Revenant sur la note de la BCT relative à l’évolution de la conjoncture économique des onze premiers mois de l’année 2015, Moez Labidi, professeur d’économie, spécialiste des questions monétaires et financières, nous a affirmé que cette note conjoncturelle a démontré que la situation de l’économie nationale est marquée par des indicateurs signalant une dégradation, contre d’autres qui semblent s’améliorer cachant, entre autres, une dégradation.
De ce fait, la situation économique demeure, selon ses propos, inquiétante car c’est le statu quo au niveau des indicateurs. Cette situation ne sera pas rassurante, vu que la conjoncture sécuritaire impacte lourdement le secteur touristique et les IDE ; ce qui explique la chute de 33,8% des recettes touristiques, en comparaison avec leurs niveaux de 2014, pour revenir à 2.249 MDT.
Par ailleurs, l’intervention de la BCT en termes d’injection de liquidité bancaire reste à un niveau élevé, soit 5.379 MDT à fin novembre 2015, contre seulement 962 MDT en décembre 2010, année de référence.
Notre interlocuteur a précisé que ces interventions musclées de la BCT traduisent la fragilité du secteur bancaire et la dégradation de la conjoncture économique.
Du côté des améliorations, le professeur a fait savoir que l’amélioration de certains indicateurs économiques semble trompeuse et cache de mauvaises performances.
Prenant l’exemple du déficit de la balance commerciale, il a affiché, au cours des onze premiers mois de 2015, une baisse de 1.336 MDT ou 10,6% par rapport à la même période de l’année précédente, pour se situer à 11,2 milliards de dinars. Cette baisse s’explique essentiellement par la bonne performance des exportations de l’huile d’olive et des dattes. Or, la baisse pluviométrique actuelle laisse présager une régression des recettes agricoles courant la prochaine saison; ce qui conduira sans doute à un rebondissement du déficit.
Dans le même ordre d’idées, l’indice général des prix à la consommation ( IPC ) a baissé, en glissement annuel, revenant de 4,6% en octobre 2015 à 4,3% en novembre de la même année. Or, cette baisse s’explique par la chute de la composante volatile de l’inflation ( produits frais et énergétiques ), alors que la composante fondamentale de d’inflation, celle de l’inflation sous-jacente, demeure à un niveau relativement élevé, pour atteindre 5,7% en glissement annuel en novembre 2015, contre 5,6% le mois écoulé.
Pour leur part, les avoirs nets en devises représentent, au terme du mois de novembre 2015, 112 jours d’importation et 119 jours jusqu’au 29 décembre 2015, contre 112 jours à la fin de l’année 2014.
En comparaison entre les deux derniers mois de l’année en cours, l’amélioration des stocks en devises qui a été constatée ne peut être considérée, selon Moez Labidi, comme positive parce qu’elle s’explique principalement par les prêts accordés à la Tunisie par l’Union Européenne ( UE ) et la BAD qui sont de l’ordre de 217 MDT et 400 MDT respectivement, et le don de l’UE qui est de 160 MDT.
Pour conclure, il a estimé que seule une rupture avec l’hésitation et l’amateurisme politique, et une coupure avec la fièvre revendicative, le populisme et le corporatisme, pourront remettre la Tunisie sur le chemin de la croissance. Et c’est uniquement dans un tel scénario que les fondamentaux de l’économie vireront au vert.