Consacrant le bipartisme entre Nidaa Tounes et Ennadha et écartant les partis tiers, les élections législatives ont, d’une certaine façon, anticipé le scrutin présidentiel. Elles ont, en tout cas, révélé les positions du peuple tunisien. Craignant un remake du match du 26 octobre, certains partis de la famille démocrate tentent de se rassembler, dans le cadre de leurs préparatifs des élections présidentielles. Ils émettent le projet de constituer une troisième voie, rassemblant Al Joumhouri, Ettakatol, le CPR et l’Alliance démocratique, en vue bien entendu de contrer le candidat de Nidaa Tounes. L’effet Béji Caïd Essebsi aurait assuré, par la stratégie du « vote utile« , en sa faveur, un monopole au sein de l’électorat libéral, pouvant constituer une alternative au parti Ennahdha. Il a ainsi considérablement réduit l’espace de ceux qui pouvaient prétendre occuper ce créneau.
Les partis Al Joumhouri et l’Alliance démocratique, ne peuvent cependant faire valoir leur appartenance exclusive à la famille démocrate. Ils faisaient partie du Front du Salut, avec Al Massar et Nidaa Tounes et ont engagé, avec ceux la campagne du départ, durant l’été 2013. Ils se sont posés ensemble en alternative à la Troïka. D’autre part Ettakatol et le CPR étaient les alliés d’Ennahdha et par conséquent les piliers de la Troïka. Dans le cadre de leur éventuelle formation d’une troisième voie, ils se sont bien gardés de mettre en avant la proximité avec Ennahdha. Or, ces partis souhaitaient le choix de leurs leaders comme candidats présidentiels de « consensus », qui seraient choisis par Ennahdha, estimant ainsi qu’elle départagera les candidats aux prochaines élections. Leurs concertations actuelles avec le parti Ennahdha, non candidat à l’élection présidentielle, attestent qu’ils estiment qu’il est, bel et bien, l’arbitre du prochain scrutin. Le positionnement du CPR et d’Ettakatol et le repositionnement actuel d’Al Joumhouri et de l’Alliance démocratique donnent à penser qu’ils laissent, pour le moment, leur indépendance aux vestiaires.
Notons cependant que ce pari est loin d’être gagné, vu le faible score de tous ces partis, lors des élections législatives. Pouvaient-ils demander aux citoyens la révision de leurs positions, pour la circonstance. Ils les invitent à remettre en cause le choix des urnes, qui exprime une prise de position conséquente et non un acte capricieux de conjoncture. Or, l’heureux élu doit, d’après les lois de la Palisse, incarner le renouveau, par son parcours, ses idées et ses alliés. Ce sont les termes du processus démocratique.