A l’annonce des résultats des Législatives, la Bourse de Tunis a repris des couleurs, après une interminable cure d’amaigrissement. Deux mois plus tard, au cours de la semaine qui précéda les élections présidentielles, il y eut le même rebond des valeurs boursières. Les estimations des instituts de sondage donnaient déjà Béji Caïd Essebsi vainqueur. Moralité : la Bourse avait déjà anticipé l’alternance tant attendue. Le pays, opérateurs économiques en tête, y ont vu la lumière du bout du tunnel. La Bourse a salué l’ultime étape de la transition politique par une hausse des cours, bridés jusque-là autant par les faibles performances des entreprises cotées que par l’absence de visibilité politique. Il y avait peu de raisons et de motifs d’agir et d’investir pour sortir l’économie de son marasme et de cette vague dépressive.
La croissance était atone et ne répondait plus aux injonctions sans grande conviction des politiques. Tout concourait à inhiber toute velléité de reprise.
On en veut pour preuves, les tensions et incertitudes politiques, le déferlement des revendications sociales, la persistance du terrorisme et de l’insécurité, le recul de l’Etat – et la propagation des zones de non-droit -, le désenchantement des citoyens-consommateurs et la lassitude des chefs d’entreprise. la Bourse n’est que le reflet, le baromètre de l’état de santé des entreprises qui tiennent le haut du pavé du marché boursier. Autant dire celles parmi les plus représentatives du tissu productif national. Quand la Bourse est en berne à cause du reflux des cours, c’est la preuve que nos entreprises battent en retraite, en mal de croissance et aux prises avec de réelles difficultés financières.
Fin décembre 2014, l’espoir renaît à la veille du Nouvel an 2015. Le pays a clos avec succès le chapitre incertain et problématique de la transition politique.
La voie est désormais libre de toutes entraves politiques ou psychologiques. L’économie tunisienne, qui a disparu des radars des politiques pendant plus de deux ans, non sans de graves dégâts, est de nouveau au cœur du débat public, à la grande satisfaction des chefs d’entreprise. Le nouvel exécutif – président de la République et gouvernement en préparation – en prend déjà l’engagement avec force conviction.
Les entreprises, des plus grandes aux plus petites, doivent dès lors se mettre en ordre de marche. Celles qui ont accusé un quelconque repli – voir le classement des groupes et des entreprises -, comme celles qui ont surfé sur la vague de la demande locale, boostée par plus d’un million de Libyens qui y ont élu domicile.
Ici comme ailleurs, les résultats sont assez contrastés. L’agroalimentaire et la grande distribution s’en sortent plutôt bien, à l’inverse d’autres secteurs, en dépit de l’érosion du pouvoir d’achat des ménages.
Les entreprises à vocation industrielle, exportatrices notamment, portent les séquelles à la fois du choc interne et de la récession de la zone Euro, notre principal partenaire à l’échange extérieur. Quant aux entreprises publiques qui, il n’y a pas si longtemps encore, trônaient au sommet du classement – Groupe chimique en tête -, elles présentent de réels signes de craquement. Le volume d’activités, quand il n’est pas en recul, ne rend pas vraiment compte de la dégradation de leurs états financiers.
Sauront-elles, à l’instar de toutes nos entreprises, profiter de la nouvelle donne, de la décrispation et de l’apaisement annoncés, dont on perçoit déjà les premiers signes, pour faire le ménage, retrouver la nécessaire agilité et les capacités d’adaptation pour aller de l’avant ? On est fondé de le croire. Le retour de l’Etat républicain répand un fort sentiment de confiance et dope le moral du patronat.
Autant dire que le frémissement boursier a de quoi nous remplir d’espoir. D’expérience, on sait, en effet, que les marchés se trompent rarement. Il est des signaux qui ne trompent pas. Cela pourrait signifier que nos entreprises y voient déjà plus clair, plus loin et plus fort. Parions qu’on en verra la trace dans le prochain classement.