« La réforme du marché des changes : quel apport pour l’entreprise tunisienne? », tel était le thème de la conférence annuelle organisée, aujourd’hui, par Amen Bank.
Dans ce cadre, son président du directoire, Ahmed El Karm, a livré un bilan de la conjoncture internationale et nationale, indiquant que durant les prochaines années, l’économie mondiale sera basée sur l’une des deux thèses, « soit on ne va plus vivre dans un concept quantitatif avec une stagnation séculaire qui mène à une croissance molle et atone, et par conséquent, on devrait revoir la manière de calculer la croissance mondiale. Autrement dit, opter pour l’approche qualitative et non plus quantitative; soit vivre une période forte pleine de promesses axée sur quatre secteurs fondamentaux, à savoir la nanotechnologie, la biotechnologie, l’informatique (robotisation) et l’industrie, d’où une destruction totale d’un passé pour voir la naissance d’une autre manière d’économie et du monde moderne ».
A cet égard, plusieurs questions se posent: ces mutations sont-elles palpables et réelles? Vont-elles développer d’autres activités? Est-ce qu’on va passer par une période de croissance relativement faible? Faudrait-il s’attendre à une période de décélération?
Pour clarifier la situation, M. El Karm a affirmé qu’au niveau des indicateurs économiques, on s’attend probablement à une augmentation du taux de change du dollar américain, une inflation de 2% et le plein d’emploi, contre une croissance faible en Europe, malgré un frémissement total affiché en France et en Espagne. Ce qui pousse la Banque Centrale Européenne à injecter de l’argent sur le marché permettant de changer la situation et accompagner l’économie nationale, pour atteindre un taux d’inflation de 2%, en attendant la sortie de la crise et de la situation de faiblesse du taux de change de l’euro dans les années à venir.
« Cette situation pourrait nous amener vers une parité dollar-euro en 2017, bien après le vécu d’une conjoncture en stagnation, avec un dollar fort face à un euro faible », a-t-il précisé.
Au plan national, Ahmed El Karm a souligné que la Tunisie passe actuellement par une crise qui se manifeste à travers deux éléments de risques majeurs, à savoir le terrorisme porteur d’insécurité et l’absence de stabilité économique. Le deuxième élément de risque consiste dans la non-performance de l’économie tunisienne, avec une croissance presque nulle (0 à 0,5%) et une balance des paiements en déséquilibre majeur, à cause de la crise qui a affecté le secteur touristique.
Face à cette situation critique, l’hésitation des investisseurs est compréhensible mais il faudrait briser cette spirale néfaste. Pour ce faire, le responsable a affirmé qu’il faut rétablir urgemment la croissance, en optant pour des réformes laborieuses à mettre en place. « Mais on entend parler de ce processus de réformes depuis cinq ans sans les voir se concrétiser. Cela exige des actions urgentes axées sur des amnisties. Il s’agit de l’amnistie économique englobant l’amnistie de change, la sécurité des hommes d’affaires, l’augmentation de la liquidité et l’élaboration d’un budget d’Etat sans recours à la dette ou aux emprunts…
Il s’agit, également, de l’amnistie fiscale qui englobe une réforme approfondie basée sur l’équité fiscale, la lutte contre l’évasion fiscale, le développement du contrôle fiscal, l’intégration progressive du secteur informel dans le formel; ainsi que l’amnistie sociale qui passe par le développement de la sécurité sociale via la revue du cadre réglementaire et autres…
Mesures réglementaires attendues
Revenant sur les réalisations d’Amen Bank au niveau du renforcement du rôle de teneur du marché, il a noté que ladite banque a opté pour des actions agressives développées, soit en matière d’efficacité énergétique, via le lancement de la première ligne de financement de l’ordre de 30 millions de dollars, soit en matière d’exportation à travers la deuxième ligne signée de 15 millions de dollars et la troisième ligne de 35 millions d’euros qui sera signée courant cette semaine avec la BEI visant l’impulsion des investissements.
Dans le même sillage, Amen Bank offre plusieurs solutions au profit des entreprises tunisiennes, et ce, en répondant, selon Hatem Zaara, directeur exécutif – chef de la trésorerie et des marchés de capitaux, à deux contraintes du marché telles que la liquidité et le risque de change sur le dinar, en mettant en place des crédits immédiats sur les comptes des opérateurs (export) avec la suppression de délais d’attente de 48 heures, en minimisant le risque avec une évaluation du coût partagée entre le teneur et la banque, et en garantissant un contrat de change à terme toujours viable….
Mais pour garantir le développement et la réforme du marché des changes, notamment, l’apport de plus de liquidité, M. Zaara a recommandé une batterie de mesures réglementaires, qui sera proposée à la BCT, visant le prolongement du délai de couverture de change à terme à plus d’un an, l’introduction du système périodique d’adjudication, la réduction de la marge entre cours achat et vente, la limitation du nombre de teneur du marché, la réorganisation du marché des options, l’utilisation des swaps ( double opération de change simultanée, l’une au comptant dans un sens, l’autre à terme dans l’autre sens, avec la même contrepartie), ainsi que la nécessité de miser sur plus de responsabilité pour l’opérateur teneur du marché.