Depuis l’adoption de la Constitution en janvier 2014, la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et d’autres organisations mènent à ce jour une campagne pour l’harmonisation des lois ainsi que l’élaboration d’un rapport d’évaluation de l’activité législative. Durant la conférence de presse tenue aujourd’hui par la FIDH, en collaboration avec la fondation Friederich Ebert, dans laquelle les intervenants Mokhtar Trifi, Hafidha Chekir et Wahid Ferchichi ont chacun exposé leurs points de vue sur leur évaluation des travaux de l’ARP concernant les droits de l’homme.
Présent lors de la conférence, Wahid Ferchichi, professeur de droit à la faculté des Sciences juridiques, et président de l’Association tunisienne Liberté individuelle, déclare que : « Notre tâche est de jouer le rôle de baromètre, et ceci dans le but de mesurer le degré de constitutionnalité, d’inconstitutionnalité, de conventionalité et de non-conventionalité, des textes juridiques tunisiens déjà adoptés, mais surtout des projets de loi qui sont en cours ».
Sur un autre sujet, celui des agressions qui ont été signalées à l’encontre des journalistes, ce qu’a indiqué récemment le rapport de Reporters sans frontières, il déclare que« les journalistes restent toujours la cible de taille parce qu’ils ont pour rôle de relayer les informations et de les transmettre à la population élargie, c’est l’une des raisons pour lesquelles ils subissent toutes ces violations. Bien entendu, c’est alarmant, et ce qu’on a présenté aujourd’hui a été fait pour attirer l’attention et tirer la sonnette d’alarme, et dire faites très attention. Il faut rappeler que nous avons une Constitution adoptée et votée, il faut la respecter ».
Il poursuit: « Cela fait des décennies que la Tunisie a ratifié les conventions internationales. Cependant on aimerait bien entendre l’avis international à propos des ces nouvelles législations. Hélas, on continue toujours à proposer des projets de loi qui ne respectent pas la Constitution et malheureusement certains projets de textes souffrent d’inconstitutionnalité ».
Quelles sont vos conclusions ?
« Certes, il y a des articles de base dans la Constitution qui ne sont pas pour autant respectés. Prenons l’exemple du principe de l’égalité de tous et de toutes devant la loi. L’article 46 de la Constitution énonce clairement l’égalité parfaite entre l’homme et la femme. Or dans la réalité, il y a une atteinte directe aux libertés individuelles », commente-t-il.
Et d’ajouter que dans: « Le projet de loi relatif à la lutte contre la drogue, on remarque des dépassements à la limite des droits de l’Homme. Cependant, on sait pertinemment qu’en 1992, avec la loi numéro 52, on pensait qu’on allait dépasser cette logique , et qu’on s’oriente vers la création d’une tout autre logique de lutte contre la drogue basée sur la prévention et l’approche curative. Mais en lisant ce projet déposé par le gouvernement, pas encore transmis à l’ARP, il n’y a en l’occurrence aucun respect de l’intégrité physique, à savoir l’obligation de test et d’analyse, chose qui est contre l’intégrité physique, et que par ailleurs on considère ceci comme un acte de torture. Et à ce niveau là il faut revoir notre manière de lire la Constitution, et la manière de légiférer en fonction de la Constitution ».
Le processus de réforme est fondamental, mais l’examen de ce processus révèle un manque de rigueur portant sur le respect de la Constitution, c’est en partie l’une des recommandations du rapport intitulé : « A la lumière de la Constitution tunisienne et des conventions internationales ».