« Depuis plusieurs années, la Tunisie perd énormément de places en termes de compétitivité économique, ce qui représente une opportunité perdue pour relancer la croissance du pays et conquérir de nouveaux marchés », a indiqué M. Jacob Kolster, Directeur du Département régional d’Afrique du Nord de la Banque africaine de développement (BAD), à l’economistemaghrebin.com, lors d’un atelier régional organisé sur le thème de « La compétitivité en Afrique du Nord ».
Décryptant les causes de cette détérioration, le responsable à la BAD a précisé que la Tunisie dispose d’une réglementation, entourant le secteur privé et les investissements privés nationaux et internationaux, qui peut être parfois très contraignante et compliquée, surtout pour les petites et moyennes entreprises ( PME ) à faibles moyens d’investissement. C’est le cas, entre autres, des règles régissant le marché du travail.
« Face à cette situation, les gouvernements n’ont pas opté pour le développement de ce marché et son assouplissement, comme ce fut le cas de l’Europe qui était qualifiée, il y a 40 ans, d’homme fatigué et malade. Protéger les droits des travailleurs c’est bien mais il faut aussi penser au bien-être des 50% de jeunes diplômés du supérieur qui sont au chômage .»
Il a précisé, dans ce sens, que le taux de chômage en Tunisie est officiellement de 15%. Mais que si on calcule le nombre de citoyens qui n’ont pas de travail par rapport à toute la population active, ce taux sera beaucoup plus élevé, avoisinant même les 30%.
D’autre part, la Tunisie a un climat d’affaires où l’accès au financement pour les entreprises est très difficile, parce qu’il y a une suprématie des banques qui souvent demandent des garanties très importantes et qui n’ont pas la possibilité de bien évaluer le risque. Le ralentissement de l’économie depuis 2011 et le niveau élevé des crédits non performants rendent les banques encore plus réfractaires au risque. Les autres sources de financement telles que le capital investissement sont disponibles mais jouent un rôle très limité dans le financement de l’économie et particulièrement des PME.
Après la révolution, cette situation s’est accentuée. Les gouvernements ont parlé pendant cinq ans de réformes, mais malheureusement, en ce qui concerne le secteur privé, le rythme d’exécution de ces réformes était bien en dessous des attentes. Il en est ainsi du nouveau code des investissements qui sera adopté prochainement. Son impact sur la relance des investissements demeure à définir.
En outre, M. Kolster a affirmé que l’insécurité qui règne partout, soit au niveau local, soit dans les pays voisins tels que la Libye, pèse lourd sur la confiance des investisseurs nationaux et étrangers et réduit l’attrait du pays pour ces derniers. « C’est un défi très important auquel fait face aujourd’hui la Tunisie et qui s’ajoute aux facteurs qui ont entrainé un glissement négatif de la compétitivité tunisienne ces dernières années. »
En conclusion, le responsable a estimé que la Tunisie a un fort potentiel et dispose de tous les atouts pour améliorer sa compétitivité, notamment une infrastructure très développée et une population à forte volonté et bien éduquée, mais qu’elle a besoin d’accélérer l’exécution des réformes structurelles nécessaires pour arriver à réaliser ses ambitions en matière de développement économique inclusif et durable.