Ce qui vient de se passer chez nos amis marocains à travers les derniers résultats des régionales et des communales, va sans doute faire réfléchir plus d’un, plus du côté de l’état-major d’Ennahdha que de celui de Nidaa Tounes et ce, dans la perspective des prochaines municipales qui, si tout va bien, auront lieu en décembre, c’est-à-dire dans trois mois ou presque.
En dépit des apparences, les deux locomotives du pouvoir ont toutes les raisons de craindre un rendez-vous qui constituera sans doute une étape majeure du processus de décentralisation, tel que prévu par la nouvelle Constitution. Et ce ne sont pas les déclarations tonitruantes des uns et des autres qui vont masquer une inquiétude bien réelle. Particulièrement chez Rached Ghannouchi, qui doit certainement rêver d’un scénario à la PJD, le Parti de la justice et du développement de son alter ego, l’actuel chef du gouvernement marocain, l’islamiste Benkirane, qui lui, ne rêve pas, puisque les résultats du scrutin ont confirmé l’implantation durable de sa formation dans le paysage politique et le tissu social du pays.
Mais le contexte est différent, le passif des deux hommes aussi ; et puis, n’est pas le PJD marocain qui veut. Dans nos murs, les contentieux sont tels, le désamour avec la classe politique accusée de nullité est tel, que côté électeurs, on est prêt à tout, à renverser la table s’il le faut. C’est sûr, on ne se contentera plus de simples campagnes citoyennes. Tout cela pour dire, que dans un vécu local aussi explosif et dans un environnement régional qui l’est tout autant, il ne faudrait pas que certaines affaires, certains dossiers, soient entourés d’un halo de mystères, car cela ne fera qu’entamer davantage la confiance entre classe dirigeante et citoyens et entretenir la suspicion générale.
Je pense que près de cinq ans après une révolution qui tient encore le monde en haleine parce qu’elle n’est pas encore finie, et en dépit de tout ce qu’on a pu dire à son propos, il n’est plus possible de continuer à maintenir le voile sur certaines opacités. Je trouve regrettable et préjudiciable, cette persistance du désenchantement ambiant, et détestables, cette absence de cohésion nationale et ce fossé qui continue de séparer jeunes et aînés. Je trouve tout aussi affligeante cette tiédeur de ces mêmes jeunes vis-à-vis du sentiment national. Pourtant, ce sont en grande partie eux qui ont fait cette révolution !
On peut espérer que la seconde réunion du Quintet convoquée pour les besoins de la cause, permettra de dégager une vue toujours obstruée. Que dans ce contexte, le parti Hizb Ettahrir, dont on peut attendre pour des raisons objectives qu’il soit dissous, soit empêché de tenir un séminaire à Sfax, est une bonne chose, quoiqu’on puisse dire. Un pas dans la bonne direction, qui cache mal une autre réalité qui rappelle un autre temps, et qu’on aimerait voir disparaitre, à savoir la nomination des gouverneurs et des délégués régionaux directement par le pouvoir. Il faudrait au plus vite rompre avec cette pratique du passé, si on veut que la démocratie participative ait vraiment un sens et ne soit pas un simple slogan.