Le financement des syndicats demeure l’un des sujets que les syndicalistes et spécialistes en droit du travail préfèrent ne pas aborder. A regarder les syndicats qui agissent pour décréter les grèves, soutenir un certain nombre de causes, la question devient légitime : mais qui finance les syndicats ?
La retenue sur salaire moyen principal de financement
Parmi les moyens de financement, la retenue sur salaire demeure le moyen principal de financement d’un syndicat.
Mouldi Jendoubi, secrétaire général adjoint de l’UGTT affirme que : « La revendication de la retenue sur salaire est une revendication pour laquelle l’UGTT a milité depuis sa création » et de remonter dans l’histoire : «Plusieurs conflits ont opposé le gouvernement à l’UGTT ; Mohamed Mzali alors qu’il était Premier ministre a supprimé le 1%. Pourtant, c’est un acquis que nous avons arraché grâce à notre militantisme »
Pour les autres syndicats, il a affirmé que l’UGTT ne s’oppose pas au pluralisme syndical. Cependant : « Nous sommes contre le fait d’accorder le droit de la retenue à une organisation syndicale qui n’a pas encore un nombre d’adhérents conséquent », indique-t-il.
Pour cette raison l’UGTT en collaboration avec le ministère des Affaires sociales est en train d’élaborer les critères de représentativité avec l’Organisation internationale du Travail : « S’il s’avère que ces organisations syndicales ont une représentativité effective, il faut leur accorder le droit à la retenue sur salaire», dit-il.
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Cependant, le Tribunal administratif a une autre vision de l’affaire. Le 26 juin 2015, il a rendu un jugement concernant le procès intenté par la CGTT visant l’annulation de la décision gouvernementale l’ayant privée du droit à la négociation, la retenue sur salaires, la mise en disponibilité des syndicalistes et autres avantages que lui procurent la loi et la Constitution à l’instar des autres organisations syndicales. Ainsi la CGTT aura les mêmes droits que l’UGTT. « Nous respectons la loi et la décision du Tribunal administratif qui est indépendant et loin de toute tractation. Cependant, il n’a pas pris en considération les critères internationaux », avance-t-il. Les critères en question sont l’ancienneté de l’organisation, le militantisme et la transparence d’après notre interlocuteur. Par ailleurs, notre interlocuteur a indiqué que l’UTICA et l’UGTT reçoivent des subventions de la part de la CNSS afin de faciliter leurs missions.
En attendant la circulaire du chef du gouvernement…
Nabil Ourari, directeur de la législation du travail à la direction générale du travail au ministère des Affaires sociales, expose le volet juridique de la question. Il a indiqué qu’il existe deux méthodes de financement pour les syndicats : soit les subventions à travers la CNSS soit les adhésions des affiliés.
D’après notre interlocuteur, la part importante du financement provient des adhésions qui sont collectées de deux manières : soit par la retenue sur salaire moyennant un formulaire à remplir par l’affilié. « La problématique se situe au niveau du chef du gouvernement qui doit donner l’ordre aux ministres pour activer cette procédure ». indique-t-il
Même l’Organisation internationale du travail a changé d’avis. En effet, bien avant les années 90 elle a considéré qu’il ne faut pas faire de retenue sur salaire et que les fonctionnaires devraient déposer par eux-mêmes leurs cotisation mais vers les années 90, elle a changé d’avis « et a considéré la procédure comme une facilitation des missions des syndicats »
Pour une loi organique régissant le financement des syndicats
Cependant, la retenue sur salaire est un outil qui doit être maîtrisé et utilisé convenablement. Abdelkader Ben Fadhla, docteur en droit du travail, rappelle que pendant les événements de janvier 1978, le gouvernement a privé l’UGTT de ce droit et par conséquent de tout financement. Ainsi la retenue sur salaire s’est transformée en moyen de pression de la part du gouvernement sur les organisations syndicales. « Le financement et l’indépendance du syndicat sont deux sujets intimement liés » et en rapport avec le pluralisme syndical, avertit-il. Mais où réside le problème ? La retenue sur salaire n’est pas automatique et chaque année il faut une nouvelle circulaire qui émane de la présidence du gouvernement. « Cependant pour régir ce sujet il faut qu’il y ait une loi organique régissant la retenue pour l’éloigner de toute tractation », recommande-t-il.
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Notre interlocuteur a indiqué que jusqu’à maintenant aucun texte de loi ne précise les limites du travail syndical et le minimum de service qu’il faut assurer pendant les grèves.