Une nouvelle victoire judiciaire. Pour la première fois en Tunisie, les dispositions de l’article 13 bis et de l’article 57 du code de procédure pénale, relatives à la garde à vue viennent d’être amendées et adoptées avec 96 voix pour à l’ARP, lors de la séance plénière du mardi 2 février.
C’est un pas de géant qui vient d’être fait avec ces nouvelles dispositions législatives. Quel type de dispositif nous voulons mettre en place pour que ces droits soient effectifs? Quels sont les défis, alors que la loi qui vient d’être adoptée entrera en vigueur le 1er juin 2016. Les défis sont de taille, mais tout dépend de la mise en œuvre de ces nouvelles mesures législatives. La présence d’un avocat devenue nécessaire pour chaque prévenu et la détention préventive est passée de 72 h à 48 h.
Rencontré lors d’un atelier de réflexion organisé par Avocats sans frontières et l’Ordre national des avocats de Tunisie, Antonio Manganella, Chef de mission Tunisie d’Avocats sans frontières, a déclaré : « C’est un moment très intéressant. Cela constitue un véritable jalon dans la construction de l’Etat de droit en Tunisie. Cette loi s’ajoute aux acquis constitutionnels principaux qui ont été réalisés après la Révolution. On ne peut que s’en réjouir. L’assistance d’un avocat de la défense durant la période de la garde à vue revêt un intérêt fondamental pour un procès équitable ».
Et de poursuivre: « Cela dit, il reste beaucoup à faire. A titre d’exemple, la garde à vue pour infraction( action ou comportement passibles de sanctions pénales). C’est quelque chose qui pourrait être modifié dans la réforme générale du code pénal, et éviter les peines d’emprisonnement pour infraction qui sont des délits primaires, qui ne nécessitent pas de garde à vue ».
Interrogé sur le non-respect d’une règle de procédure prévue par la loi dans le code de procédure pénale, il a répondu : « S’il y a un vice de procédure dans la mise en œuvre de cette disposition, toute charge à l’égard de la personne pourra être annulée dans le cas d’un procès et l’avocat pourra évoquer la nullité des charges. Mais personnellement, ce n’est pas la loi qui pose problème, c’est sa mise en pratique et on devrait se pencher sur le sujet ».
Et de continuer : « Je vous donne un exemple : qui va appeler l’avocat ? Comment l’avocat va-t-il interagir avec les forces de l’ordre ? Ce sont des questions qui nécessitent des réponses. Autre exemple, en cas de mauvais traitements, ou encore d’aveux extorqués par l’usage de la force. Ce sont des aspects du problème qu’il faudrait étudier davantage ».
Et de conclure : « Cela dit, nous sommes optimistes car nous ne pouvons que nous réjouir au vu de la rapidité du vote en faveur des nouvelles dispositions : la présence de l’avocat dans les trois types d’infractions, les délits, les crimes, la garde à vue réduite de 72 h à 48h, et renouvelable une seule fois avec l’autorisation du procureur ».
Par ailleurs, dans un communiqué, Human Rights a mentionné: “Toute personne arrêtée ou détenue doit avoir rapidement accès à un avocat et, sauf si la personne a renoncé à ce droit par écrit, elle ne sera pas obligée de répondre à des questions ou participer à toute interrogatoire sans son avocat. De plus, la nouvelle loi stipule qu’un médecin-légiste accompagne également le prévenu lors de l’interrogatoire par la police durant la garde à vue. Les policiers sont tenus d’informer le prévenu de ses droits.
Bien que cette loi n’entre en vigueur que le 1er juin 2016, elle fait déjà l’objet de débats parmi les hommes du barreau et l’opinion publique.