Qui sommes-nous ? Que sommes-nous devenus ? Et que voulons-nous au juste ? Les voyagistes tunisiens réunis hier à Hammamet lors d’une assemblée générale exceptionnelle n’ont pas pu s’empêcher de poser ce genre de questions, au regard de la gravité de la situation à laquelle font face actuellement les agences de voyages en Tunisie. Plusieurs autres interrogations étaient aussi inévitables autour d’un débat marqué par une sorte de mea-culpa de la part des opérateurs invités pour discuter le pourquoi de la non-application des décisions de soutien pourtant annoncées officiellement par le ministère de tutelle au lendemain de l’attentat de Sousse.
Pour Mohamed Ali Toumi, président de la Fédération tunisienne des agences de voyages (FTAV), le constat est amer : « Que de promesses ! Les mesures prises par le gouvernement au profit du secteur du tourisme après l’attentat meurtrier à Sousse sont inefficaces et n’ont rien ajouté au secteur dont nous représentons un acteur majeur. Au contraire, la situations des opérateurs s’est dégradée davantage », dit-il.
Comment les voyagistes tunisiens vont-ils sauver la situation ? Quelle stratégie de relance vont-il adopter ?
Ravagés et asphyxiés par une situation financière difficile dont ils assument une partie de la responsabilité, les voyagistes tunisiens sont malades des mesures prises au profit du secteur. Pour eux, ces mesures sont essentiellement destinées aux hôteliers au détriment des agences de voyages.
« Notre survie est menacée. Nous vivons la plus grande catastrophe. Nous ne sommes pas aujourd’hui une destination touristique. Ce n’est plus le temps des discours, il est urgent de passer à l’action. Il faut des solutions immédiates », a reconnu Ahmed Bettaïeb, directeur d’une agence de voyages au Cap-Bon.
L’assemblée d’Hammamet était une formidable opportunité pour renforcer la solidarité, si sacrifice il y a, entre les opérateurs, appeler le gouvernement à venir en aide aux professionnels et tenter d’améliorer leur métier et dissiper certaines craintes et inquiétudes.
Rude concurrence avec les hôteliers, des opérateurs privés étrangers et sociétés de services, mauvaise qualité d’accueil, manque de civisme, augmentation des charges, manque de formation des agents, manque de vision pour les prochaines années, manque de sécurité et de confiance, absence de volonté politique pour aider les opérateurs, manque de maîtrise des langues étrangères, augmentation de l’endettement envers les sociétés de leasing…tels sont ou presque les principaux maux soulevés hier par les voyagistes tunisiens.
Que faire alors ?
« Sécurité, sécurité, sécurité… Le terrorisme ne devrait pas passer. Si nous ne serons pas plus vigilants, il y aura d’autres attentats », a hurlé dans la salle M. Mathlouthi qui a appelé les présents à plus d’union et de solidarité et à la nécessité de créer des tour-opérateurs tunisiens à l’étranger et un fonds de solidarité financé notamment par les opérateurs eux-mêmes.
« Nous sommes marginalisés. Il est temps de mettre la clef sous le paillasson », propose Moncef Chetoui, « Entrons en désobéissance civile », revendique un autre voyagiste ou « organiser une opération escargot pour attirer l’attention des autorités », a demandé M. Bettaïeb.
Ce n’est pas suffisant pensent les autres : « Osons nous regarder dans le miroir et interrogeons-nous sur les causes de notre déclin », a appelé Mme Sihem Zaïem.
Changer de métier ou changer le métier
Avant de décider d’une opération escargot le 8 octobre prochain, les opérateurs n’ont pas raté l’occasion pour appeler à la nécessité d’évaluer et moderniser immédiatement les agences de voyages.
Pour remonter la pente, les opérateurs n’ont de choix que d’aller vers le numérique, intensifier leur présence sur le Net, développer d’autres services et arrêter de rêver parce que s’ils ne changeront pas leur manière de travailler et d’envisager l’avenir, ils vont tous disparaître. Révolution technologique oblige.