Entre le Groupement professionnel des physiothérapeutes tunisiens qui relève de la CONECT et la Caisse nationale d’assurance maladie, le torchon brûle. Les physiothérapeutes ont exprimé leur mécontentement ce matin, lors d’une conférence de presse tenue au siège de la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie, CONECT.
Pourquoi les physiothérapeutes rejettent-ils le nouveau manuel de procédure ?
Hajer Hafhouf, présidente du Groupement professionnel des physiothérapeutes tunisiens, a expliqué les raisons pour lesquelles les physiothérapeutes ne regardent pas d’un bon œil le nouveau manuel de procédure sorti le 1er avril 2016.
En premier lieu, la présidente a indiqué qu’à cause de ce nouveau manuel, désormais la procédure du dépôt de dossier de prise en charge du patient est devenue compliquée : le physiothérapeute doit remplir un tableau de présence pour son patient « chose qui doit être normalement faite après l’obtention de la prise en charge et après la réalisation des actes de soins». Elle a estimé qu’une telle décision est illogique.
Autre source de mécontentement : suite à la publication du nouveau manuel de procédure, les médecins généralistes n’ont plus le droit de prescrire des séances de kinésithérapie pour leurs patients. Cela constitue une limitation à leurs prérogatives, d’après Hajer Hafhouf. « Ils doivent réagir », estime-t-elle.
Et d’expliquer que « par le biais de cette décision tous ceux qui sont inscrits dans le régime « médecin de famille » doivent désormais s’adresser à un médecin spécialiste pour les séances de kinésithérapie », précise-t-elle. Dans les régions où les médecins spécialistes sont rares ou n’existent même pas, le patient doit se déplacer vers une ville pour consulter un spécialiste, chose peu évidente.
La même procédure a exclus les étudiants et les agriculteurs de ce genre de soins, ce qui constitue d’après elle une nette violation du droit d’accès à la santé et cela concerne même les employés qui travaillent sous le régime SIVP.
Et ce n’est pas l’unique problème entre les physiothérapeutes et la CNAM !
D’ailleurs, les physiothérapeutes ont eu des problèmes avec la CNAM bien avant la publication de la nouvelle procédure. Aroussi Mohamed, secrétaire général du Groupement professionnel des physiothérapeutes tunisiens, a saisi l’occasion pour rappeler ces antécédents. En effet, les problèmes ont commencé en 2013. Cette année là , la CNAM avait demandé le dépôt de la carte professionnelle pour renouveler les contrats avec les physiothérapeutes. Or la CNAM détient des copies desdites cartes » pourtant nous nous sommes dit que c’est pour régulariser le secteur et interdire aux intrus l’accès au domaine », indique-t-il.
En 2015, la CANM se mêle du cahier des charges : « Chose que nous avons condamné surtout que le cahier des charges fait partie des prérogatives du ministère de la Santé et nous avons saisi le Tribunal administratif qui doit encore se prononcer », fait-il savoir. Selon notre interlocuteur, la CNAM exige que les physiothérapeutes enlèvent leurs enseignes : « Elle a même eu recours au chantage soit le remboursement des frais de soins soit l’enlèvement de l’enseigne », dit-il.
Plus tard, en octobre 2015, la CNAM a imposé une visite d’inspection au centre bien avant de remettre le code conventionnel de la CNAM aux physiothérapeutes : « De quel droit, la CNAM effectue-t-elle cette visite d’inspection pour un cabinet qui n’a pas encore reçu le code conventionnel ? », s’interroge-t-il.
Ce n’est pas uniquement l’affaire de la CONECT : l’UTICA est à l’autre bout de la ligne
Tarek Chamseddine vice-président de la Chambre nationale des physiothérapeutes qui relève de l’UTICA était lui aussi présent à la conférence et a indiqué que sa présence s’inscrit dans le cadre du renforcement des rangs, de l’entraide et d’un regard commun pour l’avenir de la profession : « Nous ne savons absolument pas quel est l’intérêt de ces décisions », indique-t-il.
Il est à noter que la Chambre revendique l’alignement du prix de la séance de kinésithérapie qui coûte 11 dinars dans un cabinet de rééducation tenu par un physiothérapeute et 15 dinars dans centre de médecine physique, tenu par un médecin physique. « Pourtant ceux qui assurent le bon déroulement des séances ont eu la même formation et le même niveau d’étude », conclut-il.
Réponse de la CNAM
Contacté par leconomistemaghrebin.com, le porte-parole de la CNAM, Younes Ben Nejma, a indiqué que le manuel de procédure est un document interne qui facilite les tâches et qu’il n’existe aucune nouvelle mesure d’après ses dires.
Notre interlocuteur a indiqué que ce qui dérange les physiothérapeutes c’est l’exigence d’un calendrier de la part de la CNAM pour les séances de traitement du patient afin d’obtenir la prise en charge. Pour notre interlocuteur, la présentation d’un tel document prouve qu’il s’agit d’un dossier sérieux : » Une démarche pareille prouve bel et bien qu’il s’agit d’un dossier sérieux. Et la présence du calendrier fera en sorte que le dossier soit traité rapidement », insiste-t-il.
En ce qui concerne les demandes de prise en charge qui n’ont pas de calendrier, cela pourrait indiquer que le patient n’est pas sûr de vouloir suivre les séances. Il a expliqué que lorsque la CNAM reçoit un dossier sans calendrier, la période de son traitement pourrait atteindre deux ou trois semaines. C’est un fait que le calendrier a fait l’objet d’une convention entre la CNAM et la Chambre nationale des physiothérapeutes qui relève de l’UTICA.
Sur un autre volet, il a avancé que le médecin généraliste n’est pas bien placé pour prescrire des séances de rééducation : » Généralement c’est l’orthopédiste qui est le mieux placé pour prescrire ce genre de soins ».