Une frange d’individus, suffisamment bien organisés et introduits dans les médias, appellent de tous leurs vœux à la formation d’un gouvernement d’Union nationale. Pourquoi un tel empressement ? D’ailleurs, que signifie Union nationale ? Le peule tunisien ne s’est-il pas déjà prononcé ? Par leur vote les Tunisiens n’avaient-ils pas exprimé leur choix, leur préférence ?
Nidaa Tounes ne dispose certes que d’une majorité relative mais d’autres formations, du même bord politico-idéologique, avaient décroché des sièges au sein de la nouvelle Assemblée. Ces partis ne peuvent-ils pas former une coalition gouvernementale, à l’instar de nombreuses démocraties occidentales ?
Notre paysage politique se caractérise aujourd’hui par une bipolarisation imparfaite (sur ce point voir notre contribution in l’Economiste Maghrébin du mois de juin) qui donne une prime au courant de Taïeb Baccouche ! Pourquoi alors ce parti ne constituerait-il pas un gouvernement ? En France, le parti socialiste n’a-t-il pas, à maintes reprises, constitué des coalitions avec ses alliés naturels ? D’ailleurs, lors des législatives de juin 2012, il a fallu moins d’une semaine à Jean-Marc Ayrault pour constituer son équipe ; une équipe plurielle !
Pourquoi certains dirigeants de Nidaa Tounes cherchent-ils à former un gouvernement d’Union nationale ? Y a-t-il eu des accords ex ante entre Rached Ghannouchi et Béji Caïd Essebsi dont nous ignorons la substance ? Ceci n’est-il pas antidémocratique ? Pis, de tels accords ne vont-ils pas à l’encontre de la volonté du peuple ? Par un tel procédé, les élections ne perdent-elles pas tout leur sens, leur raison d’être? Franchement, ne pensez-vous pas que Nidaa Tounes doive prendre ses responsabilités face à ses électeurs?
» Union nationale « ,… » Union nationale », en ce moment il n’y a que cette expression dans la bouche des dirigeants d’Ennahdha, pourquoi donc ? Ce parti avait-il constitué un gouvernement d’Union nationale en 2011? Pourquoi cherche-t-il aujourd’hui à imposer son point de vue ? Et les autres partis ne devraient-ils pas prendre leurs responsabilités historiques et assumer leur rôle de leaders? De même pour les laïcs, ne devraient-ils pas se rassembler autour d’un gouvernement pour imposer un projet de société moderne et moderniste?
La compétition politique n’impose-t-elle pas l’alternance du pouvoir ? Un gouvernement d’Union nationale ne risque-t-il pas de brouiller les cartes et les courants politiques ? Les électeurs qui avaient voté contre Ennahdha vont-il être satisfaits ? Une telle manière de concevoir la politique n’est-elle pas frustrante pour la grande majorité des Tunisiens qui avaient exprimé clairement leur vote et qui avaient rejeté massivement le candidat non déclaré d’Ennahdha, Moncef Marzouki ?
Pour finir, nous soutenons le fait que chacun prenne ses responsabilités et assume son rôle historique ! Le risque de tomber dans la poubelle de l’Histoire est pour beaucoup de partis réel !