Les élections municipales auraient lieu en mars 2017. Fait surprenant, elles ne suscitent pas encore la mobilisation requise de la classe politique. Comment expliquer ce désintérêt, alors que ces élections constituent un processus de décentralisation effective, qu’elles assurent la relève politique demandée, pour corriger une gouvernance municipale défiante.
Faut-il rappeler que les services municipaux se sont illustrés par leur défection : ramassage souvent irrégulier des déchets, absence de campagne contre les moustiques, constructions anarchiques…
Les deux partis appelés à s’affronter, Ennahdha et Nidaa Tounes, sont paralysés par leurs alliances. Remise en cause de leurs fondamentaux! Leurs adhérents affirment volontiers que les dirigeants s’éloignent des valeurs spécifiques de leurs partis. L’affrontement identitaire était le marqueur clef pour les deux partis. Il a assuré leurs audiences par leur opposition sur les projets de sociétés (idéaltype bourguibien et islam politique).
Nous entrons, parait-il, dans une nouvelle bipolarisation de la vie politique (Ennahdha – Nidaa, contre l’idéologie du changement). Mais la complexité des acteurs feraient plutôt valoir une multipolarisation. Les partis de gauche et les mouvances de surenchères ne parviennent pas à fédérer le mécontentement.
Des observateurs se sont empressés d’affirmer, qu’il n’y a pas d’alternative au parti Ennahdha, vu le processus démonstratif de l’inauguration de son congrès. Or, un diagnostic objectif, en relation avec l’état de l’opinion publique, montre que tous les partis sont plus ou moins minoritaires. L’effet de loupe créé de toutes pièces par les médias ne devrait pas enduire en erreur les observateurs. Le gouvernement et le parlement traduiraient plutôt « un équilibre des faiblesses ». Or, les partis, à l’exception de Ennahdha, se sont peu souciés de constituer des relais populaires sur le terrain.
Nidaa est actuellement dans l’œil du cyclone. Absence d’une vision de loyauté collective, l’entre-soi a séparé ses actuels dirigeants des électeurs. Ses fondateurs ont été mis sur la touche ou ont été marginalisés. Nidaa Tounes peut-il survivre à l’épreuve et transgresser le jeu de dupes, facteur de mécontentement?
Le Mouvement pour le projet de la Tunisie, issu de la scission est en voie de formation. Il ne semble pas disposer d’importantes assises populaires. Les mutations tactiques d’Ennahdha, sinon sa refonte idéologique, pourraient lui faire perdre l’audience de la prédication et mécontenter ses alliés arabes et turcs, qui jouent la carte de l’islam politique.
Ne perdons pas de vue que les élections municipales concernent au-delà de la physionomie politique du pays, la gouvernance locale. En dépit des velléités des partis, l’establishment politique tunisien devrait ouvrir les élections municipales aux indépendants. Une vague de fond pourrait assurer la victoire de personnalités, que les partis peinent à intégrer.