Malheureusement, 2016 a déjà ouvert le bal des décès de figures importantes de la scène culturelle tunisienne. Hier, 5 avril, le poète Sghaïer Ouled Ahmed nous quittait après un long combat contre la maladie.
Ce combat qu’il a mené avec dignité, courage et résistance. Une maladie qui ne l’a pas empêché d’écrire, de participer à quelques cérémonies culturelles, défiant ainsi la mort par le truchement du verbe. Populaire? Oui il l’était. Nous lui devons ses poèmes à la gloire de la patrie, ses positions inébranlables contre l’obscurantisme, son attachement aux causes sacrées du pays et sa présence au sit-in du Bardo.
La grand poète était populaire sans être populiste. Comment oublier le jour où il a déclaré, dans un post sur le réseau social Facebook, le commencement de son long voyage avec la maladie. Amateur de poésie, artistes, hommes politiques- dont quelques uns étaient des ennemis farouches- se sont rendus à son chevet dans un geste qui rime avec affection pour un grand poète tunisien. C’est peut-être l’un des rares poètes qui, à travers la poésie, a su gagner le cœur de ses lecteurs et même de ceux et celles qui ne s’intéressent pas à la poésie grâce à sa popularité.
A l’âge de 61 ans, il a quitté le monde pour rejoindre d’autres poètes et romanciers tunisiens comme Abou el Kacem Chebbi, Mnawar Smadah, Béchir Khraïef, Mustapha Khraïef, Mahjoub Ayari, Mustapha Fersi et Mahmoud Messaadi. Le poète n’est pas mort, il est juste parti rejoindre la constellation des grands précités. Nous ne saurons jamais dire adieu à Sghaïer Ouled Ahmed. Les jeunes engagés se souviendront toujours de l’icône qu’il était et réciteront les vers suivants dans les places publiques, les soirées poétiques, les clubs de poésie et lors des cérémonies patriotiques.
Nous aimons ce pays comme personne; nous y faisons pèlerinage / Avec les exilés / Matin / Et soir / Même dimanche / Et si on nous tuait / Comme on l’a déjà fait / Si on nous exilait / Comme on l’a déjà fait / Si on nous bannissait / Au diable vauvert / Nous reviendrions en conquérants / Vers ce pays / Par Dieu qui / Fit le ciel / Sans colonnes / S’il y avait sur terre / Un lieu de pèlerinage / Autre que celui / Du Hedjaz / Je me serais orienté / Vers ce pays / La nuit je dors avec en tête / La faim des orphelins / Les orphelins affamés / Et la frustration de celle / Qui éleva des hommes / Sans chevaux / ……..» (Vers traduits de l’arabe en français par Jalel Gharbi)