Longtemps décriée et critiquée, l’administration tunisienne hérite malheureusement d’un sarcasme de lourdeur et de bureaucratie, vieux de plusieurs décennies. La mission paraît compliquée surtout lorsque l’administration revendique un héritage à solutionner par des lois alors que la loi est souvent l’initiative des politiciens et les politiciens s’en remettent aux urgences sécuritaires et autres problèmes inflationnistes etc.
Par ailleurs, sur un plan macroéconomique lié au développement régional on peut évoquer des blocages procéduraux et fonciers qui font que l’administration ne permet pas la promotion d’affaires dans différentes zones aménagées à même d’accueillir des industries et des services.
Sur d’autres plans, la crise de confiance entre le citoyen et l’administration est souvent à l’origine de tous les maux. En effet, à chaque fois qu’un citoyen, peu honnête, procède à un dépassement, l’administration finit par créer des nouveaux boucliers sanctionnant tous ceux qui se trouveront dans la même situation.
Des solutions concrètes
La solution viendrait d’une avancée sur le plan technologique et logistique, à savoir l’accès commun aux systèmes d’information des administrations en dépassant le fonctionnaire en front-office qui est souvent relégué à un rôle d’intermédiaire entre ce système et le citoyen.
L’exemple de la déclaration fiscale en ligne est réellement un bon exercice du genre. Cette solution a fait assouplir la pression sur les recettes des finances et a permis une meilleure liberté d’action au contribuable. Ainsi, on économise le coût du déplacement, le salaire du fonctionnaire, la pression sur les locaux administratifs, l’embouteillage, le temps perdu…D’autres solutions sont envisageables moyennant peu de moyens.
Il est, en effet, facile d’imaginer que l’administration du Registre de commerce donne le moyen au citoyen d’éditer sur internet un simple document identitaire ‘RC’ moyennant un droit de timbre électronique en forme de code à barres payable à distance comme une simple facture de télécommunication.
On peut proposer aussi de voir la légalisation de la signature réduite aux actes juridiques les plus importants ou encore voir accélérer la procédure en évitant le millier de tampons utilisés par le fonctionnaire et le temps qu’il perd à lire un document qui ne le concerne pas, se payant carrément le luxe de commenter, d’interdire ou même de refuser une volonté subjective et personnelle.
Il est aussi très simple de disposer d’une attestation de la situation fiscale sans devoir subir l’humiliation répétée des absences d’un fonctionnaire ou les heures à attendre la signature du chef du bureau de contrôle des impôts alors que c’est le système qui constate l’existence ou non d’un défaut éventuel de déclaration et donc du droit à l’attestation.
Une réforme fiscale urgente
Il s’agit sans doute d’une bonne transition pour hurler l’envie d’en finir avec un système fiscal caduque, compliqué et dépassé ou la doctrine administrative et les décrets d’application règnent en maîtres de la défiguration et de la déviation de l’esprit des lois votées.
La reforme de ce système peut être simple, possible, rapide et efficace sans trop dépenser et ce en commençant par balayer d’une seule main tous les impôts et taxes TFP, TCL ,FOPROLOS, droit de timbre, FOPRODEC… et de rajouter en contrepartie un point à la TVA.
Un tel changement, rapide, ouvrira la voie vers l’assouplissement des procédures administratives. En effet, le poids fiscal des procédures est facile à dompter en évitant toutes les exceptions, exonérations et suspensions qui engendrent des procédures administratives et fiscales décourageantes (Attestations, Bons de commande, CD…).
Il serait aussi simple d’accepter le résultat comptable au niveau du calcul de l’impôt sur les sociétés, sans empiètement fiscal. Cette simple manœuvre nous évitera la tonne de dispositions légales désormais incompréhensibles, notamment le fameux article 48 du code de l’IRPP et IS.
D’un autre côté, il est tout aussi urgent de renforcer le contrôle de l’administration fiscale en transférant l’acte de légalisation des signatures des acquisitions immobilières au niveau de la recette des finances. Ceci permettra le recoupement rapide et systématique du revenu déclaré par rapport à la valeur d’acquisition. Personne ne peut ignorer que l’origine principale de l’évasion fiscale se concentre sur l’immobilier où on accepte volontiers de ne pas enregistrer le bien acquis par peur du recoupement fiscal.
Le rôle négatif des banques
Les banques et la poste aussi ont malheureusement les même réflexes que l’environnement administratif et qui par excès de prudence alourdissent encore plus le processus d’investissement. Il est pratiquement possible de créer une entreprise en 48 heures mais le déblocage du compte indisponible prendra une semaine parce que la banque exige encore et à tort une copie conforme de la patente ou impose à l’attente de la publication au JORT sans se contenter de la facture de dépôt.
Ces institutions financières, qui prêtent déjà à des taux pharaoniques comparé à d’autres économies développées, devraient s’ouvrir davantage au monde et à l’évolution du siècle. Il suffit de demander comment peut-on disposer d’un paiement en ligne pour un banal site « e-commerce » et vous comprendrez !
Une belle initiative aux oubliettes
Des efforts ont été déployés par l’administration elle-même qui a essayé un certain temps de substituer les agréments par un cahier des charges, mais ce dernier est devenu malheureusement un document en plus à fournir. Le poids des réflexes de l’administration contrôleuse n’est pas simple à alléger.
Il faut rappeler qu’une commission a été créée en 2010 au niveau du Premier ministère et qui a imaginé un système révolutionnaire de création d’entreprises appelé « un seul document, une seule procédure ». Ce système unifie et rassemble toutes les immatriculations administratives (Fiscale, CNSS, Registre de commerce, code en douane…) dans un document unique et permet à l’administrable de ne plus faire le tour des administrations. Ce fichier est actualisé systématiquement lors des créations et modifications statutaires aux différentes administrations, jadis non informées de ces changements.
Enfin, le fonctionnaire disposera d’un canal de reporting permettant d’informer les différentes structures concernées de remédier à certaines situation de blocage. On peut imaginer aussi un observatoire sur internet permettant au citoyen de reporter ces cas pour les éviter à l’avenir.