Comme tous les ans, la Foire du livre a lieu au printemps, un événement marqué par une grande participation des maisons d’édition. Une occasion pour elles pour présenter leurs nouveautés, mais aussi leurs coups de coeur. Mais derrière ce monde toujours fascinant de la littérature, qu’en est-il de la réalité ? Quelles difficultés rencontrent les maisons d’édition ? Comment tirent-elles leur épingle du jeu ? Rencontre avec quelques-unes :
Wided Ben Yahmed, attachée de presse de la maison d’édition Cérès, nous confie que l’édition connaît une crise actuelle, en précisant: “ La consommation du livre auprès du Tunisien a reculé. Malheureusement, les difficultés économiques et la cherté de la vie n’encouragent pas le Tunisien à préférer l’achat d’ un livre à autre chose qu’il juge plus utile.
A part la mévente, quelles autres difficultés rencontrent les maisons d’édition ? “ Nous avons un problème de diffusion pour la simple et bonne raison que le nombre de librairies a régressé. Cependant, d’autres libraires choisissent la vente des livres d’auteurs renommés parce qu’ils estiment que ça s’écoule plus facilement”, répond-elle.
Elle poursuit : “Et puis, il faut se dire qu’un grand nombre d’écrivains de renom comme Paulo Coelho, John Grey, Amine Maalouf ont déjà leurs fans et leurs lecteurs. Mais nous aussi, nous avons nos propres auteurs connus tels que Chokri Mabkhout, Hela Ouarda, Walid Ferchichi, et tant d’autres. Toujours est-il qu’ avec les livres importés, on arrive à réaliser un chiffre d’affaires important.
Entre avant et après le 14 janvier
“ Nous n’avons plus ce problème de censure comme avant. Notre seul acquis après le 14 Janvier est la liberté d’expression, dont nous sommes fiers. Pour preuve, les Tunisiens achètent de plus en plus les livres qui traitent de près ou de loin de la révolution tunisienne, en ajoutant: “ voir un livre exposé, c’est un vrai parcours du combattant. Je tire mon chapeau à celui qui vient de publier un livre ou de l’éditer”.
Elle ajoute: “Ce qui serait vraiment utile, c’est que les autres ministères participent un peu plus à valoriser la littérature. Certes, les moyens ne sont plus comme avant, mais les auteurs locaux ne trouvent plus leur place. Or la culture d’un pays ne doit pas être laissée pour compte, il est important de la dynamiser. Cette année, il y aura de grands noms qui seront parmi nous comme Olfa Belhassine, je pense que son livre sera une référence dans dix ans, toute une recherche, Hela Ouardi, « Les derniers jours de Mohamed ».
Par ailleurs, Fatma Jebabli, responsable du service documentation à Sud Edition, déclare pour sa part: “ L’année dernière, on a compté un grand nombre de Tunisiens, venus des quatre coins du globe pour assister à la foire. Vous savez, le Tunisien n’a pas changé son mode de vie, dès qu’il trouve le temps, il lit. Et j’espère que cette fois ça sera pareil. Et puis demain on va fêter 40 ans de la création de notre édition, il y aura des signatures des auteurs, c’est une vraie fête que nous attendons, c’est comme quelqu’un qui va fêter son anniversaire avec impatience”.
Qu’en est-il des libraires, comptent-ils participer à la foire du livre ? Pour Nadia Bachamba Znaidi, responsable commercial de la librairie El Moez, elle ne compte pas participer pour la simple raison que « la foire est consacrée aux maisons d’édition pour qu’elles exposent leurs œuvres, selon leurs besoins et les attentes du public”.
Dans cet endroit convivial, un peu atypique dans le monde des livres, les maisons d’édition, leur rêve à tous est que les affaires reprennent. D’après une étude récente, 80 % des Tunisiens, toutes catégories sociales, toutes tranches et tous sexes confondus, ne lisent plus beaucoup. C’est la réalité.
Pour le reste, la lecture est essentielle dans la vie de tous les jours, mais ça tend à devenir un luxe vu la cherté de la vie. Ce que confirme Afef, une jeune maman qui travaille dans une clinique privée. Elle nous confie : “ J’aimerais bien lire, mais je ne peux le faire que lors d’un répit, entre travail et maison, c’est loin d’être une tâche facile. Toutefois cela m’arrive de le faire avant de m’endormir la nuit. Par contre je fais de telle sorte que ma fille devienne, assoiffée de lecture. Je l’encourage à lire car c’est à travers la lecture, qu’on forge sa personnalité. Je ne veux pas non plus qu’elle subisse mon sort : j’ai dû quitter l’école à 18 ans pour aller travailler.
Elle conclut: “ On ne se lasse jamais de se cultiver, peu importe l’âge ou le niveau d’instruction, la soif de nourrir son esprit ne peut s’assouvir que par la lecture »