La Tunisie vient d’échouer à placer un des siens à la tête d’une organisation régionale : l’Union des radiodiffuseurs des Etats Arabes ( ASBU ). Pourtant, comme en décembre 2012, pour le cas de l’ALECSO, le poste devait échoir à un Tunisien. Et jamais deux sans trois : cet échec fait suite à celui essuyé, en décembre 2013, au niveau de l’OCI.
C’est pour ainsi dire l’histoire d’un échec annoncé. Tout le monde savait dans le cercle des radiodiffuseurs arabes que le candidat de la Tunisie au poste de Directeur Général de l’ ASBU n’avait que peu de chances d’être élu.
Et les prévisions des uns et des autres se sont confirmées, le 9 décembre 2014, lorsque les délégués des radios et télévisions arabes, réunis dans le cadre de l’Assemblée générale de cette union, à Koweït-city, sont passés au vote. Rachid Khechana a obtenu seulement quatre voix face à son concurrent soudanais Abderahim Souleyman (sept voix), du reste directeur du département technique de l’ ASBU, organisation qu’il a intégrée en 1981.
Pourquoi? Trois raisons expliquent au moins cet échec. Car le poste échoit d’habitude à un Tunisien: la Tunisie est le pays qui accueille cette institution de la Ligue des États arabes.
La Tunisie a présenté son candidat assez tard
Premièrement, une certaine inefficacité de la diplomatie tunisienne qui n’est pas à son premier camouflet depuis la révolution du 14 janvier 2011. Souvenez-vous la Tunisie a échoué, en décembre 2012, sur l’autel de l’ALECSO (Organisation arabe de l’éducation, de la culture et de la science). Les délégués arabes avaient préféré le Koweïtien Abdallah Hamad Mouharab à Abdelatif Abid, ancien ministre de l’Education du gouvernement de la Troïka. Là aussi le poste devait échoir à un Tunisien. Le sortant était Mohamed Aziz Ben Achour. Qui a remplacé, à son tour, le Tunisien Mongi Bousnina.
Triste décidément ce mois de décembre. Puisqu’en décembre 2013, le candidat de la Tunisie, Abdallah Triki, alors secrétaire d’Etat aux Affaires arabes et africaines, n’est pas choisi pour le poste de secrétaire général adjoint de l’OCI (Organisation de la conférence islamique), qui se réunissait, en Guinée Conakry, dans le cadre de sa 40ème conférence.
La diplomatie tunisienne, qui a été ces dernières années traversée par des crises internes, n’avait-elle pas fait correctement son travail de lobbying ? Certains le pensent. Et donnent pour preuve le fait que la Tunisie a présenté assez tard- en avril 2014- la candidature de Rachid Khechana. Les autres pays ayant présenté des candidats (la Jordanie, le Soudan et le Yémen) bien plus tôt : en 2013. Et entamé un travail en vue de mobiliser l’adhésion des pays arabes autour de leur candidat.
Un candidat qui ne sort pas du « sérail »
Deuxièmement, nombre de pays arabes n’ont pas montré beaucoup d’entrain dans le soutien à un candidat tunisien. Cela serait-il en rapport avec cette image d’une Tunisie berceau de ce Printemps arabe, événement qui n’est pas aujourd’hui toujours en odeur de sainteté dans des contrées arabes ? Ne craigne-t-on pas que ce candidat vienne développer des thématiques comme la télévision publique et la bonne gouvernance ? Des thématiques que tout le monde approuve en public, mais ne défend pas, du moins avec la même âpreté, en coulisses.
Troisièmement, le candidat lui-même. On s’accorde à dire que la Tunisie n’a pas fait le bon choix. Fallait-il choisir un candidat qui ne sort pas du « sérail » : le club des radiodiffuseurs publics arabes ? Qui plus est n’a jamais, contrairement à ces prédécesseurs tunisiens, Abderraouf Basti, Abdelhafidh Herguem et Slaheddine Maoui, dirigé un média audiovisuel.
Le fait que Rachid Khechana ait travaillé à la chaîne qatarie Al Jazeera a-t-il joué contre lui ? On sait là aussi que cette chaîne n’est pas en odeur de sainteté dans des capitales arabes. Le comportement de celle-ci est pour beaucoup dans la crise entre le Qatar, d’une part, et l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et le Bahreïn notamment, d’autre part ; une crise à l’heure de laquelle a vécu le Conseil de coopération du Golfe une bonne partie de l’année en cours.