Le Luxembourg accueillera, le 18 avril 2016, la réunion du Conseil d’association Tunisie-Union européenne et le coup d’envoi du premier cycle des négociations de l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) sera donné.
Les relation tuniso-européennes sont bien établies à travers l’histoire et la géographie, une mémoire commune et des échanges économiques et culturels soutenus. L’Europe est, et demeurera de loin notre premier partenaire sur tous les plans.
C’est une évidence qu’il convient de rappeler de temps en temps à ceux qui divagueraient en conjecturant sur d’autres alternatives absolument illusoires. Comment ne pas se rappeler ce qu’écrivait Sylvain Kahn, professeur d’histoire de l’intégration européenne à Sciences Po, dans l’euphorie du moment, il y a de cela exactement 5 ans (le journal Le Monde du 2.03.2011) :
«Pour l’Europe, comment soutenir la Tunisie ? Comment la conforter ? Comment s’engager aux côtés des Tunisiens enfin libres ? En prenant un engagement généreux, audacieux, durable et responsable : celui d’ouvrir l’UE à une adhésion de la Tunisie. Une telle politique serait la plus pertinente sur tous les plans : idéalisme, intérêt, géopolitique, réalisme».
En fait, il s’agit de consolider le socle de ces relations et de les rénover par un effort commun vers plus d’équité. Le principe d’équité est primordial pour maintenir une relation partenariale durable et bénéfique. Cela dépend de nos partenaires, mais aussi de nous-mêmes. La compétence de nos négociateurs est sollicitée aujourd’hui plus que jamais au cours de cette nouvelle étape.
L’Union européenne a déjà mis sur la table, depuis 2015, un lot de drafts se rapportant à plusieurs domaines (le commerce des services, la libéralisation et la protection de l’investissement, la coopération en matière de commerce électronique, la protection des droits de propriété intellectuelle, le commerce et développement durable, les obstacles techniques au commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires, les dispositions relatives au commerce de l’énergie, les mesures commerciales, les procédures douanières et la facilitation des échanges, la transparence, la concurrence et autres dispositions économiques).
Les craintes exprimées aussi bien par des organisations de la société civile que par des journalistes sont essentiellement dues à un déficit de communication, un climat d’opacité totale imposé par les gouvernements tunisiens successifs et le black-out inconcevable sur le contenu de ces négociations.
Il s’agit de les examiner soigneusement dans des délais raisonnables et de se préparer à les discuter consciencieusement avec nos partenaires. Au préalable, le gouvernement tunisien est présumé avoir déblayé le terrain et pourvu nos négociateurs des outils de référence préliminaires, à savoir :
- Une étude approfondie élaborée par des experts tunisiens dressant le bilan de l’accord de 1996 ;
- Une vision pour l’avenir reposant sur le nouveau modèle économique du pays ;
- Une étude d’impact au sujet des projets soumis par l’UE, réalisée par des experts tunisiens;
- Un document conducteur fixant les lignes directrices des négociations, enrichi par des études d’accompagnement des négociations sur certains secteurs qui seront couverts dont l’épineux dossier de l’agriculture.
Cependant, ce que tout observateur vigilant constate, c’est d’abord une temporisation inopportune de la partie tunisienne depuis les réunions exploratoires qui avaient commencé en mars 2012. De telles négociations constituent un enjeu capital dans la mesure où elles doivent façonner l’avenir de notre pays dans un contexte particulier, face à des enjeux considérables.
Les atermoiements à réagir à temps aux propositions ou démarches d’éclaircissements, constatés chez certains ministères et administrations ne se justifient pas. Quelles explications pourrait-on donner à ces lenteurs ? Sommes-nous prêts au Luxembourg à entamer le premier round des négociations dans des conditions acceptables ? Rien de probant ne l’indique jusqu’à maintenant, alors qu’une mission aussi délicate que vitale est assignée à nos négociateurs.
Les craintes exprimées aussi bien par des organisations de la société civile que par des journalistes sont essentiellement dues à un déficit de communication, un climat d’opacité totale imposé par les gouvernements tunisiens successifs et le black-out inconcevable sur le contenu de ces négociations.
Il n’est pas fortuit que le député Riadh Jaïdane appelle le gouvernement, au cours d’une conférence de presse, tenue le 16 mars 2016, au palais du Bardo, à «suspendre et reporter les négociations sur l’ALECA», soulignant que les réponses du Chef du gouvernement sur ces questions «démontrent l’absence d’une vision claire et d’une stratégie nationale»…
Il est donc fondamental d’adopter désormais une posture plus ouverte pour expliquer davantage à l’opinion publique tunisienne l’intérêt pour la Tunisie de ces négociations en cours, d’apporter des éclaircissements nécessaires sur la teneur de l’ALECA et ses retombées.