L’ISIE vient d’annoncer les résultats préliminaires du premier tour de la présidentielle qui ont clairement dégagé deux candidats pour le second tour. S’ouvre alors la fenêtre du temps pour recueillir recours et autres réserves. Il est du devoir de l’instance de traiter tous les recours convenablement et dans la légalité. Ceci dit, vu la clarté des résultats du premier tour, on voit mal quelle incidence ces recours peuvent avoir.
Le calendrier initial de l’ISIE est flottant. Il aurait permis au second tour de se dérouler plus d’un mois après le premier tour. Cela aurait été probablement un des marathons électoraux les plus astreignants. En tout, cela aurait engendré 3 mois de joutes électorales, qui ont commencé avec les Législatives. Trois mois de tensions politiques et sociales, de léthargie économique, d’instabilité et de risques sécuritaires exacerbés.
Ce sacrifice est le prix à payer pour que le pays sorte de la période de transition, tourne la page de l’instabilité des trois dernières années et consolide sa démocratie. L’ISIE aura, somme toute, fourni un effort louable et remarquable. Malgré les légers dépassements, malgré les « bourdes » lors des enregistrements des Tunisiens à l’étranger et malgré un va-et-vient juridique sur diverses questions d’accès à l’information, cette instance technique et de facto indépendante aura néanmoins réussi sa mission, celle de mener deux rendez-vous électoraux historiques en 6 mois.
Il lui reste cependant une chance pour passer du qualificatif « assez bien » à celui de « très bien ». Cette chance, elle pourra la saisir après analyse du contexte actuel, en se basant sur les faits et sur sa mission de servir les citoyens et non les candidats. Or, ce qui sert le citoyen en ce moment, c’est de trancher au plus vite sur l’avenir du pays. On aura passé le temps nécessaire pour écouter les discours politiques et politisés, revoir le bilan des candidats, scruter leurs réalisations jusqu’aux moindres détails. Jouer aux prolongations pénibles ne servira pas le pays et l’exposera, au contraire, à des dangers qui pourront compromettre le formidable parcours qu’il a accompli.
L’ISIE est confrontée aujourd’hui à une occasion unique pour prouver sa technicité et son indépendance. Le second tour est légalement et logistiquement réalisable dans les deux semaines, on ne devrait pas avoir une date au-delà du 14 décembre, quoique la date du 7 décembre soit préférable. Il y a urgence pour enclencher le processus post électoral : formation des nouvelles équipes exécutives, passation de pouvoir,… et pour envoyer surtout un signal fort à nos partenaires et investisseurs que la Tunisie fonctionne et fonctionne vite.
Aujourd’hui, aller vite n’est pas un luxe, mais une nécessité, car le jeu de montre nourri de technicités juridiques émanant de textes eux-mêmes provisoires ne sert pas l’esprit de la révolution politique que la Tunisie est en train de vivre. Organiser le second tour pendant les vacances scolaires est une blague de mauvais goût, surtout pour nos citoyens inscrits à l’étranger et qui sont au nombre de 500 000. Ceux-là, souvent habitués à rentrer au bercail ou à partir dans d’autres contrées, ne pourront pas changer de bureau de vote et seront donc exclus. Les citoyens résidents sur le sol national voudront aussi en finir avec cet exercice et reprendre une vie normale, rattraper le retard économique et tourner la page d’une période, certes nécessaire, mais douloureuse. En organisant le second tour dans les deux semaines à venir, l’ISIE sortira techniquement indépendante et surtout grandie.