Quel rôle pour les médias dans la lutte contre le terrorisme? C’est en substance le débat qui a eu lieu aujourd’hui à l’Alecso.
Journalistes, consultants des médias venus des quatre coins du Proche-Orient, de l’Egypte, de la Jordanie, de la Palestine ont participé au colloque sur “Le rôle des médias dans la lutte contre le terrorisme”. Les discussions et les débats ont porté sur plusieurs points parmi lesquels : les médias sont-ils une cible alternative pour les terroristes? La majeure partie des intervenants estime que le terrorisme trouve son compte dans les médias dans la mesure où une plateforme lui est offerte pour médiatiser ses attaques. Une affirmation de Mahmoud Werwari, journaliste égyptien de la chaîne Al Arabiya, lors de son intervention.
Selon lui, le terrorisme ne date pas d’hier. Mais pour trouver une solution à ce phénomène qui ne cesse de s’étendre, il faut qu’il y ait une définition claire et universelle du mot “terrorisme”, ou encore de l’extrémisme. Citant l’exemple des Frères musulmans, il a déclaré: “A un moment donné, l’Egypte n’a pas voulu promouvoir le terme des Frères musulmans, car cela aurait servi leur propagande”.
“Nous devons enlever aux terroristes l’oxygène publicitaire dont ils dépendent” (une citation de la Dame de fer, Margaret Tatcher), tel est l’un des exemples cités lors de ce débat. Ce qui nous ramène à la réalité du terrorisme, et à son évolution au fil des ans.
Auparavant, les terroristes suivaient les informations à travers les médias classiques, la presse écrite, la radio, ou la télé, maintenant la donne a changé. C’est dans les médias sociaux qu’ils ont trouvé refuge. Une affirmation qui a été appuyée par Sadok Hammemi, directeur du Centre africain de perfectionnement des journalistes tunisiens, qui a déclaré à cet effet : “ Les terroristes se nourrissent à travers les médias sociaux que ce soit Twitter ou Facebook, soit pour le recrutement ou pour préparer des opérations terroristes, soit pour le financement de leurs activités. Cependant, nous nous trouvons devant le fait suivant : le terroriste ne s’intéresse plus à l’info, il passe directement à travers les médias sociaux, sur lesquels il diffuse ses vidéos”.
Il poursuit: “ Un bon média doit contribuer d’une façon implicite à la lutte contre le terrorisme. Or, un média qui se respecte, il doit jouer son rôle comme il faut pour lutter contre le terrorisme. Mais il est aussi du devoir des journalistes de relayer les faits, et ceci en conformité avec la déontologie journalistique”.
Pour Suhair Jaradat, journaliste jordanienne: “Il est évident que les médias jouent un rôle important. Quand on parle d’un média indépendant et neutre, il ne doit en aucun cas être soumis à des mesures gouvernementales. Quand il connaît ses droits, il peut jouer un rôle déterminant dans l’environnement dans lequel nous vivons”.
Elle ajoute: “Entre avant et après la révolution, les médias ont changé, ils ne sont plus ces médias classiques, conservateurs. Avant, ils travaillaient sous la contrainte, maintenant ils sont beaucoup plus libres. Dans le combat contre le terrorisme, d’une manière générale, nous avons une responsabilité envers l’opinion publique, pour dire ce qui ne va pas, faire des campagnes de sensibilisation, des programmes culturels”.
Autre sujet débattu, la définition du terrorisme. Ahmad Abdallah, média consultant d’un think tank déclare : “ Il faut définir le mot terrorisme qui, de nos jours, est devenu tellement politisé. Chaque pays veut le définir à sa manière, comme je viens de le dire à propos des freedom fighters, “ des combattants de la liberté”, les avis divergent. Le plus important dans tout ceci, il faut que les médias travaillent plus librement sans entrave”.
Il ajoute: “ Vers la fin, j’ajouterais, il faut qu’il y ait une révolution culturelle, changer les mentalités, un système sain, une autorité qui respecte les citoyens et vice-versa, et qu’un citoyen ne devra plus avoir peur quand il passe devant un agent de police. Si nous arrivons à réaliser cela, nous aurons réussi à instaurer un Etat de droit”.