La réforme de la police serait-elle une ardente obligation ? C’est en partie le débat organisé aujourd’hui par l’Observatoire tunisien de la sécurité globale (OTSG) sur le thème : “ La réforme de la police ici et ailleurs”.
Comment garantir la liberté et la sécurité des citoyens dans un Etat de droit ? Pour Jamil Sayah, président de l’OTSG et professeur de droit public à l’Université de Grenoble, il faut réhabiliter la relation policier-citoyen à travers la confiance et la légitimité. Il déclare: “Il est essentiel à ce que le citoyen ait confiance dans la police. Celle-ci doit s’assurer que ses interventions sont légitimes. Le rapport entre les deux parties doit être un rapport apaisé et fondé sur le dialogue. L’enjeu consiste à former une police de prévention et de dialogue au profit du dialogue avec le citoyen et la société. On doit agir pour améliorer la structure et le statut du policier. On doit garantir aux agents de la police un statut qui les protège et leur garantisse des moyens pour se défendre lorsqu’ils sont agressés, notamment lors d’émeutes ou d’arrestation de criminels ».
Et d’ajouter : “Ces garanties ne seront inscrites dans la loi qu’avec l’adoption d’un Code de déontologie. Cependant, aujourd’hui on ne peut, en aucun cas, réformer la police sans l’accord et la consultation des policiers. Il faut que les citoyens participent à cette réforme à travers l’Observatoire tunisien de la sécurité globale. Il faut que l’Etat prenne également en charge la réforme, crée des conditions nécessaires et entame des négociations sur ce sujet pour que le code de déontologie ne soit pas imposé, mais soit le fruit d’un long dialogue avec les parties prenantes”.
Abordant la question liée aux problèmes sociaux-économiques, notamment les mouvements de protestations sociales dans plusieurs villes, Jamil Sayah a déclaré que la solution, selon lui, appartient aux politiques qui doivent assumer leurs responsabilités. Il souligne : “Ce n’est pas au policier de régler ce problème. Il faut une véritable volonté politique pour améliorer la relation police-citoyen”.
Qu’en est-il de la réforme dans son cadre général ? Badredine Braiki, chargé de l’instance générale du suivi des programmes publics auprès de la Présidence du gouvernement, a fait savoir que ces réformes ne peuvent réussir qu’à travers un consensus national regroupant tous les acteurs. D’où la nécessité de mettre en place des réformes, car il y a urgence”, dit-il, en continuant “ La police tunisienne est en train d’évoluer, de changer vers une police citoyenne démocrate, pro-active”.
Leila Chettaoui, présidente de la commission spéciale sur la sécurité et la défense à l’ARP a fait un état des lieux de la situation que traverse les jeunes, mais aussi leur déception à l’égard de la classe politique.
Selon Mme Chettaoui : “Il faut rétablir la confiance avec les jeunes. Il y a un travail conjoint à faire entre la société civile, les institutions sécuritaires, le Parlement, les partis politiques. Je pense aujourd’hui que les députés sont en train de commencer à faire leur travail sur le terrain. Ils se sont déployés depuis trois jours pour instaurer ce dialogue. J’espère qu’après le pic que nous avons vécu ces derniers jours, nous allons progressivement revenir à la raison. Les Tunisiens aiment leur pays. Ils sont attachés à leur Tunisie et je suis certaine que les Tunisiens ne laisseront pas faire certains intrus qui veulent créer cette instabilité. Nous avons payé très cher notre liberté et là je pense aux martyrs. »
Elle conclut : “Les Tunisiens ne veulent plus revenir à ce que nous avons vécu en 2011. Nous avons toutes nos chances de rétablir cet équilibre et repartir du bon pied pour continuer à construire cette démocratie”.
Lutter pour une police démocratique, tel était l’exemple du Portugal, a annoncé Paulo Rodrigues, cadre de la police portugaise, en déclarant que : “ Pour faire face au terrorisme, il faut une police plus informée. C’est aussi l’une des raisons pour investir dans la police”.