C’est une business woman accomplie. Elle est vice-présidente de la Commission et du Pôle International du MEDEF depuis 2014 et récemment élue présidente des Femmes de l’Economie : il s’agit de Marie-Christine Oghly qui est également Chevalier de l’Ordre National du Mérite et Chevalier de l’Ordre National de la Légion d’Honneur. Rencontrée lors de la réunion du Comité Mondial des Femmes Chefs d’Entreprise (FCEM ), qui se tient à Tunis du 28 au 31 octobre 2015, elle fait le point de l’état des lieux entre les enjeux et les défis des femmes entrepreneures.
leconomistemaghrebin.com : Quels sont les défis que vous avez dû relever?
Marie-Christine Oghly : L’association des femmes chefs d’entreprises existe depuis 1945, et notre but est de promouvoir la place des femmes dans le monde économique. Même aujourd’hui, nous n’avons pas trouvé dans tous les pays, y compris la France, toute notre place. Si je prends l’exemple du Medef, les femmes sont vice-présidentes, les hommes sont présidents, mais il y a encore beaucoup de choses à faire pour que les femmes puissent s’imposer dans le monde économique.
Selon vous, quelle est la solution?
En France, nous avons mis en place un système de quotas des femmes représentées dans le conseil d’administration, malheureusement nous étions obligés de passer par là sinon je dirais d’une manière spontanée, ce n’est pas parce que les hommes ne veulent pas de femmes, c’est parce que de vieux pouvoirs veulent conserver le pouvoir. Donc, à nous de faire notre place, en essayant de passer à côté des hommes.
Est-il vrai que les femmes généralement ont cette peur de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale?
Les femmes ont tendance à ne pas s’investir dans cet environnement, elle s’interroge alors que l’homme ne se pose pas la question, il se lance et il avance. Il faut qu’on apprenne et qu’on parle avec les femmes et leur dire vous avez tout à fait le profil pour répondre à ces postes, surtout il ne faut pas hésiter à se lancer. C’est sûr, c’est encore un challenge. Cela dit, même si les hommes s’investissent, ce sont les femmes qui s’occupent des enfants, gèrent la maison et font trois jobs en un, et c’est là l’un des problèmes, mais je pense que l’étape la plus importante c’est au niveau culturel et également psychologique. D’un autre côté, une femme va se sentir coupable parce que tous les soirs elle n’arrive pas tôt à la maison pour s’occuper des enfants.
Que faut-il faire, d’après vous ?
Il faut privilégier la qualité des relations avec les enfants avant la quantité d’heures passées devant la télévision. Il faut au niveau culturel travailler avec les femmes mais aussi avec les hommes pour leur faire comprendre à eux aussi qu’à la maison ils doivent mettre la main à la pâte car ce n’est pas forcément réservé qu’aux femmes et qu’ils doivent également permettre aux femmes de s’épanouir professionnellement.
Que pensez-vous de la femme entrepreneure tunisienne?
Ce que j’ai cru comprendre au niveau du gouvernement tunisien, c’est qu’ils veulent passer à l’ étape supérieure au niveau de l’artisanat, bien que les femmes aient énormément travaillé durant cette période transitoire démocratique. Elles se sont battues pour conserver leurs droits. Et ces droits, il faut vraiment les amplifier et continuer. Les femmes sont les précurseurs en Tunisie, au niveau de l’égalité homme-femme. Si on prend l’exemple de la contraception, les femmes tunisiennes l’ont eue avant les femmes françaises. Donc, il y a des domaines dès le départ où elles ont été le moteur. Dans le monde économique, c’est la même chose, par exemple Wided qui est présidente de l’Utica, fait partie du Quartet du Prix Nobel de la Paix, c’est extraordinaire, il y a très peu de femmes qui arrivent à ce niveau, vous êtes exemplaires, mais ça reste un challenge. Je crois que quoique l’on fasse on va continuer pendant des décennies à se battre.
Quelle est votre devise en tant que chef d’entreprise?
C’est la devise de notre association, “Seules, nous sommes invisibles, ensemble, nous sommes invincibles”.