La campagne électorale, lors du 2em tour des élections présidentielles a été marquée par un affrontement verbal, l’expression d’états d’âme, transgressant la présentation des programmes. Le Président provisoire de la république inscrit son combat, dans « la lutte entre révolutionnaires et contre-révolutionnaires », s’attribuant bien entendu le beau rôle. Peu-on faire valoir la crainte d’un retour du despotisme ? Ce scénario est exclu, vu l’habilitation citoyenne, consacrée par la révolution. Mais le discours de la peur peut être pertinent, pour disqualifier l’adversaire. Par ailleurs, le Président provisoire affirme que « sans falsification, le candidat Béji Caïd Essebsi ne gagnera pas au scrutin présidentiel ». Prenons la juste mesure de cette auto-confiance de popularité !
Le président provisoire de la république, apparut, lors du premier tour des élections présidentielles, comme le candidat de substitution d’Ennahdha, qui n’a pas présenté de candidat. Le climat de coopération parlementaire, entre les deux grands partis, lors de la journée fondatrice du 4 décembre, suscite une prise de distance du parti islamiste. Sans appeler à voter Béji Caïd Essebsi, elle peut plutôt encourager l’abstention. L’examen de la situation montre une volonté d’Ennahdha de ne pas soutenir le président sortant. Un vote favorable risquerait de l’ériger en grand acteur, à ses dépens et avec son électorat. D’autre part, elle souhaiterait que Béji Caïd Essebsi ne bénéficie pas d’un score élevé.
Béji Caïd Essebsi se présente comme l’homme du rassemblement. Il cultive son image du sage. Chez le président provisoire, la frontière est parfois tenue entre la combattivité et la surenchère. Les rencontres de Caïd Essebsi avec la jeunesse (9 décembre) et sa visite de la Zaouia Chadliya, où il a été reçu, en guest star (10 décembre), attestent qu’il est davantage dans une logique d’écoute. Pour les partisans de l’Etat civil et de la modernité, il incarne la valeur refuge, face à la crainte de l’établissement de la théocratie. Pour une partie des Tunisiens, « Caïd Essebsi rassure, quand Marzouki inquiète ».
Retour de la conscience, après plusieurs jours de tractations, le Front populaire appelle ses électeurs à participer massivement au deuxième tour et les exhorte à « barrer la route au candidat Moncef Marzouki à cause de son discours de division » (décision du 11 décembre). Mais son soutien à Caïd Essebsi reste ambigüe : Le Front populaire « posera ses conditions dans le cas d’un soutien au candidat Béji Caïd Essebsi ». Il semble ainsi conditionner son soutien à la nature des relations Nida Tounes/Ennahdha. Sans donner carte blanche à Caïd Essebsi, le Front écarte, sans ménagement, la candidature de son concurrent. Dans ces conditions, vu « la neutralité » du parti Ennahdha et du soutien de fait du Front Populaire, la victoire de Béji Caïd Essebsi semble assurée.
Tunisie – Présidentielle : les positionnements du second tour
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