A quoi cela sert-il, au président Moncef Marzouki, de faire appel des décisions du Tribunal administratif concernant les recours déposés par la direction de sa campagne électorale ?
Parallèlement à cela, à quoi cela peut-il servir à Adnène Mansar, directeur de la campagne de Moncef Marzouki, de critiquer aussi ardemment le Tribunal administratif, en soutenant notamment que le verdict du Tribunal « n’était qu’un simple point de vue » ? Avant de préciser que si cette institution « travaillait toutes ses affaires avec la même célérité, la Tunisie aurait été classée première mondialement pour la rapidité du traitement de ses affaires administratives ».
Cela n’est-il pas de nature à envenimer davantage le climat qui précède le second tour de la présidentielle ? Peut-on penser que ce nouveau recours peut porter des fruits? Qui croirait également, par exemple, que les juges de cette institution vont beaucoup apprécier la critique du directeur de campagne du chef de l’Etat qui se trouve être aussi un universitaire? La réaction de l’Union des Juges Administratifs qui a jugé les propos d’Adnène Mansar d’ « irresponsables et de dangereux » en dit long sur les relations entre les acteurs de cette institution et le directeur de campagne du président de la République.
Évidemment aussi bien le président Marzouki que son directeur de campagne ont le droit d’agir et de dire et de penser ce qu’ils veulent. Mais en quoi cela va-t-il les faire avancer d’un iota? Pense-t-on un instant que la décision du président Marzouki va renverser la vapeur, en le plaçant devant son adversaire ou en éliminant ce dernier du jeu, en mettant un autre candidat à sa place ? Y a-t-il en fait une possibilité que le Tribunal administratif vienne nous dire que Moncef Marzouki disputera la présidence avec un autre candidat au deuxième tour ?
Inutile de préciser que rien ne peut advenir de la sorte. Etonnants donc ces comportements qui dénotent peut-être une volonté de refuser d’une manière quasi absolue le verdict du Tribunal administratif qui a été, même au temps de la dictature, impartial et qui s’est distingué par certains arrêts qui contredisaient des décisions à caractère même politique de l’administration d’alors. L’exemple d’une juge du Tribunal administratif, en octobre 2007, qui a mis fin à la suspension d’une enseignante dans une école secondaire pour son insistance à porter le voile au travail est là pour le prouver.
On s’interroge dans la rue encore sur les réelles motivations des intéressés. Souhaitent-ils s’accrocher au pouvoir coûte que coûte? Souhaitent-ils retarder l’échéance du second tour pour le 28 décembre, afin de « priver » le candidat d’en face d’une partie de son électorat jugé peut-être « petit bourgeois » et qui n’aura pas ce jour-là, à la veille de fêtes de fin d’année, pour ainsi dire, la tête à ça?
On se perd en conjectures. Ne sachant pas si tout cela n’est pas en définitive contre-productif. Dans la mesure où les réactions citées plus haut pourraient produire l’effet inverse, à savoir mobiliser davantage les électeurs du camp d’en face.