Le chemin demeure encore long pour lutter contre la corruption en Tunisie. Le dernier rapport de Transparency International, relatif à la perception de la corruption (2015) dans le monde, l’affirme. Le classement a été dévoilé aujourd’hui, 27 janvier, lors d’une conférence de presse organisée à Tunis par l’Organisation « I watch ».
Selon ce rapport, la Tunisie occupe la 76ème place avec 38 points dans ce classement et se place en 13ème position sur le plan africain. Notons que la Tunisie a devancé d’autres pays arabes tels que l’Egypte, et demeure la première du classement à l’échelle du Maghreb : Maroc (88ème place), l’Algérie (88), Libye (161) et Mauritanie (112). Notons aussi que le rapport s’est focalisé sur la corruption dans le secteur public.
Le directeur exécutif de l’organisation, Mouheb Garoui, a indiqué que plusieurs indices donnent à penser que la corruption en Tunisie a encore de beaux jours devant elle. Le premier des indices et non des moindres est l’absence totale de cadre juridique pour mener une lutte sérieuse contre la corruption. Dans ce sens, il a rappelé que la Tunisie a signé la Convention des Nations unies contre la corruption en 2008. Cette convention oblige la Tunisie à mettre à jour son arsenal juridique relatif à la lutte contre la corruption, ce qui n’a pas jamais été fait depuis. Résultat : plusieurs failles juridiques existent et permettent l’impunité : « La loi sur la protection des indicateurs n’existe pas. De même celles sur l’enrichissement illicite, la déclaration des biens ainsi que la criminalisation de la corruption dans le secteur public. Quant à la loi relative à l’accès à l’information, elle est rarement appliquée».
Par ailleurs, Mouheb Garoui a pointé du doigt « l’absence de toute volonté politique de lutte contre la corruption ». Pour lui, les partis politiques qui ont participé aux élections parlementaires ont beau étaler leurs promesses de lutte contre la corruption, rien n’a vraiment été fait ». Il a rappelé que l’Instance constitutionnelle pour la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption est restée lettre morte bien que la nouvelle Constitution soit en vigueur depuis deux ans !
Sur un autre plan, il a estimé qu’il existe des projets de loi qui paradoxalement incitent à l’impunité, à l’instar du projet de loi sur la réconciliation économique et financière : « Avec un tel projet, la Présidence de la République est en train d’encourager la culture de l’impunité », indique-t-il.
Commentant le classement de la Tunisie, le directeur exécutif de « I Watch » l’a qualifié de catastrophique (en 2014 la Tunisie était classée 79e) : « Nous ne pouvons parler de légère amélioration car nous avons régressé en termes de points. En 2014, on était noté 40/100 points et en 2015 38/100 ». De plus, en 2014, le classement avait pris en considération 175 Etats alors qu’en 2015, on compte seulement 168 Etats soit sept pays de moins.
Quant aux trois premières places, elles ont été remportées par les pays scandinaves : le Danemark (91), la Finlande (90) et la Suède (89). Pour les derniers du classement, la Corée du Nord et la Somalie (8 points) ferment la marche, sans surprise.