Deux ans après l’adoption de la Constitution tunisienne le 26 janvier 2014, où en sommes-nous sur le plan législatif ? Quels sont les points positifs mais aussi les défaillances? C’est en partie l’objet du débat d’hier organisé dans le cadre des mardis de l’Association des Tunisiens des Grandes écoles ( ATUGE ).
« La Constitution tunisienne est une bonne constitution qui pourrait se situer dans les constitutions les plus évoluées du monde. Elle est codifiée dans le respect des standards internationaux en matière de libertés et de droits », a affirmé Rafaa Ben Achour, professeur émérite de la Faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, lors de son intervention. Toutefois, elle présente, selon lui, « quelques lacunes sur le plan de la mise en application. Et ceci on le constate à travers un déséquilibre flagrant entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ».
Selon lui, le bilan deux ans après, montre que 50% de la Constitution ne sont pas entrés en vigueur. Pour la simple raison que certaines institutions n’ont pas vu le jour, comme le Conseil supérieur de la magistrature ( CSM ), la Cour Constitutionnelle ou encore d’autres instances constitutionnelles.
Et d’ajouter: « Mais ce qui est le plus grave, c’est qu’on n’a malheureusement pas respecté les délais prévus. A titre d’exemple, la création du CSM – qui aurait dû être adopté dans les six mois de la tenue des élections législatives – vu que ce projet de loi a été censuré à deux reprises par l’Instance provisoire de contrôle de la haute constitutionnalité. Je pense que le CSM sera certainement une fois de plus retardé et ne verra pas le jour avant 2017, ce qui retardera d’autant la composition de la Cour Constitutionnelle qui n’existe uniquement que sur le papier. »
Interrogé sur la justice constitutionnelle, M. Ben Achour a fait savoir qu’ « on est sur une voie extrêmement lente, parce que les méthodes de travail des députés de l’ARP ne sont guère satisfaisantes. C’est aux députés de prendre conscience de l’importance de la mise en place des institutions, mais aussi du respect des délais imposés par la législation. Ce qui n’est toujours pas le cas ».
Et de continuer: « Cependant, le paysage politique est en train de changer après les dernières élections. Le pluripartisme est un phénomène nouveau. Même si on passe par des moments de déséquilibre dans le paysage politique, cela va certainement se stabiliser comme pour les autres pays qui sont passés par le même parcours. »
« Le petit bémol est qu’on n’a pas fêté comme il se doit le 26 janvier, qui est tout de même un moment historique », a confié Rym Mahjoub, députée de l’ARP ; en poursuivant : « Même si on a réalisé quelques avancées, beaucoup reste à faire, comme par exemple le chapitre 7 qui concerne la décentralisation ».
« Nous nous trouvons dans une nouvelle ère, où un nouveau bloc parlementaire vient d’être créé. Les démissions de plusieurs députés du parti majoritaire posent problème quant au déroulement du travail au sein des commissions. Il faut placer le Parlement comme étant une institution de taille, pour renforcer les institutions constitutionnelles », a déclaré Mongi Rahoui en réponse à une question sur le paysage parlementaire.
Faire le point sur le processus législatif, exécutif et judiciaire. Tels sont les dossiers sur lesquels les députés devraient se pencher.