Après la destruction par la chasse turque d’un avion russe le 24 novembre dernier, sous prétexte que cet appareil avait violé son espace aérien, la réponse de Moscou ne s’est pas fait attendre : le ministre de la Défense Sergueï a directement accusé le président turc Recep Tayyip Erdogan et sa famille d’être impliqués dans des transactions financières avec le groupe djihadiste Daech qui contrôle des puits de pétrole dans les zones qu’il occupe en Syrie et en Irak. Selon le ministre, qui menace de dévoiler la semaine prochaine des informations montrant qu’Ankara aide l’organisation terroriste, la Turquie est «le principal consommateur de pétrole produit dans les territoires sous le contrôle de Daech». Comme preuves tangibles, le ministre russe de la Défense a exhibé des images satellites qui montreraient des camions-citernes franchissant la frontière syro-turque, et dit avoir connaissance de trois itinéraires par lesquels le pétrole de l’EI est acheminé en Turquie.
Pour sa part, Vladimir Poutine en personne avait affirmé que la décision turque d’abattre un Soukhoï russe le 24 novembre près de la frontière syrienne répondait à une volonté de protéger des livraisons de pétrole en provenance des zones dominées par l’Etat islamique.
Entre-temps, le président russe a également refusé de rencontrer son homologue turc en marge de l’ouverture de la Conférence de Paris sur le climat ( COP21 ).
Le président turc a violemment réagi en affirmant qu’il quitterait ses fonctions si de telles accusations étaient avérées. «Personne n’a le droit de calomnier la Turquie en l’accusant d’acheter du pétrole au groupe djihadiste Etat islamique. Nous observons avec regret la réaction immodérée des Russes, alors que le monde entier sait que nous avons raison», s’est-il écrié.
Il va sans dire que le pétrole est l’un des principaux ressorts de l’économie de guerre menée par les djihadistes de Daech. Selon une enquête publiée au mois d’octobre par plusieurs journalistes du Financial Times, l’or noir rapporte en moyenne 1,5 million de dollars par jour à l’organisation terroriste.
D’après cette même enquête, Daech exploite deux champs pétrolifères en Syrie, al-Jibssa et al-Omar et écoule son brut via des camions-citernes venant de toute la région, même de parties avec lesquels l’organisation terroriste est en lutte. Ces camions peuvent attendre plusieurs semaines avant de charger leur pétrole et le livrer à des raffineries locales.