Qu’elle soit petite ou grande, la corruption est bien souvent citée comme un frein majeur à la croissance économique des pays en voie de développement. Depuis les années 2000, la corruption a pris de l’ampleur en Tunisie sous Ben Ali, puis elle a continué à s’étendre, même après le 14 janvier, voire même à se multiplier.
Il y a un avant et un après 14 janvier 2011 et Transparency International confirme ce verdict. Pour rappel, la Tunisie se situait à la 59ème place sur 177 pays du classement de l’indice de perception de la corruption en 2010, mais elle a chuté de 20 points en 2014, et s’est retrouvée à la 79ème place. Cela étant, en 2015, pour cet indice de perception de la corruption, la Tunisie gagne trois places.
La cause de ce mauvais classement, l’absence de volonté politique de lutter efficacement contre la corruption, est pointée du doigt, nous a confié Mouheb Garoui, directeur exécutif de l’organisation I Watch, en poursuivant: « L’absence d’un cadre légal et juridique peine à voir le jour. De même que l’absence de protection de la personne qui dénonce les actes de corruption et d’enrichissement illicite, comme fut le cas du clan des Trabelsi ».
Il déclare: « Il en va de même quant aux déclarations de biens, qui ne sont malheureusement pas respectées, même par les membres du gouvernement, le chef du gouvernement, le président de la République, ainsi que les députés ». Or, d’après l’article 11 de la Constitution: « Il incombe à tous ceux qui assument les fonctions de Président de la République, ou de Chef ou de membre du gouvernement, ou qui siègent à l’Assemblée des représentants du peuple, ou aux instances constitutionnelles indépendantes, ou qui exercent toute autre haute fonction, de déclarer leurs biens tels que prévu par la loi ».
Deux ans après l’adoption de la Constitution, déclarer ses biens avant d’intégrer la fonction publique, n’est toujours pas d’actualité, déplore le directeur exécutif de l’ONG. Ce qui selon lui, « est catastrophique, mais aussi anti-constitutionnel ».
Il a ajouté : « Même si nous avons gagné trois places. Il faut comprendre aussi que le rapport de Transparency International a éliminé sept pays. C’est la raison pour laquelle la Tunisie a gagné trois places, passant de la 79ème à la 76ème place. Quant au score réalisé, citons l’exemple du Brésil qui a perdu sept points. La Tunisie qui est classée sur une échelle de zéro à 100 points, est passé d’un score de 40 en 2014, à 38 en 2015, perdant ainsi deux points. Nous continuons à rester en bas de l’échelle ».
Pour éradiquer ce phénomène, nous avons besoin d’une stratégie nationale de lutte contre la corruption, c’est en partie la solution qu’a donnée M. Garoui, en ajoutant entre autres qu’il faut instaurer la bonne gouvernance dans l’ensemble du pays.
Plusieurs questions récurrentes demeurent sans réponse, a-t-il fait savoir. Quelles sont les priorités de l’instance nationale de lutte contre la corruption, qui a à sa tête le nouveau ministre Kamel Ayadi? Où se trouve son siège, si quelqu’un veut dénoncer des actes de corruption? Quels sont les défis à relever? Quels sont ses pouvoirs? Face à ces interrogations, le directeur exécutif de l’ONG demande de la clarté, en soulignant : « Ce que nous demandons à cette nouvelle instance, c’est de la clarté et de la transparence ».
« En Somme, il est difficile d’évaluer l’ampleur de la corruption si on ne pense pas à trois axes importants : la prévention, la sanction et l’éducation. D’ailleurs, nous avons rencontré les ministres de l’Enseignement supérieur et de l’Education, tous les deux ont répondu favorablement à ce qu’il y ait une matière qu’on inculque aux jeunes adolescents, ainsi qu’aux étudiants, une matière intitulée l’éducation civile, dans laquelle serait enseigné les notions de pot de vin, de corruption, avec des exemples simples, etc. Il s’agit d’un processus à mettre en place pour combattre la corruption ».
Mais pour bien mener ce combat, il faudrait fixer une stratégie claire qui vise le court, le moyen et le long terme.