : Truvada®), avait montré pour le groupe qui a testé les deux médicaments, un taux d’efficacité de 42 % pour la prévention de la maladie. Le deuxième essai PROUD mené au Royaume-Uni, reposant uniquement sur le Truvada® en prise quotidienne, montre une capacité « hautement protectrice contre le VIH », sans que les auteurs fournissent de données précises.
Les résultats complets de l’essai menés par l’ANRS devraient être disponibles début 2015. L’essai devrait se poursuivre durant au moins un an, de manière à déterminer l’efficacité à long terme du médicament, et d’en apprécier la tolérance. Des effets secondaires ont été d’ailleurs décrits, dont certains graves, nocifs aux reins et aux os.
Le Pr Jean-Michel Molina coordinateur de l’essai a affirmé: « Le concept de prophylaxie biomédicale au moment de l’exposition au risque d’infection par le VIH, dans un cadre d’offre élargie de prévention, est validé. Nous le devons à tous les volontaires de l’étude sans qui nous n’aurions jamais pu le démontrer».
« L’efficacité observée ne doit néanmoins pas faire oublier que le préservatif reste la pierre angulaire de la prévention. C’est en additionnant tous les outils de prévention qui auront fait leur preuve que nous serons en mesure de contrôler efficacement l’épidémie du VIH/Sida », conclut-il.
Quel que soit le moyen de prévention utilisé, la vigilance reste de mise, car aucun d’entre eux, en effet, n’assure une protection à 100%.