La réforme du Code de procédure pénale, qui garantit l’accès à un avocat en garde en vue, est entrée en vigueur aujourd’hui 1er juin 2016.
S’il s’agit d’une avancée considérable en matière de mise en œuvre d’un acquis constitutionnel, Avocats Sans Frontières a rappelé que beaucoup reste à faire pour que ce droit soit effectif et universel.
Dès le 1er juin 2016, toute personne – tunisienne ou étrangère – prévenue ou victime, a le droit d’être assistée par un avocat en cas de mise en garde à vue dans un commissariat de police, de la Garde nationale ou des douanes. Adoptée le 2 février 2016 dernier par l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), cette disposition est venue réformer l’article 13bis et suivant du Code de procédure pénale.
D’autres garanties supplémentaires pour le prévenu ont été également entérinées et la période de détention en garde à vue est réduite, conformément à la nature de l’infraction commise. Ainsi, la durée de la garde à vue passe de 72 heures à 48 renouvelables une seule fois pour les crimes, et sera de 48 heures renouvelables de 24 heures une seule fois pour les délits, et de 24 heures non renouvelables pour les contraventions. Le législateur a prévu aussi la nullité de la procédure en cas de manquement aux nouvelles dispositions énoncées dans le nouvel article 13 bis.
« Cette réforme constitue un vrai marqueur dans la construction de l’Etat de droit en Tunisie. C’est sans doute la plus importante des réformes depuis l’adoption de la Constitution », se réjouit Antonio Manganella, directeur d’Avocats Sans Frontières en Tunisie.
Cependant, l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions prévues par la loi n° 5-2016 du 16 février 2016 vont soulever de nombreuses difficultés pratiques et il reste beaucoup à faire pour rendre effectif et accessible le dispositif permettant à tout prévenu d‘exercer son droit à être assisté par un avocat. « Les autorités n’ont pas assez communiqué sur l’entrée en vigueur de la loi. Or, si le justiciable ne connaît pas son droit, il peut difficilement le revendiquer », souligne Héla Ben Salem, Coordinatrice du programme réforme de la justice chez ASF.
D’autres défis sont à relever, notamment en matière d’organisation des permanences des avocats et du parquet, du financement et de formations des différents acteurs. « L’efficacité de la loi, dépendra surtout de la volonté des nombreux acteurs qui doivent intervenir dans la procédure de garde à vue, à savoir les postes de police, les procureurs, ou encore les avocats », rappelle Maître Azaiz Samoud, gestionnaire de projet Garde à vue chez ASF et coordinateur du pool d’avocats formés en partenariat avec l’Ordre National des Avocats de Tunisie.
Le projet pilote Garde à vue d’ASF a démarré en novembre 2015. Il permettra d’évaluer les enjeux et les modalités pratiques de la mise en œuvre à grande échelle de l’assistance des justiciables dès la phase de garde à vue. Cette expérience aboutira à la publication d’un guide pratique et à la diffusion de recommandations à toutes les parties concernées.