En Tunisie, la situation de l’économie est dans toutes les têtes, mais chacun l’explique à sa façon. Encore des grèves, aucun secteur n’y échappe. Une atmosphère d’attentisme règne depuis des semaines en Tunisie. En parallèle, trois grèves dans trois secteurs principaux . Une première grève dans le bassin minier qui paralyse depuis longtemps l’exportation du phosphate, la première richesse du pays. Une deuxième grève non annoncée et décidée par les agents de transport du secteur public et une troisième grève qui a touché quasiment toutes les familles tunisiennes, la grève des enseignants du secondaire. Les revendications des auteurs de ces trois grèves sont essentiellement financières.
La grève, entamée par les agents de Transtu durant quatre journées consécutives, a coûté à l’Etat la somme de 560 mille dinars. Selon le ministre de l’Industrie, la Tunisie a perdu environ 0,7% de son PIB à cause de la poursuite des grèves et du blocage de la production dans le secteur du phosphate et des mines. Entre 2011 et 2013, les grèves observées dans cette activité ont causé une perte d’environ 3.5% du PIB du pays, soit environ trois milliards de dinars, un montant équivalent à la moitié du crédit accordé par le FMI à la Tunisie !
La grève qui entrave l’exportation des produits miniers ne peut que contribuer à l’aggravation du déficit commercial qui, à fin novembre 2014, a dépassé 12,5 milliards de dinars, sous l’effet de l’accroissement continu des déficits de la balance énergétique et de la balance alimentaire.
En supposant que la moyenne du salaire mensuel d’un enseignant du secondaire est de 800 dinars/mois, le coût de deux jours de grève annoncée par les enseignants sera assurément un chiffre astronomique.
L’économie est en panne et elle est laissée à elle-même. Cela ne pourra conduire qu’à une situation sociale et économique catastrophique et enfoncer le clou dans un corps déjà malade. Il ne faut pas s’attendre à une relance économique. Ces trois grèves sont mortelles. Si cette situation dure plus longtemps, les prochaines années seront pénibles et à haut risque. Les grévistes, le gouvernement, les partis politiques et les syndicalistes sont-ils conscients du danger que pourraient représenter ces vagues de grèves ?
Malgré l’organisation des élections, élection de nouveaux députés et élection d’un Président de la république, les tensions et les revendications sociales n’ont pas cessées. Pour le moment, aucun signe n’indique que l’apaisement marquera les prochains jours. D’autres grèves sont prévues. L’UGTT, le plus grand syndicat du pays, insiste sur la finalisation des négociations sociales et les majorations salariales dans le secteur public et la fonction publique. Notons que la loi de finances 2015 prévoit des rémunérations publiques aux alentours de 50% du budget de l’Etat pour l’année en cours.
« La situation économique en Tunisie est très alarmante et le gouvernement doit informer le peuple sur les ressources réelles du pays et l’étendue de son endettement», c’est ainsi que Wided Bouchamoui, la présidente de la centrale patronale s’est exprimée quant à la situation économique du pays. « Face au blocage des activités de production de phosphate et du Groupe chimique et à la situation catastrophique au port de Radès, on est en droit de nous interroger sur le rôle de l’Etat», a souligné Mme Bouchamaoui.
Tout cela nous mène à la question fondamentale : qu’attendons-nous pour parvenir à une solution et affronter les dangers ?
L’économie tunisienne aurait peut-être une chance unique devant elle. Selon les économistes, la chute des prix du pétrole pourrait redonner de l’air aux pays importateurs. Pour un pays comme le nôtre, où le déficit de la balance énergétique se multiplie depuis l’an 2000, et où l’économie dépend largement de l’importation des énergies fossiles, cette chute offre d’importantes marges de manœuvre budgétaire.